​                              Le statut de l’agent commercial : avantages et inconvénients

Lorsque vous souhaitez exercer l’activité de commercial, ou de représentant commercial,  ou encore recruter une personne pour vendre vos produits, vous avez le choix entre différents statuts.

La loi a en effet créé différentes formes d’exercice, parmi lesquelles l’agent commercial, aux côtés du V.R.P (Voyageur, représentant ou placier). 

Que vous souhaitiez exercer cette activité, ou embaucher un représentant commercial, il est important de s’interroger sur le statut vous convenant le mieux, au regard de vos besoins et des conséquences attachées à chacun.

Le statut et la définition de l’agent commercial sont prévus par l’article L134-1 du code de commerce selon lequel :

« L'agent commercial est un mandataire qui, à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé, de façon permanente, de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente, d'achat, de location ou de prestation de services, au nom et pour le compte de producteurs, d'industriels, de commerçants ou d'autres agents commerciaux. Il peut être une personne physique ou une personne morale et s'immatricule, sur sa déclaration, au registre spécial des agents commerciaux. »

Tout comme le V.R.P, l’agent commercial vend les produits pour le compte d’un tiers ; le V.R.P travaille pour son employeur, et l’agent commercial pour son mandant.

Tout comme le V.R.P multicartes, l’agent commercial peut travailler pour une ou plusieurs personnes.

Le reste de leur statut est assez différent.

  • Le statut de l’agent commercial :

Son statut est régi par les articles L134-1 à L134-17 du code de commerce.

Contrairement au V.R.P, l’agent commercial n’est pas salarié.

En dépit du nom qui lui est donné, l’agent commercial n’a, en principe, pas la qualité de commerçant : il a le statut de travailleur indépendant et peut exercer en nom propre ou via une société qu’il crée pour ce faire (s’il s’agit d’une société commerciale, elle aura alors la qualité de commerçant mais à ce titre et non en raison de son activité d’agent commercial).

Ce statut d’indépendant non salarié emporte certaines contraintes pour l’agent : il devra ainsi s’immatriculer en tant qu’indépendant, et à ce titre, tenir une comptabilité.

Il devra en outre, pour exercer sous ce statut, impérativement s’immatriculer auprès du registre des agents commerciaux ; Il s’agit d’une formalité distincte de l’inscription en tant qu’indépendant, ou encore de l’immatriculation au RCS le cas échéant.

En qualité d’indépendant, il se constitue une clientèle dont il fait profiter ses mandants.

Aussi il est parfaitement libre de céder, moyennant rémunération, les contrats d’agents dont il dispose à des tiers (sous certaines conditions cependant pour respect des intérêts des entreprises pour lesquelles il travaille ; il est possible d’encadrer les conditions de telles cessions dans une clause du contrat).

 

Comparaison V.R.P (multicartes) / Agent commercial

Agent Commercial

V.R.P Multicartes

Travailleur indépendant

Salarié

Peut avoir plusieurs mandants

 Peut avoir plusieurs employeurs

Peut exercer en nom propre ou via une Société 

Exerce en tant que personne physique

Rupture du contrat :

  • possible sans motif ni procédure spécifique

 

  • Respect d’un préavis minimum prévu par la loi
  • Versement d’une indemnité compensatrice d’environ 2 années de commission si la rupture vient du mandant, sauf faute grave
  • Compétence du Tribunal judiciaire ou du Tribunal de commerce en cas de contentieux

Rupture du contrat :

  • Procédure de licenciement à respecter (et cause de licenciement valable à invoquer)
  • Respect d’un préavis minimum prévu par la loi
  • Versement d’une indemnité de clientèle d’environ 2 années de salaire si la rupture vient du mandant, sauf faute grave
  • Compétence du Conseil des Prud’hommes en cas de contentieux

 

 

Il est parfaitement possible de cumuler le statut de V.R.P et d’agent commercial.

 

  • L’importance de la rédaction du contrat d’agent commercial :

L’agent commercial est lié avec ses mandants par des contrats d’agent commercial.

Ce contrat n’est obligatoire que si l’une des parties l’exige (art.L134-2),  pourtant il est capital.

En effet, les relations de l’agent et de son mandant et donc les solutions à leurs éventuels désaccords, dépendront principalement de ce contrat, la loi ne prévoyant que peu de dispositions impératives.

Constituant le cœur de la relation entre l’agent et son mandant, il convient d’être particulièrement attentif à la rédaction de ce contrat afin de préserver au mieux vos intérêts.

Il est possible de prévoir une période d’essai.

Cette convention doit par ailleurs déterminer quels produits et quels secteurs géographiques sont confiés à l’agent.

Le contrat doit également prévoir les modalités de rémunération de l’agent commercial, laquelle est généralement constituée de commission sur les ventes réalisées.

A défaut de précision, l’agent pourra prétendre à « une rémunération conforme aux usages » selon article L134-5 ; l’imprécision d’une telle formulation est néanmoins source de contentieux en cas de désaccord, d’où l’importance d’insérer une clause sur la rémunération dans le contrat.

En tout état de cause, l’article L134-6 dispose que, dès lors qu’un secteur géographique défini est confié à l’agent commercial, il a droit à une commission sur tout article vendu dans son secteur (que la commande soit ou non passée par son intermédiaire donc).

La loi accorde ainsi en réalité une exclusivité à l’agent commercial pour la vente des produits de son mandant dans les secteurs qui lui sont confiés.

Cette disposition est donc particulièrement intéressante pour l’agent, et l’est moins pour son mandant qui devra ainsi commissionner ses agents y compris pour de ventes réalisées en direct.

  • Articulation entre le droit de l’agent de représenter plusieurs marques, et le respect de non concurrence entre ses mandants :

L’agent commercial est spécialisé dans un type de produit, ou un type de client.

Aussi les marchandises vendues par ses différents mandants sont souvent similaires . L’article L134-3 dispose expressément que l’agent commercial est libre d’accepter de nouveaux mandats sans avoir à recueillir préalablement l’accord de ceux pour qui il travaille déjà, pour autant, ils ne doivent pas se concurrencer directement entre eux.

Cet article prévoit donc également que, pour représenter une entreprise concurrente, l’agent devra préalablement obtenir l’accord de son mandant concerné.

Par ailleurs, il est parfaitement possible de prévoir une clause de non-concurrence, qui trouvera à s’appliquer en fin de contrat, à la condition toutefois que celle-ci soit proportionnée et limitée.

  • Intérêt de recourir à un agent commercial pour une entreprise souhaitant s’implanter :

L’agent commercial exerce généralement dans un domaine particulier ; il vend un type de produits déterminé dans un secteur géographique qu’il connait bien pour  y travailler déjà pour plusieurs autres entreprises ; il représente ainsi plusieurs marques.

De par son activité, il dispose d’un réseau de clients, du commerçant indépendant aux grandes enseignes à qui il vend les produits de ses mandants.

Une entreprise souhaitant s’implanter dans un nouveau secteur géographique ou promouvoir une nouvelle marque a tout intérêt à recourir à un agent commercial déjà implanté dans le secteur. En effet, celui-ci aura bien plus de facilités à promouvoir de nouveaux produits auprès de ses clients qui le connaissent parfaitement et qui lui ont déjà accordé leur confiance.

Cela lui permet en outre d’éviter le coût non-négligeable inhérent à l’embauche d’un commercial salarié.

Cet avantage indéniable de l’agent commercial a néanmoins une contrepartie financière venant compenser l’implantation ainsi apportée à l’entreprise :

En cas de rupture du contrat par le mandant, sauf faute grave, l’agent commercial a droit à une indemnité compensatrice (art. L134-12).

Il lui suffit pour cela qu’il en sollicite le bénéfice auprès de son mandant dans l’année de la cessation de leurs relations.

La Cour de cassation a, encore récemment, rappelé que la loi n’imposait aucune forme pour que cette demande soit recevable (arrêt Cour de cassation du 20 mars 2024).

Le montant de cette indemnité équivaut au préjudice subi par l’agent du fait de l’absence de poursuite de sa mission ; selon les usages ce préjudice correspond généralement à un à deux ans de commissions.

En conclusion, les principaux avantages du statut d’agent commercial peuvent être résumés ainsi :

Intérêt pour le mandant

Intérêt pour l’agent commercial

  • pas de charges salariales à proprement parler
  • pas d’application du droit du travail
  • contrat plus facilement résiliable, et pas de conditions pour recourir à un contrat à durée déterminée

-Bénéficier d’une exclusivité géographique : rémunération sur toutes les ventes de son secteur

- pouvoir travailler pour plusieurs entreprises (également possible néanmoins pour le VRP multicartes)

 

Bénéficier du réseau de distribution déjà développé par l’agent commercial pour ses autres mandants

Droit à une indemnité compensatrice bien plus intéressante qu’une indemnité de licenciement si le mandant met fin à son contrat

A vous de choisir le statut convenant le mieux à vos besoins spécifiques !

Sophie PRESTAIL

Avocat au Barreau de GRENOBLE

Et Médiateur