Contrairement aux agents du service public, les élus locaux ne sont pas soumis au principe de neutralité. 

 

Pour assurer leur mission de service public, les agents n’ont pas le droit de manifester leurs opinions politiques, religieuses ou philosophiques. Cette interdiction permet de garantir un égal traitement des demandes des usagers par les agents. La méconnaissance de cette obligation de neutralité est une faute qui peut être sanctionnée dans le cadre d’une procédure disciplinaire.  

 

A l’inverse, dans le cadre de leur mandat, les élus locaux jouissent d'une grande liberté d’expression. Et ils ne sont pas contraints par une obligation de neutralité.  

Cependant, cette grande liberté ne doit pas conduire à perturber le bon déroulement d’une séance en conseil municipal. Titulaire du pouvoir de la police des assemblées, le Maire doit faire respecter le bon ordre des réunions. 

 

Sur le fondement de ce pouvoir de police, confronté à un élu qui perturberait la sérénité des débats, le Maire peut procéder à des rappels à l'ordre, suspendre la séance voire exclure le conseiller.  

Mais, il a déjà été jugé qu’un Maire ne pouvait pas interdire à un élu de prendre la parole lors d’une séance de conseil municipal en raison du port de sa croix chrétienne. Une telle interdiction, qui n’était justifiée par aucun trouble lors de la réunion, avait été reconnue comme portant atteinte au droit de parole de l’élu.  

La police de l’assemblée peut également dépendre du règlement intérieur du conseil municipal, document rédigé pour les Communes de 1 000 habitants et plus. 

Dans cette affaire, le règlement intérieur du conseil municipal d'une Commune imposait à ses élus de porter “une tenue vestimentaire correcte ne faisant pas entrave au principe de laïcité”. 

Les membres du groupe d'opposition de cette collectivité se sont opposés à cette rédaction.

Le tribunal administratif de Grenoble a considéré que cette règle vestimentaire interdit de manière générale aux élus de porter une tenue manifestant leur appartenance à une religion. Or, cette interdiction est illégale car, comme le rappelle le Tribunal, les élus locaux ne sont pas soumis à l’obligation de neutralité.

Le tribunal ordonne donc la modification de la rédaction du règlement intérieur du conseil municipal.  

 

Si le Maire doit faire régner l’ordre lors d’une séance de conseil municipal, la liberté d’expression des élus doit être préservée.  

 

(TA Grenoble, 7 juin 2024, n°2100262)