Un arrêt rendu par la 3ème chambre de la Cour de cassation le 16 mai 2024 (Cass. civ. 3, 16-05-2024, n° 22-19.922, FS-B, Cassation) s’avère fort instructif. Il apporte une solution fort logique concernant la demande en répétition de l’indu d’un locataire à l’égard de son ancien bailleur alors que celui-ci a entre-temps vendu son bien.

Le locataire, la société MAISONS DU MONDE avait donné suite à un commandement de payer émis par son bailleur en réglant les sommes dues, à titre conservatoire.

Le bien, objet du bail avait par la suite été vendu à une autre société. L’acte de vente comprenait une clause selon laquelle l’acquéreur était subrogé dans les droits et obligations du vendeur pour tout contentieux qui se déclarerait à compter du transfert de propriété même si la cause en était directement ou indirectement antérieure.

Le locataire a assigné son ancien bailleur en répétition des sommes versées suite au commandement de payer.

Ledit ancien bailleur a mis dans la cause l’acquéreur se prévalant de la clause précitée.

Son raisonnement consistait à relever que le contentieux de la demande de remboursement apparaissait après la vente soit en l’espèce après le transfert de propriété. Le fait que la cause soit antérieure ne changeait rien à l’application de la clause puisque cette hypothèse y était visée.

La Cour d’appel a suivi le raisonnement, mis hors de cause l’ancien bailleur et rejeté les demandes du locataire.

La Cour de cassation est venue casser cet arrêt sur le fondement de trois articles du Code civil.

Le premier est l’article 1165 qui, dans son ancienne version, disposait que les conventions n’ont d’effet qu’entre les parties et ne nuisent pas aux tiers.

De la sorte, le contrat de bail n’étant conclu qu’entre le locataire et l’ancien bailleur, ne pouvait produire effet, ni ne pouvait nuire à l’acquéreur qui n’y était pas partie.

L’article 1376 du même code, également dans sa rédaction ancienne, prévoyait que celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s’oblige à le restituer à celui de qui il l’a indûment reçu.

Le dernier, l’article 1743 alinéa 1er prévoit que le bail est opposable à l’acquéreur qui en a eu connaissance avant la vente de la chose louée.

De la combinaison de ces trois articles il en ressort que le locataire peut agir contre son bailleur originaire en restitution de paiements indus effectués au titre de loyers et charges échus antérieurement à la vente. La clause précitée lui est inopposable.

 

La Cour de cassation dégage une solution logique dans le sens où le bailleur originaire ayant été destinataire des fonds versés par le locataire, c’est à lui de les restituer nonobstant l’existence d’une clause de subrogation dans le contrat de vente du bien postérieure à la réception des fonds mais antérieure à l’action du locataire.