Responsabilité du maître de l'ouvrage et acceptation des risques
La Cour de cassation a rendu un arrêt, relatif à l’absence de réalisation d’études de sol, en date du 7 novembre 2024, (Cass. 3e civ. 7 novembre 2024, n° 22-22. 793 et n°23-18.548), qui met en lumière les conséquences juridiques de l'acceptation délibérée des risques, par le maître de l'ouvrage.
Les faits
Dans cette affaire, la société Axa, en tant qu'assureur de M. [W], et la société Alpha Insurance, ont été condamnées in solidum avec la société Lloyd's Insurance Company à indemniser les acquéreurs pour divers préjudices, liés à des désordres affectant la villa.
Les condamnations incluaient des sommes importantes, pour la reprise des désordres, la perte de jouissance des propriétaires, et des préjudices moraux.
Le litige
Les sociétés Axa et Alpha Insurance ont contesté cette décision en invoquant l'article 1792 du code civil, qui dispose que tout constructeur est responsable des dommages compromettant la solidité de l'ouvrage, sauf si ces dommages proviennent d'une cause étrangère.
Elles ont soutenu que le maître de l'ouvrage avait délibérément pris le risque de ne pas faire réaliser d'étude de sol avant les travaux, malgré l'avis défavorable du contrôleur technique, ce qui devrait exonérer les constructeurs de leur responsabilité.
La décision de la Cour de cassation
La Cour de cassation a rappelé que l'acceptation délibérée du risque par le maître de l'ouvrage constitue une cause étrangère, exonérant les constructeurs de leur responsabilité.
En conséquence, la Cour de cassation a jugé que la Cour d'appel n'avait pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en retenant la responsabilité décennale des constructeurs.
Conclusion
Cet arrêt souligne l'importance, pour les maîtres d'ouvrage, de suivre les avis techniques et de réaliser les études nécessaires avant d'entreprendre des travaux.
Très souvent, les promoteurs veulent faire l’économie des études de sols, pourtant de plus en plus nécessaires, tant au regard de la qualité des terrains, que du changement climatique.
En cas de sinistre, ils se retournent contre les maîtres d’œuvre et les entreprises, en leur reprochant de ne pas avoir pris les mesures nécessaires.
Ils espèrent que leurs compagnies d’assurance prendront en charge le coût de réparation, qui résulte de leurs économies initiales, dans la construction.
Ils essaient de réaliser des marges arrières, sur le dos des assureurs, ce qui n’est pas sain pour le secteur de la construction car, de manière générale, cela augmente le coût des primes d’assurances et, à terme, cela a un impact sur la compétitivité des entreprises du bâtiment.
L'acceptation délibérée des risques peut, dans certains cas, exonérer les constructeurs de leur responsabilité, mais encore faut-il que cette cause étrangère soit clairement démontrée.
Les assureurs et les constructeurs doivent donc être vigilants et s'assurer que toutes les précautions sont prises pour éviter de tels litiges.
Cet arrêt est un rappel crucial des obligations et des responsabilités dans le domaine de la construction, et il met en lumière les conséquences potentielles de la négligence des études préalables.
Il rappelle aux constructeurs et promoteurs professionnels qu’ils ont une responsabilité lorsqu’ils font des économies délibérées.
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