Le 3 décembre 2022

 

- Le droit absolu de l’enfant d’être entendu par le Juge :

L’enfant mineur a le droit absolu d’être entendu par le Juge dans toutes les procédures le concernant qu’il s’agisse de la procédure contentieuse de divorce de ses parents, de la procédure consécutive à la séparation de ses parents non mariés (concubinage, PACS).

Et même dans le cas où les époux décident de divorcer de manière amiable sans Juge, ils doivent impérativement informer leur enfant de son droit à être entendu par un Juge conformément à l’article 229-2 du code civil et dans l’hypothèse où l’enfant exprime le souhait d’être entendu, les époux doivent alors passer par la procédure de divorce judiciaire par consentement mutuel.

Ce droit est érigé par l’article 388-1 du code civil qui dispose que :

Dans toute procédure le concernant, le mineur capable de discernement peut, sans préjudice des dispositions prévoyant son intervention ou son consentement, être entendu par le juge ou, lorsque son intérêt le commande, par la personne désignée par le juge à cet effet.

Cette audition est de droit lorsque le mineur en fait la demande. Lorsque le mineur refuse d'être entendu, le juge apprécie le bien-fondé de ce refus. Il peut être entendu seul, avec un avocat ou une personne de son choix. Si ce choix n'apparaît pas conforme à l'intérêt du mineur, le juge peut procéder à la désignation d'une autre personne.

L'audition du mineur ne lui confère pas la qualité de partie à la procédure.

Le juge s'assure que le mineur a été informé de son droit à être entendu et à être assisté par un avocat.

 

- Qui peut demander l’audition de l’enfant :

La demande d’audition peut être formée par :

- l’enfant

- les parents

- Le Juge (qui peut l’ordonner de lui-même)

Si la demande provient de l’enfant, le Juge ne peut pas refuser de l’entendre sauf s’il estime que l’enfant n’a pas la capacité de discernement ou s’il n’est pas concerné par la procédure.

Si la demande provient des parents, le Juge peut refuser d’entendre l’enfant s’il ne l’estime pas nécessaire ou si l’audition lui apparaît comme contraire à l’intérêt de l’enfant en vertu de l’article 338-4 du Code de procédure civile qui dispose que :

Lorsque la demande est formée par le mineur, le refus d'audition ne peut être fondé que sur son absence de discernement ou sur le fait que la procédure ne le concerne pas.

Lorsque la demande est formée par les parties, l'audition peut également être refusée si le juge ne l'estime pas nécessaire à la solution du litige ou si elle lui paraît contraire à l'intérêt de l'enfant mineur.

Le mineur et les parties sont avisés du refus par tout moyen. Dans tous les cas, les motifs du refus sont mentionnés dans la décision au fond.

 

- L’audition de l’enfant :

L’enfant est entendu seul ou avec un Avocat ou une personne de son choix. Mais le Juge peut désigner une autre personne s’il considère que la personne choisie par l’enfant n’apparaît pas conforme à son intérêt.

L'enfant est entendu soit par le Juge en personne, soit par une personne désignée par le Juge, cette personne ne devant entretenir aucun lien avec l'enfant ou avec une des parties et devant exercer ou avoir exercé une activité dans le domaine social, psychologique ou médico-psychologique.

 

- Vérification par le Juge de l’information donnée à l’enfant de son droit d’être entendu :

Le Juge doit vérifier que l’enfant a bien été informé par ses parents de son droit à être entendu.

Il le fait normalement dès la première audience d’orientation et de mesures provisoires et beaucoup de Juges aux Affaires familiales demandent le dépôt d’une attestation 388-1 du code civil par laquelle le parent déclare avoir informé son enfant de son droit à être entendu par le Juge ou qu’au vu de son jeune âge, le parent ne l’a pas informé.

 

- L’âge de discernement de l’enfant :

D’après la loi, l’enfant doit être doué de discernement pour être entendu mais il n’y a pas de définition légale de la notion de discernement ni d’âge légal de discernement.

Les Juges déterminent la capacité de discernement de l’enfant d’après un certain nombre de critères qui sont :

- l’âge de l’enfant

- le niveau intellectuel

- l’expression verbale de l’enfant

- la maturité affective de l’enfant.

Il ressort de l’étude des décisions des Juges aux Affaires familiales qu’aucun Juge n’aurait entendu un enfant de moins de 7 ans.

En général, les enfants de + de 13 ans sont toujours entendus lorsqu’ils en font la demande (13 ans était l’âge de discernement défini par la loi avant sa suppression en 1993).

Entre ces deux âges, 7 ans et 13 ans, l’on pourrait dégager une tendance des Juges à ne pas entendre les enfants avant leur entrée au collège, soit avant 10 ou 11 ans. Mais attention, il ne s’agit pas d’une règle ou d’une position systématique des Juges.

Car nous ne sommes jamais à l'abri d'un miracle ! Et qui sait ce que la Vie peut faire pour nous lorsque nous sommes vraiment déterminés à obtenir quelque chose quelque soit notre âge ! ...

 

- La forme de la demande :

L’enfant formule sa demande d’être entendu sur papier libre qu’il envoie par voie postale à l’adresse du Juge aux Affaires familiales concerné qui lui sera donnée par son parent.

L’enfant doit écrire lui-même la lettre (et non pas ses parents)

Les Juges ne veulent pas majoritairement que la demande de l’enfant passe par les Avocats via le RPVA.

L’enfant est ensuite convoqué par le Greffe par lettre simple.

La demande d’audition peut être formulée à tout moment de la procédure et même après la clôture.

 

- Le compte-rendu de l’audition de l’enfant :

En vertu de l’article 338-12 du Code de procédure civile, il est fait un compte-rendu de cette audition par le Juge ou la personne qui a entendu l’enfant et qui est soumis au respect du contradictoire.

La Loi ne fixe pas de forme particulière pour ce compte-rendu qui peut être écrit ou verbal dans le respect de l’intérêt de l’enfant.

Il n'est pas fait une restitution littérale des propos de l’enfant. Il ne s’agit pas d’un procès-verbal d’audition.

La personne qui a entendu l’enfant n’est pas tenue de rapporter en intégralité les paroles de l’enfant. Il peut s’agir d’une synthèse qui résume les sentiments exprimés par l’enfant.

 

- Quelle est l’importance de l’avis de l’enfant ? :

L’avis de l’enfant est l’un de critères d’appréciation du Juge pour prendre ses décisions relatives à l’exercice de l’autorité parentale par application de l’article 373-2-11 du code civil qui dispose que :

Lorsqu'il se prononce sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale, le juge prend notamment en considération :

1° La pratique que les parents avaient précédemment suivie ou les accords qu'ils avaient pu antérieurement conclure ;

2° Les sentiments exprimés par l'enfant mineur dans les conditions prévues à l'article 388-1 ;

3° L'aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et respecter les droits de l'autre ;

4° Le résultat des expertises éventuellement effectuées, tenant compte notamment de l'âge de l'enfant ;

5° Les renseignements qui ont été recueillis dans les éventuelles enquêtes et contre-enquêtes sociales prévues à l'article 373-2-12 ;

6° Les pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l'un des parents sur la personne de l'autre.

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