Un GFA conclut un bail rural d'une durée de 9 ans au profit d'un exploitant agricole. Par requête adressée au tribunal paritaire des baux ruraux, le bailleur sollicite la résiliation du bail pour défaut de paiement du fermage, mais également pour défaut d'exploitation personnelle par le preneur des terres louées.

A l'audience de conciliation et après avoir réglé les arriérés de fermage, le fermier reconnaît que, pour des raisons financières, il occupe un emploi de mécanicien (à temps partiel), qu'il ne dispose plus de cheptel lui appartenant et qu'il recours à une entreprise de travaux agricoles (ETA) pour assurer la mise en valeur effective des parcelles.

Plus précisément, il a conclu avec une ETA un contrat de prestations de services dont l'objet est d'effectuer, à la fois, le travail du sol, le semis de culture, le traitement phytosanitaire, la fumure, la récolte et la livraison des productions, ainsi que la fauche des prairies, c'est-à-dire finalement toute la chaîne des opérations de culture. Et ce pour l'ensemble des parcelles louées. En outre, le contrat de prestations est conclu pour une période de ... 12 ans. Enfin, la société prestataire de services a également mis en pension du cheptel bovin sur l'exploitation du preneur (lequel avait vendu son propre cheptel).

Le tribunal prononce la résiliation du bail pour défaut d'exploitation personnelle.

En cause d'appel, le preneur soutient qu'il est resté affilié à la MSA en qualité d'exploitant pour ces terres, qu'il a continué à régler, à ce titre, les cotisations et contributions sociales, qu'il a effectué les déclarations au titre de la PAC et qu'il bénéficiait toujours de la certification BIO.

Rien n'y fait, la cour confirme la décision de première instance, considérant que, si le preneur a conservé la direction de l'exploitation agricole, il apparaît qu'il n'a pas conservé la maîtrise et la disposition des parcelles louées, ce qui contrevient aux dispositions de l'article L 411-35 du Code rural et de la pêche maritime (lequel prohibe la cession et la sous-location) et ce d'autant que le locataire ne démontre pas que son activité extérieure (en tant que salarié) serait compatible avec l'exploitation des terres louées.

La Cour de cassation rejette le pourvoi formé par le preneur en reprenant intégralement la motivation de la cour d'appel (Cass. 3° civ., 25 avril 2024, n° 22-19.931).

On peut remarquer qu'une cour d'appel avait déjà sanctionné, par le passé, par la résiliation du bail, le défaut d'exploitation personnelle du preneur, également au visa de l'article L 411-35 (CA Caen, 4 sept. 2009, n° 08/01529 : RDrur. mai 2010, comm. 60).

Le recours à l'article L 411-35 évite d'avoir à démontrer que les agissements du preneur sont de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds visés par l'article L 411-31 I 2°. En l'espèce, cette "bonne exploitation" n'était pas compromise : les terres étaient, apparemment, correctement travaillées quand bien même elles l'étaient par une personne autre que le preneur.

Cette décision amène également à s'interroger sur la définition de l'exploitant : est-ce celui qui met en valeur personnellement et directement l'exploitation ou est-ce celui qui dirige l'exploitation "depuis son bureau" ? Au regard du Statut du fermage, c'est la première solution qui est ainsi retenue.