Par un arrêt en date du 28 octobre 2025 (n°25-85.293), la Chambre criminelle de la Cour de cassation a cassé l'arrêt de la chambre de l'instruction ayant rejeté le moyen d'annulation tiré de l'absence de signature d'une ordonnance de placement en détention provisoire par le juge des libertés et de la détention.
Les faits de l'espèce étaient simples, la solution apportée par la Chambre criminelle l'est tout autant.
Le juge des libertés et de la détention avait omis de signer l'ordonnance de placement en détention provisoire rendue à l'encontre d'une personne mise en examen. Son conseil a dénoncé cette irrégularité manifeste devant la chambre de l'instruction.
Or, cette dernière a cru pouvoir la couvrir au prétexte, d'une part, que l'absence de signature pouvait être compensée par le sceau du magistrat ainsi que par la signature de la personne mise en examen, de son avocat et du greffier qui attestait, a minima, d'une notification réalisée dans les formes légales. Elle a, d'autre part, tenté de justifier de l'existence légale de l'ordonnance non-signée en invoquant classiquement la signature du procès-verbal de débat contradictoire et du mandat de dépot par le magistrat. Elle a conclu qu'il s'agissait seulement d'une omission, soit d'une erreur matérielle, sans conséquence sur la régularité de l'ordonnance entreprise ou pire, sur son existence légale.
Cette tentative de sauvetage circonstanciée n'a pas convaincu la Chambre criminelle qui a rappelé, au visa de l'article 145 du code de procédure pénale, le principe général selon lequel «est inexistante l'ordonnance de placement en détention provisoire qui ne comporte pas la signature du magistrat qui l'a rendue, laquelle constitue une formalité essentielle, de sorte que le mandat de dépot subséquent est privé de tout effet» avant de censurer l'arrêt et de tirer toutes les conséquences de sa décision en ordonnant la remise en liberté de la personne mise en examen.
En effet, dans la mesure ou la signature du juge des libertés et de la détention sur une décision ordonnant le placement en détention provisoire de l'exposant constitue une formalité essentielle, sa méconnaissance prive la décision de toute existence légale. Et dans la mesure ou le mandat de dépôt ne peut être décerné qu'à l'encontre d'une personne mise en examen ayant fait l'objet d'une ordonnance de placement en détention provisoire (Art. 122 du code de procédure pénale), l'inexistence de cette ordonnance entraine par un effet domino l'inexistence du titre de détention délivré sur son fondement.
En somme et en une phrase qui peut résumer l'arrêt, l'absence de signature du juge des libertés et de la détention sur une ordonnance de placement en détention provisoire prive cette décision et le mandat de dépot décerné de ce chef de tout effet.
La solution est logique puisque la signature est « le signe conférant l’authenticité à l’acte sur lequel il est apposé » (Gerard Cornu, Vocabulaire juridique, Puf, 15e, p. 3280).
La Chambre criminelle de la Cour de cassation juge donc avec constance et de manière générale que tout acte juridictionnel doit être signé par son auteur, à peine de méconnaitre une formalité substantielle et de le priver de tout effet (v. s'agissant d'un arrêt de la chambre de l'instruction : Cass. Crim., 29 janvier 1990, n°87-84.604 ; d'une décision de la Cour d'assises non-signée par le premier juré : 23 février 2000, n°98-86.627 ; d'un procès-verbal de débat contradictoire : Cass. Crim., 28 janvier 2003, n°02-87.247, Publié au Bulletin ; d'un réquisitoire : Cass. Crim., 17 juin 2025, n°24-87.024, Publié au Bulletin ; d'une expertise : Cass. Crim., 6 novembre 1990, n°90-85.152 ; d'une citation de jugement non-signée par le commissaire de justice l'ayant délivrée : Cass. Crim., 26 mars 1992, n°91-85.341, Publié au Bulletin ; d'une requête en nullité par l'avocat l'ayant rédigée : Cass. Crim., 30 avril 2024, n°23-85.440).
Ainsi, cette décision si elle n'est pas révolutionnaire a le mérite de perprétrer une jurisprudence claire, radicale mais uniforme et de consolider ce domaine des nullités de la procédure qui échappe à la nécessité de démontrer un grief.

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