CA CHAMBERY, 07 juin 2022, RG n° 21/00528 *

Par cet arrêt, dont l'infographie synthétique est téléchargeable, la Cour d'appel de CHAMBERY est amenée à apprécier le manquement d’un employeur dans la mise en place du CSE.

Au cas d’espèce, une salariée a été licenciée pour inaptitude avec dispense de recherche de reclassement ordonnée par le médecin du travail. Invoquant une exécution déloyale du contrat de travail de la part de son employeur, en raison notamment d'absence de CSE, elle a saisi les juridictions prud'homales.

En la matière, selon l’article L. 2311-2 du code du travail, un Comité social et économique est mis en place dans les entreprises d'au moins onze salariés. Sa mise en place n'est obligatoire que si l'effectif d'au moins onze salariés est atteint pendant douze mois consécutifs.

En outre, l’employeur se doit d’informer ses salariés de l’organisation des élections professionnelles selon l’article L. 2314-4 du même code.

Si, à l’issue des élections, aucun salarié ne s’est présenté, un procès-verbal de carence doit être établi.

Dans l’hypothèse où un employeur a commis un manquement en la matière, la jurisprudence estime que le salarié a incontestablement subi un préjudice ouvrant droit à indemnisation (Cass. soc., 17 mai 2011, n° 10-12.852).

Plus récemment, la Cour de cassation a confirmé sa position ancienne, le manquement de l’employeur privant ainsi les salariés d'une possibilité de représentation et de défense de leurs intérêts (Cass. soc., 17 octobre 2018, n° 17-14.392).

Cette jurisprudence est donc une exception à celle de la Chambre sociale qui exige la preuve d’un préjudice pour tout manquement de l’employeur à l’une de ses obligations légales, comme son obligation de sécurité (Cass. soc., 12 mai 2021, n° 20-14.507).

Au cas présent, après avoir rappelé la jurisprudence susvisée, la Cour d’appel de CHAMBERY note que la salariée a toujours indiqué que l'effectif de la Société était de quatorze salariés, chiffre qui n'a jamais été contesté par l'employeur. En outre, il ne contestait pas le fait que des élections professionnelles auraient dû être organisées.

Par ailleurs, selon la Cour, la salariée soulevait justement le fait qu'en n'organisant pas d'élections professionnelles, l'employeur l'avait privée de la possibilité d'être assistée pour la procédure de licenciement et de se confier, le cas échéant, quant à la souffrance au travail qu'elle estimait ressentir.

En revanche, il ne pouvait être retenu que la carence de l'employeur sur ce point l'avait illégitimement dispensé de consulter le comité social et économique après l'avis d'inaptitude délivré par la médecine du travail, dans la mesure où aucun texte ne contraint l'employeur à la consultation du CSE après délivrance d'un avis d'inaptitude précisant une impossibilité de reclassement au sein de l'entreprise.

En réalité, la Cour d’appel ne fait que reprendre l’arrêt quasi-concomitant de la Cour de cassation qui vient de préciser qu’en cas de dispense du médecin du travail de recherche de reclassement suite à un avis d’inaptitude, l’avis du CSE n’est pas obligatoire (Cass. soc., 8 juin 2022, n° 20-22.500).

Compte-tenu de ces éléments, la Cour condamne l'employeur a payé à la salariée une somme de 1.500 € à titre de dommages et intérêts pour absence d'organisation des élections professionnelles.
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Maître Florent LABRUGERE

Avocat au Barreau de LYON

https://www.labrugere-avocat-lyon.fr/


N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.