Dans un arrêt rendu le 29 novembre 2023 (n° 22-15.794), publié au bulletin, la chambre sociale de la Cour de cassation a tranché la question de la protection de la salariée en congé maternité contre l’engagement d’une procédure de licenciement.  

Une salariée a été engagée en qualité de chef de projet internet. Elle exerçait en dernier lieu les fonctions de responsable marketing.

Son contrat de travail a été suspendu en raison de son congé maternité et des congés payés pris immédiatement après.

Au cours de son congé maternité, elle a été convoquée par son employeur à un entretien préalable à son éventuel licenciement.

La salariée fait grief à l’arrêt d’appel de la débouter de ses demandes de nullité du licenciement pour motif économique et de réintégration, ainsi que de ses demandes afférentes à la rupture, au motif qu'il est interdit non seulement de notifier une décision de licenciement pendant la période de protection visée à l'article L. 1225-4 du code du travail, mais également de prendre des mesures préparatoires à une telle décision.

Elle forme un pourvoi en cassation à l’encontre de l’arrêt d’appel suivant lequel l’employeur n’avait accompli aucun acte préparatoire au licenciement pendant la période de protection.

La Cour de cassation devait donc répondre à la question de savoir si la convocation à un entretien préalable de licenciement constitue un acte préparatoire au licenciement bénéficiant de la protection contre le licenciement prévue en faveur de la salariée en congé maternité.

Elle répond à cette question de la manière suivante : il résulte de l’article L. 1225-4 du code du travail, interprété à la lumière de l'article 10 de la directive 92/85/CEE du Conseil du 19 octobre 1992, « qu'il est interdit à un employeur, non seulement de notifier un licenciement, quel qu'en soit le motif, pendant la période de protection visée à ce texte, mais également de prendre des mesures préparatoires à une telle décision ».

Ainsi, l'employeur ne peut engager la procédure de licenciement pendant la période de protection, notamment en envoyant la lettre de convocation à l'entretien préalable, un tel envoi constituant une mesure préparatoire au licenciement, peu important que l'entretien ait lieu à l'issue de cette période.

Pour rappel, l’article L. 1225-4 du code du travail prévoit que :

« Aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d'une salariée lorsqu'elle est en état de grossesse médicalement constaté, pendant l'intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit au titre du congé de maternité, qu'elle use ou non de ce droit, et au titre des congés payés pris immédiatement après le congé de maternité ainsi que pendant les dix semaines suivant l'expiration de ces périodes ».

L’article 10 de la directive 92/85/CEE du Conseil, du 19 octobre 1992, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail, énonce que :

« En vue de garantir aux travailleuses, au sens de l'article 2, l'exercice des droits de protection de leur sécurité et de leur santé reconnus dans le présent article, il est prévu que : 1) les États membres prennent les mesures nécessaires pour interdire le licenciement des travailleuses, au sens de l'article 2, pendant la période allant du début de leur grossesse jusqu'au terme du congé de maternité visé à l'article 8 paragraphe 1, sauf dans les cas d'exception non liés à leur état, admis par les législations et/ou pratiques nationales et, le cas échéant, pour autant que l'autorité compétente ait donné son accord ; 2) lorsqu'une travailleuse, au sens de l'article 2, est licenciée pendant la période visée au point 1, l'employeur doit donner des motifs justifiés de licenciement par écrit ; 3) les États membres prennent les mesures nécessaires pour protéger les travailleuses, au sens de l'article 2, contre les conséquences d'un licenciement qui serait illégal en vertu du point 1 ».

La solution retenue par la Cour de cassation semble donc être conforme tant au droit de l’Union qu’au droit interne du travail : il est interdit d’engager une procédure de licenciement à l’encontre d’une salariée au cours de la période de protection conférée par le congé maternité.

Par procédure de licenciement, il ne faut donc pas seulement entendre la phase finale que constitue la notification du licenciement mais il convient d’inclure également toute phase préparatoire, et ce compris la convocation à l’entretien préalable de licenciement.

Jérémy DUCLOS

Avocat au barreau de Versailles

Spécialiste en droit du travail

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