Etat prévisionnel des travaux et bail commercial : un document obligatoire
A la conclusion du contrat, le bailleur doit fournir au locataire un état prévisionnel des travaux qu'il envisage de réaliser, assorti d'un budget prévisionnel :
"Lors de la conclusion du contrat de location, puis tous les trois ans, le bailleur communique à chaque locataire :
1° Un état prévisionnel des travaux qu'il envisage de réaliser dans les trois années suivantes, assorti d'un budget prévisionnel ;
2° Un état récapitulatif des travaux qu'il a réalisés dans les trois années précédentes, précisant leur coût." (Code de commerce, article L145-40-2).
Etat prévisionnel des travaux et bail commercial : pas d'obligation de réaliser les travaux prévus
La loi n'a prévu aucune sanction en cas de prévisionnel erroné.
Il a déjà été jugé que les travaux prévus mais finalement non-réalisés ne sont pas dans le champ contractuel et donc que le non-respect du prévisionnel ne permet pas d'engager la responsabilité du bailleur.
"Par ailleurs, il figure en annexe n°5 du contrat de bail commercial un « état récapitulatif des travaux des trois dernières années par le bailleur et le prévisionnel des travaux à venir ». Selon ce tableau, il apparaît qu'en 2017 le prévisionnel est de 100 000 euros HT et de 3 000 000 euros HT en 2018.
Cependant, il sera observé que le bailleur a simplement informé son locataire de travaux de rénovation à venir (« prochainement », « devraient être réalisés dans le courant de l'année 2018») sans en communiquer une date précise comme le confirme par ailleurs l'annexe n° 5 (« prévisionnel des travaux à venir »).
Surtout, il convient de relever que le bail commercial, pièce communiquée par chacune des parties et par conséquent dont le contenu est contradictoire, indique sans ambiguïté dans le « paragraphe CG6 ' travaux réparations » que « le bailleur communique un état indiquant « - Le prévisionnel des travaux qu'il envisage de réaliser dans les trois années suivantes, assorti d'un budget prévisionnel. Cet état prévisionnel n'emporte aucune obligation de la part du BAILLEUR de réaliser les travaux dans le délai indiqué qui pourront être repoussés ou abandonner pour quelque motif que ce soit. ' Le récapitulatif des travaux que le BAILLEUR a réalisé dans les trois années précédentes, précisant leur coût ».
Par conséquent, dès lors que les travaux de rénovation ne figuraient pas dans le champ contractuel, la SAS Les 7 collines n'a pas manqué à son obligation de délivrance et d'entretien." (Cour d'appel de Nîmes, 10 octobre 2025, n°23/03424)
Le prévisionnel a donc une portée uniquement indicative.
Etat prévisionnel des travaux et bail commercial : pas de sanction automatique en cas de budget erroné
Selon la même logique, les juges retiennent que le prévisionnel n'étant qu'un prévisionnel, une évolution même significative du budget de travaux n'engage pas la responsabilité du bailleur ou n'entraîne pas la nullité du bail, dès lors que la décision du locataire de s'engager n'était pas déterminée par ce prévisionnel :
"Le bail énonce le projet de restructuration et d'extension, avec transfert de la surface de vente intérieure de l'enseigne Brico Dépôt et le réaménagement du parking personnel en 'cour des matériaux' de la même enseigne. Ces travaux étaient donc connus du preneur, et les premiers juges soulignent justement que ce dernier a trouvé avantage à récupérer après travaux, une surface commerciale mieux adaptée à l'évolution de son commerce et mieux desservie.
Il résulte du bail que le preneur a déclaré que les montants et coûts de travaux, communiquées, susceptibles d'évolution, n'ont pas prévalu dans sa décision de conclure.
Dès lors, les informations données par le bailleur s'agissant de l'état prévisionnel des travaux, dont il est soutenu qu'elles ont été incomplètes, ne peuvent en tout état de cause, être qualifiées de déterminantes pour la société Brico Dépôt. Il est observé qu'elle ne sollicite pas la nullité du bail, se limitant à prétendre à une responsabilité de son bailleur et à solliciter réparation." (Cour d'appel de Rennes, 27 novembre 2024, n°22/00385).
Etat prévisionnel des travaux et bail commercial : conseils pratiques
Ainsi que le montre la jurisprudence, le juge analyse la portée de l'état prévisionnel également en tenant compte des clauses du bail. Dans les deux affaires citées, il s'est déterminé en faveur du bailleur en raison de clauses précisant que le prévisionnel était indicatif et que ce qu'il prévoyait pouvait évoluer ou précisant que le locataire n'était pas déterminé dans sa décision de signer le bail par le contenu de l'état prévisionnel des travaux.
Une précaution particulière dans la rédaction du bail est nécessaire. Si les parties entendent créer une obligation pour le bailleur de réaliser des travaux, il convient de rédiger une clause spécifique et de ne pas contenter de l'état prévisionnel. Il en est de même si le montant prévisionnel des travaux est déterminant pour le locataire, qui peut avoir besoin d'un engagement plus qu'une simple indication pour s'engager et maîtriser son budget.
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Goulven Le Ny, avocat au Barreau de Nantes
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