Le fichier de traitement des antécédents judiciaires (TAJ) est une base de données largement méconnue du grand public, mais aux conséquences potentiellement lourdes pour les personnes qui y sont inscrites. Que vous ayez été victime, mis en cause, ou simplement entendu dans le cadre d’une enquête, votre nom peut s’y retrouver — parfois durablement.

Dans cet article, nous allons :

  • Expliquer ce qu’est le TAJ et qui y figure,

  • Mettre en lumière les conséquences possibles d’une inscription dans ce fichier,

  • Détailler la procédure d’effacement : à qui s’adresser, sur quels fondements, avec quels arguments.

Qu’est-ce que le fichier TAJ ?

Le fichier de traitement des antécédents judiciaires (TAJ) est un fichier de police, créé par le décret n°2012-652 du 4 mai 2012, qui a fusionné les anciens fichiers STIC (Système de traitement des infractions constatées) et JUDEX.

Il est alimenté par la police nationale, la gendarmerie et certaines autorités judiciaires, et contient des informations sur :

  • Les personnes mises en cause dans des infractions,

  • Les victimes,

  • Les circonstances des faits, les procédures, les suites judiciaires, etc.

Le TAJ est destiné à faciliter le travail d'enquête et l'identification des personnes dans le cadre de procédures pénales. Cependant, l’inscription dans le TAJ ne présume en rien la culpabilité d’une personne.

Pourquoi l’inscription au TAJ peut poser problème ?

Même en l'absence de condamnation, une inscription au TAJ peut avoir des répercussions sérieuses :

  • Refus d’un agrément préfectoral (ex. : pour travailler dans la sécurité),

  • Refus de naturalisation ou de demande de visa,

  • Problèmes lors d’une demande de port d’arme ou d’un emploi dans la fonction publique,

  • Impact sur les enquêtes en cas de nouvelles procédures judiciaires.

Le maintien de ces données, notamment en cas de classement sans suite, de non-lieu, ou de relaxe, peut donc constituer une atteinte à la présomption d’innocence et au droit au respect de la vie privée.

Qui peut demander l’effacement ?

Toute personne inscrite dans le TAJ peut solliciter l'effacement ou la rectification des données la concernant, notamment :

  • En cas de classement sans suite,

  • En cas de non-lieu, relaxe ou acquittement,

  • Si les faits sont prescrits, ou les données obsolètes,

  • En présence d’un intérêt légitime (ex : insertion professionnelle).

À qui adresser la demande ?

La demande doit être adressée :

  • Au procureur de la République du tribunal judiciaire du lieu de l’enquête ou du domicile,

  • Ou directement au ministère de l’Intérieur – Service gestionnaire du TAJ (DGPN – DCPJ – sous-direction de la lutte contre la criminalité organisée et la délinquance financière).

Dans certains cas, la demande peut également être adressée à la CNIL, mais uniquement après un refus ou une absence de réponse de l’administration dans un délai raisonnable (deux mois).

Contenu de la demande

La demande d’effacement doit comporter :

  • Les coordonnées complètes du demandeur,

  • Une copie d’une pièce d’identité,

  • Une exposition claire des faits,

  • La justification de l’intérêt légitime à l’effacement,

  • Les pièces judiciaires (copie de la décision de classement sans suite, relaxe, etc.).

Exemple d’arguments :

  • Respect de la présomption d’innocence (article 9 de la Déclaration des droits de l’homme),

  • Droit au respect de la vie privée (article 8 CEDH),

  • Droit à la protection des données personnelles (RGPD et loi Informatique et Libertés),

  • Absence de condamnation définitive ou faits prescrits.

Que dit la loi ?

Le Code de procédure pénale, dans son article R.40-29 à R.40-33, encadre les conditions de conservation et de rectification des données inscrites au TAJ.

Par ailleurs, la CNIL veille à la légalité de la conservation de ces données. Elle rappelle que le droit d’effacement peut être invoqué dans les cas prévus par l’article 17 du RGPD (Règlement général sur la protection des données), notamment :

  • Lorsque les données ne sont plus nécessaires au regard des finalités,

  • En cas de retrait du consentement,

  • Ou lorsque le traitement est illicite.

Délais et suites

  • La décision d’effacement peut prendre plusieurs semaines à plusieurs mois.

  • En cas de refus, il est possible de saisir :

    • Le tribunal administratif pour contester,

    • La CNIL pour appuyer la demande.

Conclusion

L’inscription au fichier TAJ, bien qu’issue d’une logique de sécurité publique, peut constituer une entrave sérieuse à vos droits et à votre vie personnelle ou professionnelle. Heureusement, la loi prévoit des voies de recours.

Si vous estimez être injustement inscrit, ne restez pas passif : formulez une demande d’effacement claire, documentée et argumentée.

Et si besoin, faites-vous accompagner d’un avocat spécialisé en droit pénal ou en droit des données personnelles — vos droits méritent d’être pleinement défendus.

 

Maitre Jeremy LALOUM
Avocat pénaliste à Paris
43, rue Condorcet 75009
0699417770