Indre et Loire
Tribunal Correctionnel
La relaxe pour usurpation d'identité
Le Tribunal Correctionnel a infligé une sorte de camouflet au ministère public en relaxant de toutes les préventions un réfugié politique à qui l'on reprochait une usurpation d'identité et divers délits en résultant. Entré en France en 1997, Kémal avait demandé l'asile politique sous une fausse identité et avec des papiers falsifiés : avec son vrai nom, mais avec le prénom d'un cousin, Abdulah.
D'origine kurde et de nationalité turque, il avait fait une demande d'asile politique à l'Ofpra qu'il a obtenue au vu des persécutions subies. Et les papiers délivrés l'ont été sous l'identité d'Abdulah K. Toutes les démarches effectuées ensuite par l'intéressé l'ont été sur la base de cette identité : travail, mariage, demandes d'allocations diverses.
Raison sur toute la ligne.
Mais, en 2010, l'Etat français découvre la vérité : Abdulah s'appelle en réalité Kémal. Et Kémal se retrouve sans papiers, dans l'impossibilité de travailler et, surtout, prévenu devant le Tribunal Correctionnel pour de nombreux délits : prise du nom d'un tiers, entrée ou séjour irrégulier, fraude pour l'obtention de prestations ou d'allocations indues...La CPAM lui réclamait en effet 817 € de prestations maladie, la CAF 5.845 € versés pour ses enfants, sans compter le RMI/RSA. La CAF avait même commencé à retenir la somme sur les prestations actuellement versées, sans attendre le jugement au fond.
Pour sa défense, son avocat, Me MOYSAN, a fait remarquer que le délit d'usurpation d'identité était prescrit depuis 1997 ; que cette usurpation n'avait pour but que de lui permettre de sortir de la Turquie ; que les persécutions ayant justifié l'octroi du statut de réfugié politique n'étaient pas contestées ; qu'il était difficile voire quasi impossible ensuite de rectifier les choses ; qu'enfin, toutes les prestations obtenues étaient justifiées par la situation du prévenu : avec son identité réelle, il y aurait eu droit parce qu'il travaillait et cotisait, parce qu'il avait trois enfants.
Le Tribunal lui a donné raison sur toute la ligne : relaxe pour prescription ou pour absence d'intention frauduleuse. Les parties civiles (CPAM et CAF) sont par le fait déboutées. On ne sait si le ministère public va faire appel.
François BLUTEAU
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