Vous avez obtenu un jugement ayant fixé une pension alimentaire pour un enfant, une pension au titre du devoir de secours ou une prestation compensatoire. Le débiteur qui ne réside pas dans le même Etat que vous, ne daigne exécuter spontanément la décision, vous devez donc avoir recours à une exécution forcée. Vous vous demandez comment faire.
I. RECOUVREMENT DE CREANCES ALIMENTAIRES EN EUROPE
A. Execution des décisions en application du Règlement (CE) n° 4/2008 "obligations alimentaires"
a) actions judiciaires introduites à compter du 18 juin 2011
Pour les actions judiciaires introduites à compter du 18 juin 2011 dans des pays liés au protocole de la Haye de 2007 relatif à la loi applicable aux obligations alimentaires, les décisions judiciaires obtenues dans un de ces Etats membres sont directement exécutoires dans un autre Etat-membre sans qu'il soit nécessaire de recourir à aucune procédure d'enregistrement ou de reconnaissance, puisque l'exequatur a été supprimé par le Règlement. Les décisions doivent cependant être accompagnées d'un extrait de la décision, formalités accomplies en France par le directeur de greffe du Tribunal de Grande Instance du lieu de l'exécution (art. 509-1 CPC).
b) décisions émanent de pays non liés au protocole de la Haye de 2007 et actions judiciaires introduites ou décisions datant d' avant le 18 juin 2011
Les décisions émanant de pays non liés au protocole de la Haye de 2007 relatif à la loi applicable aux obligations alimentaires (Royaume-Uni, Irlande, Danemark), celles obtenues ou dont les procédures avaient été commencées avant le 18 juin 2011, doivent au préalable être reconnues (art. 28 Règl). Cependant les décisions françaises sont directement exécutoires dans ces trois Etats.
Les requêtes aux fins de reconnaissance ou de constatation de la force exécutoire, sur le territoire de la République française, des titres exécutoires étrangers, sont présentées au Président du tribunal de grande instance du lieu de l’exécution. (article 509-2 du code de procédure civile).
Le ministère d'avocat n'est pas obligatoire.
Si une décision française doit être exécutée à l’étranger, la reconnaissance de la décision doit être demandée à l'entité compétente dans le pays dans lequel la décision doit être exécutée.
B. Décisions émanant de ou devant être exécutées dans les pays de l'AELE
Faisant partie de l’AELE (l’association européenne de libre-échange) l’Island, la Norvège et la Suisse et les Etats membres de l’Union Européenne.
Une décision alimentaire rendue par une juridiction d’un Etat de l’AELE doit être exequaturée et ce sur le fondement de la Convention de Lugano du 30 octobre 2007 concernant la compétence, la reconnaissance et l’exécution en matière civile et commerciale.
La requête aux fins de constatation de la force exécutoire est présentée en France au directeur de greffe du Tribunal de Grande Instance du domicile de la partie contre laquelle l’exécution est demandée. Si cette partie n’est pas domiciliée en France, la compétence est déterminée par le lieu de l’exécution (article 509-2 al. 1 du code de procédure civile).
La procédure est gracieuse, le ministère de l’avocat n’est pas obligatoire.
C. Décisions rendues dans un Etat ou devant être exécutées dans un Etat qui n’est pas lié à la France par une convention internationale ou bilatérale
Une telle décision doit être reconnue selon les conditions d’exequatur de droit commun, élaborées par la jurisprudence.
Actuellement, trois conditions doivent être remplies : l’affaire doit avoir un rapport de proximité avec la décision et la juridiction ne doit pas avoir été saisie par fraude, la décision doit être conforme à la conception française de l’ordre public international.
La juridiction compétente en France est le Tribunal de Grande Instance du lieu où se trouve le défendeur ou du lieu où la décision doit être exécutée.
La procédure est contradictoire et ne peut donc être conduite que par un avocat inscrit dans un barreau du ressort du Tribunal compétent.
D. Décision rendues par un Etat ou devant être exécutées dans un Etat lié à la France par une convention bilatérale
Les conventions bilatérales signées entre la France et notamment les Etats d’Afrique noire ou les Etats du Maghreb sont nombreuses. Il faut se renseigner au cas par cas sur l’existence d’une telle convention. Nous citons les conventions bilatérales les plus usitées.
- Conventionfranco-algérienne du 27 août 1964
- Conventionfranco-marocaine du 10 août 1981
- Conventionfranco-tunisienne du 18 mars1982
Ces trois conventions bilatérales attribuent compétence au juge du droit commun, savoir au Tribunal de Grande Instance en France.
II. PROCEDURES D'EXECUTION EN FRANCE
En France c'est un huissier de justice qui est compétent pour exécuter les décisions de justice. Il convient à cet effet de lui adresser la copie exécutoire de la décision étrangère, l'extrait de la décision et/ou l'ordonnance d'exequatur ou la déclaration constatant l'exécution en France ainsi que vos coordonnées bancaires. Seul le contenu de l'extrait de la décision doit être traduit par un traducteur assermenté.
1° Procédure de paiement direct
Si le débiteur est salarié et vous connaissez les coordonnées de l’employeur, vous pouvez intenter une procédure de paiement direct dès que la pension alimentaire est restée impayée depuis deux mois. L'employeur du débiteur devra alors vous faire tous les mois un virement sur votre compte bancaire.
2° Saisie sur rémunérations
Les sommes qui ne peuvent être récupérées par la procédure directe, peuvent l'être moyennant une saisie sur rémunération, autorisée par le juge d'instance.
3° Saisie attribution sur comptes bancaires
Si vous ne savez pas si et où le débiteur a un compte bancaire, une recherche FICOBA peut être envisagée. Seul un huissier de justice peut faire cette recherche.
Une fois les références bancaires connues, vous pouvez procéder à une saisie attribution sur le compte bancaire du débiteur.
Les trois procédures décrites ci-dessus, nécessitent l’intervention d’un huissier de justice.
4° Mesures coercitives
Si vous ne pouvez saisir les rémunérations ni les comptes bancaires, il est possible de prendre des mesures coercitives. Il s’agit de porter plainte pour abandon de famille auprès du Procureur de la République.
5° Prescription de la créance
Les délais pendant lesquels une créance alimentaire se prescrit, dépendent de la nationalité de la créance.
Si une juridiction a fixé la pension alimentaire en vertu de la loi française, la créance est une créance française. Si au contraire, la créance a été déterminée en application d’une loi étrangère, la nationalité de la créance alimentaire est fonction de la loi étrangère l’ayant fixée.
La prescription en droit français est de cinq ans. Autrement dit, s’agissant d’une créance à exécution successive, la partie de la créance antérieure à cinq ans, est prescrite.
Pas de contribution, soyez le premier