La surveillance des salariés, fait l’objet d’un contentieux abondant et toujours délicat.

La géolocalisation des salariés n’échappe pas à la règle.

Une nouvelle illustration a été apportée par la Cour de Cassation en matière de contrôle du temps de travail des salariés.

 

Les faits :

Un salarié occupait des fonctions de distributeur de journaux et de publicités.

L’employeur décide mettre en place un système de géolocalisation afin de contrôler le temps de travail des distributeurs.

Le salarié décide de prendre acte de la rupture de son contrat de travail, en raison de la surveillance excessive qui pèse sur lui, et demande aux juges de reconnaitre que cette prise d’acte produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il considère que cette surveillance excessive ne permet plus la continuation du contrat de travail et constitue un manquement grave de l’employeur.

A l’appui de sa contestation le salarié développe les arguments suivants :

 

  •  D’une part, il ne peut être apporté aux droits et libertés des personnes, de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir, ni proportionnées au but recherché ce que prévoit d’ailleurs l’article L 1121-1 du code du travail ;
  •  D’autre part, l’utilisation d’un système de géolocalisation pour contrôler la durée du travail, n’est licite qu’à la condition qu’un autre moyen, même moins efficace, ne puisse pas permettre d’assurer un tel contrôle.

 

Le salarié estimait encore que le contrôle du temps de travail par géolocalisation n’était pas le seul système possible dès lors que l’entreprise pratiquait la modulation du temps de travail et qu’une partie des salariés n’était pas en horaire collectif et réalisait une partie importante de leur temps de travail en dehors des locaux de l’entreprise.

La solution :

La Cour de cassation approuve le salarié.

Elle rappelle au visa de l’article L 1121-1 que nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché.

Elle reprend ensuite l’argument du salarié en affirmant que l’utilisation d’un système de géolocalisation pour assurer le contrôle de la durée du travail, n’est licite que lorsque ce contrôle ne peut pas être fait par un autre moyen.

Enfin, la Cour déclare que la géolocalisation n’est pas justifiée lorsque le salarié dispose d’une liberté dans l’organisation de son travail.

La géolocalisation est par essence liberticide en ce qu’elle porte atteinte à la vie privée du salarié en surveillant ses déplacements.

La Cour de cassation régule depuis longtemps cet outil.

Elle a déjà pu juger que l’utilisation d’un système de géolocalisation n’est possible que si aucun autre moyen de contrôle de la durée du travail n’existe.

Elle a ensuite régulé plus fortement la géolocalisation, en rajoutant que si un autre système existe, même moins efficace, celui-ci devait être utilisé.

Elle a également déjà jugé que la géolocalisation n’est pas justifiée pour des salariés autonomes dans leur organisation du temps de travail. Elle ne peut donc être utilisée à leur égard.

Cet arrêt est d’autant plus important qu’en l’espèce, la prise d’acte du salarié risque de produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et non d’une démission.

A l’heure où les moyens de surveillance se développent avec la technologie, tout n’est pas permis.

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