Points d’attention/pièges en contentieux immobilier et de la construction

Intervenants à la procédure

  • Vérifier (i) l’absence de procédures collectives affectant les intervenants (constructeurs, assureurs, etc.) et, si disponibles, (ii) les comptes déposés sur infogreffe/pappers
  • Vérifier la présence des assurances (dommage ouvrage, décennale, etc.) et les viser dans l’assignation avec précision de la police d’assurance souscrite

Avant l’expertise judiciaire

  • S’assurer de la déclaration du sinistre auprès des assurances
  • Solliciter une expertise amiable s’agissant de l’assurance dommage-ouvrage sous peine d’irrecevabilité de la demande d’expertise à l’égard de l’assureur dommage-ouvrage 
  • Conseiller de ne pas diligenter des travaux de reprises car les constatations de l’expertise ne pourraient plus avoir lieu
  • Se prononcer sur l’opportunité d’une saisie conservatoire (notamment en l’absence d’assurances, pour s’assurer de ce qu’en cas de condamnation, celle-ci pourra être recouvrée) 
  • Vérifier les délais pour assigner et juger de l’opportunité d’assigner au fond concomitamment (pour des questions tenant aux délais de prescription/forclusion)

Expertise  

  • Formuler précisément la mission d’expertise (au sein de l’assignation) et ne pas oublier certaines précisions essentielles (par exemple : l’expert devra communiquer un pré-rapport)
  • Dires : les observations sont primordiales, notamment au titre du pré-rapport d’expertise (exemple : si le dommage est décennal, il doit être explicitement qualifié ainsi dans le rapport de l’expert pour faciliter le travail du juge lors de la procédure au fond)
  • Le juge chargé du contrôle des expertises n’est plus compétent dès remise du rapport d’expert (il s’agit d’une compétence du juge du fond)

Clause de saisine du conseil de l’ordre des architectes

  • L’existence d’une clause de saisine du conseil de l’ordre des architectes oblige – dans certains cas - le demandeur à saisir cet ordre avant d’engager une action en justice sous peine d’irrecevabilité de la demande (fin de non-recevoir)
  • S’agissant d’une action en responsabilité décennale (article 1792 du Code civil) : la clause de saisine préalable du conseil de l’ordre des architectes s’applique (Troisième chambre civile de la Cour de cassation, 23 mai 1997, n° RG 06-15.668)
  • S’agissant de la responsabilité contractuelle (la responsabilité décennale n’apparait pas ni dans les moyens ni dans le dispositif) :  cette clause ne s’applique pas
  • En référé expertise : cette clause ne s’applique pas
  • Impossibilité de régularisation en cours d’instance : cette fin de non-recevoir n'est pas susceptible d'être régularisée par la mise en œuvre de la clause en cours d'instance (notamment, Troisième chambre civile de la Cour de cassation, 16 novembre 2017, RG n° 16-24.642)

La présence d’une société d’assurance mutuelle

  • Compétence du tribunal judiciaire et jamais du tribunal de commerce. L’article L. 322-26-1 du Code des assurances dispose en effet que « Les sociétés d'assurance mutuelles sont des personnes morales de droit privé ayant un objet non commercial (…) » et la jurisprudence est constante en la matière : le tribunal de commerce sera incompétent

Publicité des actes

  • En droit immobilier, certains actes (assignation, jugement, etc.) doivent être publiés sous peine de fin de non-recevoir (la demande est irrecevable)
  • Il conviendra de retirer un certificat hypothécaire de l’immeuble avant de faire signifier les actes (même si l’on est déjà en possession des informations relatives à l’immeuble : celles-ci peuvent avoir changé entre temps)
  • Publicité obligatoire : article 28 du décret du 4 janvier 1955. Cette publicité peut être régularisée en cours d’instance et même en cause d’appel (Troisième chambre civile : 18 novembre 2009, RG n°08-11.893 et 20 Octobre 2010, RG n° 09-16.640)
  • Publicité facultative : article 37 du décret du 4 janvier 1955

Pouvoir d’assigner

  • Dans certains cas (indivision, copropriétaires, syndic, société, etc.), l’accord d’une autre personne/entité pourra être nécessaire

Forclusion/prescription

  • Garantie décennale : 10 ans (à compter de la réception des travaux)
  • Garantie biennale : 2 ans (à compter de la réception des travaux)
  • Garantie de parfait achèvement : 1 an (à compter de la réception des travaux)
  • Garantie des vices cachés (article 1648 code civil) : 2 ans (à compter de la découverte du vice)
  • Article 1662 du Code civil : « L'action en supplément de prix de la part du vendeur, et celle en diminution de prix ou en résiliation du contrat de la part de l'acquéreur, doivent être intentées dans l'année, à compter du jour du contrat, à peine de déchéance. »
  • Article 2239 du Code civil : suspension de la prescription d’une durée de 6 mois à compter de l’expertise (cela seulement à l’égard du demandeur à la mesure d’expertise)

Cela n’a d’effet qu’à l’égard des délais de prescription et non pas de forclusion (Troisième chambre civile de la Cour de cassation, 3 juin 2015, RG n° 14-15.796)

  • Il sera opportun d’assigner au fond lorsque les délais de prescriptions sont proches pour sécuriser la procédure (dans ce cas, attention à la péremption d’instance)