Bien que Tik Tok fasse fureur, le gouvernement somalien, entre autres, a interdit Tik Tok en 2023, au risque d’y voir des propagandes terroristes, notamment par le mouvement Chabab, affilié à Al Qaida.

La France est loin d’imiter pour l’instant la Somalie, mais songe à une meilleure réglementation de la plateforme.

Qu’est-ce que Tik Tok ?

La célèbre application Tik Tok est un réseau social initié en 2016, présentant divers contenus comme la cuisine, la mode ou encore la musique. Elle comporte près de 15 millions d’utilisateurs en France, dont 7 millions qui s’y rendent quotidiennement. Parmi eux, 23,6 % sont des jeunes de 13 à 24 ans. Ce réseau social est consulté en moyenne 95 minutes par utilisateur par jour. Afin d’inciter le visionnage de vidéos, la plateforme utilise un algorithme permettant de cibler les centres d’intérêts du visionnant. Celui-ci se fonde sur des indices comme le type de contenu aimé ou partagé, le temps passé sur chaque vidéo, celui marqué comme « pas intéressé » ou signalé.

C’est d’ailleurs ce que dénonce le collectif « Algos victima » dans son action en justice contre l’application. En effet, des vidéos d’automutilation visionnées notamment par des enfants auraient conduit deux adolescentes à se suicider.

La diffusion d’un certain type de contenu peut donc être dangereuse. Se pose alors la question d’interroger sur le grand manque de protection des jeunes par la diffusion d’un contenu quasi-illimitée (I). Il semble aussi crucial que la plateforme soit nécessairement responsable (II), sanctionnée, et qu’il soit trouvé des solutions plus efficaces pour l’avenir.

I. Le manque de protection considérable des jeunes par la diffusion d’un contenu quasi-illimité

Il semblerait que les enfants aient accès à presque tout type de contenu sur les réseaux sociaux. Des inquiétudes se font ressentir quant à la santé mentale des jeunes utilisateurs des réseaux. Un rapport intitulé « Poussé·e·s vers les ténèbres, Comment le fil « Pour toi » encourage l’automutilation et les idées suicidaires » d’Amnesty International présente la façon dont l’application propose un contenu banalisant certaines pratiques. « Tik Tok risque ainsi d’exposer des jeunes présentant des symptômes dépressifs à un fil constitué d’une quantité importante de publications qui évoquent, banalisent voire idéalisent les pensées dépressives, l’automutilation et le suicide sur les réseaux sociaux ».

Bien qu’il soit ici question de virtualité, les conséquences de ces visionnements sont dévastatrices dans la vie réelle. Le collectif « Algos victima » va jusqu’à considérer la plateforme responsable de deux suicides d’adolescentes.

Il est difficile de prouver un lien de causalité certain entre de tels actes et la plateforme, mais une étude d’Amnesty International relève qu’après avoir manuellement recherché une vidéo sur la santé mentale, les autres contenus proposés concerneront en grande majorité le même sujet. Plus une vidéo est parlante pour son visionnant, plus le réseau social initie une spirale addictive, impactant la personne dans sa vie réelle.

« Entre trois et 20 minutes après le début de l’étude manuelle, plus de la moitié des vidéos du fil « Pour toi » étaient en rapport avec les problèmes de santé mentale, et de nombreuses vidéos recommandées en l’espace d’une heure seulement idéalisaient, banalisaient voire encourageaient le suicide ».

L’administrateur de la santé publique des Etats-unis établit quant à lui un lien de causalité entre l’addiction des utilisateurs pour cette plateforme, et les problèmes de sommeil ou trouble de l’attention subis par les jeunes.

jusqu’à entraîner une modification du système nerveux, encore en formation chez l’enfant. En effet, elle suractive le système de récompense, qui troublerait la concentration. Les notifications altèrent par exemple l’attention des jeunes, qui s’interrompent plus facilement dans leurs tâches. Il est alors plus difficile pour eux de se remettre à leurs occupations, sans être un minimum déconcentrés.

Par quels moyens la plateforme parvient-elle à troubler la santé mentale des jeunes ?

Les réseaux sociaux comme Tik Tok utilisent les données de leurs utilisateurs pour les fidéliser. En regardant des vidéos intéressantes pour eux, l’application proposera davantage de contenus similaires, dans l’objectif d’accroître l’utilisation de leurs applications.

Cependant, cela semble porter de sérieuses interrogations quant au respect du droit à la vie privée. Ce droit permet aux personnes de ne subir aucune immixtion dans leurs vies privées. La plateforme Tik Tok n’aurait donc pas le droit de collecter les données personnelles de ses utilisateurs selon le droit international relatif aux droits humains, à moins que cet agissement ne soit ni arbitraire, ni illégal.

« Le simple fait de produire ou de collecter des données relatives à l’identité, à la famille ou à la vie privée d’une personne porte déjà atteinte au droit à la vie privée, car de tels actes ont pour effet de faire perdre à la personne concernée une part du contrôle qu’elle exerce sur des informations qui pourraient constituer un risque pour sa vie privée ». Les agissements de la plateforme ne sont donc pas illimités.


II. La nécessaire responsabilité de la plateforme, entre sanctions et solutions

Il est tristement très fréquent que les réseaux sociaux provoquent par une simple publication un déferlement de commentaires haineux. Magali Berdah a en ce sens récemment déposé plainte contre la plateforme X pour complicité de cyber harcèlement.

Les plateformes ont en effet une responsabilité, notamment lorsque le contenu présente des propos diffamatoires, faisant l’apologie de terrorisme...

En vertu de la loi 2004-575 pour la confiance dans l’économie numérique, il est donc de la responsabilité des hébergeurs d’identifier les auteurs des faits, et de mettre en place des mécanismes de signalements lorsque le contenu parait illégal.

Les hébergeurs sont définis par l’article 6-I-2 de la LCEN comme « des personnes physiques ou morales qui assurent, même à titre gratuit, pour mise à disposition du public par des services de communication au public en ligne, le stockage de signaux, d’écrits, d’images, de sons ou de messages de toute nature fournis par des destinataires de ces services ».

Suite aux signalements, les hébergeurs ont l’obligation de :

  • Prévenir les autorités compétente
  • Retirer ou bloquer l’accès au contenu illégal

Il existe cependant une exception lorsque l’hébergeur est un intermédiaire passif stockant et transmettant uniquement des informations fournies par les utilisateurs, sans en changer le contenu. C’est l’argument que Tik Tok utilise pour se dédouaner de toute responsabilité, lorsque les contenus présentés ne sont pas illicites ou frauduleux mais tout de même dangereux. Le collectif « Algos Victima » souhaite cependant reconnaître la responsabilité juridique des plateformes numériques lorsqu’elles permettent la diffusion de tels contenus pour les plus sensibles.

Le Sénat va donc proposer de considérer la plateforme Tik Tok comme éditeur afin que la société soit juridiquement responsable de l’ensemble des contenus postés sur la plateforme. La plateforme sera aussi soumise à d’autres sanctions si elle ne se conforme pas au droit de la propriété intellectuelle. La plateforme Tik Tok avait par exemple autrefois la fâcheuse habitude de proposer des contenus utilisant des musiques, notamment d’artistes mondialement connus comme Rihanna ou Lana Del Ray. Bien qu’il permettait à ces musiques de devenir virales, avait-il le droit de les faire circuler ?

Il est vrai que l’application peut donner une réelle impulsion aux artistes, surtout indépendants. Mais depuis peu, la plateforme n’autorise plus certains contenus. Des labels comme Universal Music Group refusent d’accorder à Tik Tok une licence lui permettant d’utiliser la musique de leurs artistes.

Aujourd’hui, l’application est donc limité dans le contenu qu’elle propose. Des solutions sont envisagées pour aller plus loin dans les limitations. L’objectif serait par exemple de poursuivre au niveau de l’Union européenne la mise en place d’une protection des données personnelles, notamment des mineurs, et d’éviter les déductions quant aux intérêts, à l’état émotionnel ou au bien-être de ces derniers par leur visionnement.

Il serait aussi judicieux que les États empêchent les entreprises de conditionner l’accès à leurs services par la collecte de données personnelles, à des fins de ciblage de publicité notamment. Si vous êtes victimes d’atteinte causée par un contenu illégal en ligne sur les réseaux sociaux ou autres plateformes, le Cabinet de Maître Zenou, pénaliste dans le XX ème arrondissement se met à votre disposition pour tout conseil et procédure pénale.