A moins de deux mois des Jeux Olympiques et Paralympiques, la question du télétravail s’imposent dans de nombreuses entreprises de la capitale. Les déplacements à Paris et en région parisienne s’avérant, particulièrement difficiles face à l’afflux de visiteurs, une grande partie des salariés sollicitent leur employeur afin de mettre en place un dispositif de télétravail. Le télétravail se présente comme une solution avantageuse tant pour les salariés que pour les employeurs, qui n’auront pas à traiter de conflits relatifs à des retards excessifs. Depuis la pandémie de la Covid-19, le télétravail s’est grandement démocratisé dans les entreprises. 

Face à la multiplication du recours au télétravail, Maitre Johan Zenou expert en droit du travail vous informe sur vos droits en cas de mise en place du télétravail (I), dans un second temps les éléments d'accord d'entreprise et la charte (II) et enfin si l'employeur refuse de mettre en place le télétravail à ses salariés (III). 

 

I. La mise en place du télétravail 

Le Code du travail définit le télétravail comme étant « toute forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l'employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux »

Le télétravail peut, ainsi, être mis en place pour toutes les activités ne requérant pas nécessairement la présence des salariés sur le lieu de travail. Sont, dès lors exclus de la possibilité de se réaliser en télétravail, tous les travaux nécessitant une intervention physique, comme la réparation, l’entretien des surfaces, l’installation d’appareils chez un client… 

Le télétravail peut être mis en place dans l’entreprise par le biais de deux 3 outils différents : 

D’abord, le télétravail peut être décidé par la conclusion d’un accord collectif, négocié par les syndicats représentatifs de l’entreprise. Si l’entreprise ne compte pas de syndicats représentatifs, une convention collective étendue (qui s’applique à l’ensemble du secteur d’activité), négociée par des syndicats représentatifs au niveau de la branche, peut prévoir la mise en place du télétravail.

En sus de l’accord collectif, la mise en place du télétravail peut être le fruit d’une charte élaborée par l’employeur et validée par le conseil social et économique (CSE) de l’entreprise. Cette charte sera alors exclusivement rédigée par l’employeur mais ce dernier devra, toutefois, justifier de l’aval du CSE pour l’appliquer dans l’entreprise.

Enfin, en tout état de cause, l’employeur peut convenir, individuellement avec les salariés, de recourir au télétravail. Cet accord peut être formalisé par tout moyen. Il peut donc prendre la forme d’un écrit ou d’un oral. Néanmoins, il est fortement déconseillé de recourir à un accord oral, puisque la force probatoire de ce dernier sera éminemment plus faible qu’un écrit. La difficulté de la preuve orale est également particulièrement complexe contrairement à l’écrit. L’accord national interprofessionnel du 26 novembre 2020 recommande, d’ailleurs, de formaliser les accords du télétravail par un écrit (ANI, 26 nov. 2020, art. 2.3.2).

Ainsi, la mise en place du télétravail n’est jamais obligatoire puisque le législateur laisse le soin aux représentants des salariés, ou, à défaut, aux salariés eux-mêmes, de s’accorder sur la possibilité de recourir au télétravail.

II. Quels éléments l’accord d’entreprise et la charte doivent-il contenir ? 

 

Si le Code du travail donne compétence exclusive aux employeurs et aux salariés pour décider de recourir au télétravail, il prévoit, toutefois, que l’accord collectif ou la charte élaborée par l’employeur doit contenir un certain nombre d’éléments déterminés, à peine d’inapplicabilité de l’accord ou de la charte. 

L’article L.1222-9 du Code du travail dispose, ainsi, que l’accord collectif et la charte élaborée par l’employeur doit préciser : 

 

  • Les conditions de passage en télétravail et les conditions de retour à une exécution du contrat de travail sans télétravail.
  • Les modalités d'acceptation par le salarié des conditions de mise en œuvre du télétravail.
  • Les modalités de contrôle du temps de travail ou de régulation de la charge de travail. 
  • La détermination des plages horaires durant lesquelles l'employeur peut habituellement contacter le salarié en télétravail.
  • Les modalités d'accès des travailleurs handicapés à une organisation en télétravail.

 

La liste dressée n’est toutefois pas limitative, c’est-à-dire que les parties peuvent tout-à-fait ajouter toutes les clauses qu’ils jugent utiles à l’organisation du télétravail dans l’entreprise. Par exemple, les parties peuvent convenir d’insérer dans l’accord une clause relative aux modalités de la mise à disposition du matériel de travail par l’employeur, ou même une clause limitant les lieux où le salarié est autorisé à travailler en télétravail (au domicile du salarié, espace de coworking…). 

L’accord doit également contenir les mentions obligatoires communes à tous les accords collectifs. Il s’agit là d’un préambule, de l’indication du champ d’application de l’accord, de sa durée, des modalités de renouvellement et de révision de l’accord ainsi que des règles relatives à la dénonciation de l’accord. Il convient également de préciser que les mentions requises de l’article L.1222-9 ne concernent que l’accord collectif et la charte établie par l’employeur, et non-pas l’accord individuel avec le salarié.   

 

III. L’employeur peut-il refuser de mettre en place le télétravail ? 

 

Comme vu précédemment, la mise en place du télétravail résulte d’un accord, qu’il soit avec les représentants syndicaux, les représentants du personnel ou avec le salarié lui-même. L’accord étant, par essence, bilatéral, l’employeur doit à l’évidence accepter la mise en place du télétravail. 

Ainsi, l’employeur peut tout à fait refuser le télétravail. Ce refus peut advenir dans plusieurs cas de figure. Le premier survient dans le cadre de la négociation d’un accord collectif. Ici, il va sans dire que si l’employeur refuse de donner son consentement au recours au télétravail, un accord collectif ne pourra être conclu. 

Aussi, dans le cas d’une demande individuelle de télétravail formée par un salarié, l’employeur peut refuser le télétravail. Toutefois, si le poste est éligible au télétravail, l’employeur devra impérativement motiver sa décision de refus. Dans le cas contraire, si le poste ne peut être exercé en télétravail, lorsqu’il ne satisfait pas aux conditions déterminées par l’accord ou par la charte, l’employeur peut refuser discrétionnairement, sans nécessité de se justifier, la demande de télétravail.

Dès lors, l’employeur peut effectivement refuser le recours au télétravail. Il devra, néanmoins, motiver, ou non, son refus en fonction de la possibilité logistique de mettre en place le télétravail.

En outre, le législateur a permis à l’employeur d’imposer, en cas de circonstances exceptionnelles, le télétravail aux salariés. Le cas de la circonstance exceptionnelle a notamment été mobilisé pendant la pandémie du Covid-19. Une circonstance exceptionnelle peut également correspondre à une catastrophe naturelle, à la destruction des locaux, etc.

L’article L.1222-11 du Code du travail prévoit que l’employeur peut, également, imposer le télétravail en cas de force majeure. Le cas de force majeure correspond à un évènement imprévisible (qui ne peut être préalablement prévu), irrésistible (qui ne peut être surmonté) et extérieure à la volonté des parties. 

 

3.1 Le salarié peut-il refuser le télétravail ?

En cas de circonstances exceptionnelles ou de force majeure, le télétravail décidé par l’employeur s’impose aux salariés et ces derniers ne peuvent pas le refuser. Ainsi, en cas de refus par le salarié, l’employeur pourra entreprendre des sanctions disciplinaires (avertissement, mise à pied…). En dehors de ces deux cas, le salarié peut refuser le télétravail et son refus ne peut être un motif de rupture du contrat de travail. 

 

3.2 Quels sont les droits des salariés en télétravail ?

L’article L.1222-9 du Code du travail précise d’abord que le télétravailleur a les mêmes droits que le salarié qui exécute son travail dans les locaux de l’entreprise. Ces droits correspondent notamment au droit à la formation, à l’accès aux activités et avantages sociaux de l’entreprise (chèques vacances, titres-restaurants…) et droit au respect de la vie privée et familiale. 

C’est notamment ce dernier droit du salarié qui sert de fondement au droit à la déconnexion. Le droit à la déconnexion a pour objectif de permettre au salarié, lorsqu’il n’est plus sur son lieu et temps de travail, de s’émanciper totalement de son travail. Ce droit suppose, par exemple, la possibilité pour le salarié de ne pas répondre aux mails ou appels de l’employeur.  

Aussi, si le salarié télétravailleur n’est pas dans les locaux de l’entreprise, il continue de bénéficier du régime des accidents de travail et des maladies professionnelles de la sécurité sociale (AT/MP). Dès lors, un accident qui se produit, par exemple, au domicile du télétravailleur sera, quand même interprété en un accident du travail et le salarié pourra bénéficier des mêmes indemnités auxquels, il aurait droit si l’accident de travail s’était produit dans les locaux de l’entreprise. 

 

3.3 Quelles obligations incombent aux télétravailleurs ? 

Lorsque le salarié est en télétravail, il doit impérativement se soumettre aux modalités du télétravail définies par l’accord collectif, par la charte établie par l’employeur ou par l’accord avec l’employeur. Le salarié doit également respecter les horaires de travail définis par l’employeur, et les conditions d’utilisation de l’équipement mis à sa disposition. Par exemple, le salarié et l’employeur peuvent avoir convenu que le salarié ne pourra utiliser un ordinateur mis à sa disposition que dans le cadre de son travail. L’ordinateur reste ainsi la propriété de l’entreprise et ne peut faire l’objet de prêt ou être utilisé en dehors du lieu et des temps de travail définis par l’accord.

Parallèlement, un salarié en télétravail reste sujet aux obligations habituelles qui s’attachent à son statut de salarié. Il lui incombe donc de respecter les ordres et les directives dictés par l’employeur.

A cet effet, en vertu de son pouvoir de contrôle, l’employeur peut inspecter l’exécution des missions de travail du salarié, même si le travail est effectué à distance. Dans le cas du télétravail, ce pouvoir d’exécution se traduit, notamment, par un contrôle de l’avancée et des résultats du travail réalisé. 

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