Par 3 décisions du 13 septembre 2023, la Cour de cassation décide (enfin) que les salariés en arrêt maladie d'origine non professionnelle ont droit à l'acquisition des congés payés, et ce n'est pas tout !

Un apport majeur de jurisprudence vient d'intervenir par 3 arrêts de la Cour de cassation de septembre 2023, avec pour objectifs de mettre en conformité le droit français avec les règles européennes sur les congés payés et d'assurer une meilleure effectivité de ce droit.

 

1) La première décision est celle qui impactera assurément le plus grand nombre de salariés tant la situation est fréquente en pratique :

 

Avant cette décision : un salarié en arrêt de travail pour une maladie non professionnelle ne cumulait pas de jours de congés payés pendant le temps de son arrêt de travail. Le droit à congé payé était donc suspendu.

 

Cette règle était depuis fort longtemps en opposition avec le droit européen, notamment la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, qui pose le principe du "droit au repos" : Lorsque le salarié ne peut pas travailler en raison de son état de santé, situation indépendante de sa volonté, son absence ne doit pas avoir d’impact sur le calcul de ses droits à congé payé.

Cette situation pouvait également être vue comme une discrimination entre les salariés actifs et les salariés malades.

 

Avec cette décision, la Cour de cassation affirme que le droit français, non conforme aux dispositions européennes et au principe de non-discrimination, doit être écarté.

 

Cela signifie en pratique que tous les salariés atteints d’une maladie ou victimes d’un accident, de quelque nature que ce soit (professionnelle ou non professionnelle) ont le droit de réclamer des droits à congé payé pendant la période au cours de laquelle ils n’ont pas pu travailler.

 

S'agissant de l'application de cette nouvelle jurisprudence, il faut à mon sens considérer qu'elle est immédiatement applicable aux arrêts de travail en cours et au litiges en cours.

Pour ce qui est du passé, rien n'est certain et ce sont les juges des conseils de prud'hommes et des Cours d'appel qui auront à se prononcer. Mais il est évidemment important de formuler une demande à ce titre lorsque le litige s'y prête, et du point de vue des employeurs, d'être prêts à s'y opposer.

 

2) deuxième apport s'agissant des salariés en arrêt pour accident du travail :

 

Un autre arrêt rendu le même jour par la Cour de cassation vient mettre un terme à la contradiction entre le droit de l’Union européenne qui prévoit qu'un salarié victime d’un accident de travail peut bénéficier d’un droit à congé payé couvrant l’intégralité de son arrêt de travail et le droit français, selon lequel l’indemnité compensatrice de congé payé est limitée à une seule année de suspension du contrat de travail.

 

Une nouvelle règle claire est posée : En cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle, l’indemnité compensatrice de congé payé ne peut plus être limitée à un an et doit couvrir toutes la période d'arrêt.

 

3) troisième arrêt important sur le point de départ de la prescription :

 

La Cour de cassation juge que le délai de prescription de l’indemnité de congé payé ne peut commencer à courir que si l’employeur a pris les mesures nécessaires pour permettre au salarié d’exercer effectivement son droit à congé payé.

 

En effet, la Cour estime qu'il appartient à l'employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à congé, et, en cas de contestation, de justifier qu'il a accompli les diligences qui lui incombaient légalement.

 

Ce n'est donc que si l'employeur qui invoque la prescription dans un dossier démontre qu'il a mis en mesure son salarié d'exercer son droit, que ce délai de prescription (de 3 ans) commencera à courir.

 

Il faut bien comprendre qu'avec ces 3 arrêts, la Cour de cassation fait preuve d'une certaine audace car ces nouvelles interprétations sont en rupture avec les pratiques actuelles des services de ressources humaines.

Les dispositions des conventions collectives devront sans doute être modifiées.

De plus, le coût économique de ces nouvelles règles pour les entreprises n'est pas neutre, les congés payés représentant environ 10% du salaire brut.

Enfin, certains litiges en cours seront nécessairement impactés.

 

La nouvelle position de la Cour de cassation est si lourde de conséquences pour les acteurs économiques que l'administration vient déjà d'actualiser son site service-public.fr

 

Vous trouverez ci-joint les 3 arrêts évoqués et le communiqué de la Cour de cassation.

 

Le cabinet se tient naturellement disponible pour vous conseiller sur la mise en oeuvre effective de ces nouvelles règles...révolutionnaires.