Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère Chambre, 19 décembre 2024, 22BX01830
La cour administrative d’appel de Bordeaux vient de rendre une décision confirmant la grande sévérité des juges administratifs dans l’application la loi littoral s’agissant de la bande de cent mètres.
Dans cette affaire, un particulier avait, déposé auprès de la commune de Lacanau une demande de permis de construire en vue de l'édification d'une maison individuelle.
Par arrêté du 24 décembre 2020, il avait été fait droit à cette demande.
Cependant, la préfète de la Gironde avait saisi le tribunal administratif de Bordeaux qui, par jugement du 02 juin 2022, a annulé l'arrêté du 24 décembre 2020.
La commune de Lacanau a fait appel de ce jugement.
C’est l’objet de la présente décision.
En vertu de l’article L. 121-16 du Code de l’urbanisme : « En dehors des espaces urbanisés, les constructions ou installations sont interdites sur une bande littorale de cent mètres à compter de la limite haute du rivage ou des plus hautes eaux pour les plans d'eau intérieurs désignés au 1° de l'article L. 321-2 du code de l'environnement ».
La jurisprudence administrative est très stricte dans la qualification juridique d’espace urbanisé au sens de cette disposition.
En l’espèce, les juges administratifs d’appel ont confirmé le jugement de première instance en relavant que « 10. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet se situe en limite sud-est du lieu-dit de Longarisse, relevant de la commune de Lacanau. Ce lieu-dit comprend une centaine de maisons individuelles réparties autour de quelques voies de circulation et s'insère dans un environnement arboré, bordé au nord, à l'est et au sud par le lac de Lacanau et sur une large partie ouest par une vaste zone naturelle. A la date de l'arrêté en litige, le schéma de cohérence territoriale des lacs médocains approuvé le 6 avril 2012, identifie ce quartier lacustre comme un espace d'urbanisation limitée composé d'un groupe d'habitations situées à l'écart de tout village ou agglomération. A cet égard, la commune de Lacanau ne peut utilement se prévaloir du schéma de cohérence territorial Médoc atlantique, approuvé le 22 février 2024, qui n'était pas applicable à la date de l'arrêté contesté. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que le secteur d'implantation du projet ne compte aucun commerce, ni équipement collectif. Si le nombre des constructions situées au lieu-dit de Longarisse, à savoir une centaine, est conséquent, leur implantation, relativement lâche et pour la plupart sur des parcelles assez vastes, ne saurait être regardée comme étant d'une densité significative au sens du principe rappelé au point précédent. Par suite, le secteur ne peut être qualifié d'espace urbanisé au sens et pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 121-16 du code de l'urbanisme et c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu que le permis de construire délivré par le maire de Lacanau méconnaissait ces dispositions ».
La commune de Lacanau avait alors tenté d’invoquer l’évolution du SCoT pour échapper à une annulation.
Cet argumentaire est retoqué par les juges qui estiment que ; « 14. Si la commune de Lacanau fait valoir, dans sa note en délibéré enregistré au greffe de la cour le 31 mai 2024, que le schéma de cohérence territoriale Médoc Atlantique, modifié par une délibération du 22 février 2024, identifie le secteur du " lac sud-ouest ", intégrant le lieu-dit Longarisse, comme un village existant au sens des dispositions précitées de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, cette circonstance est sans incidence sur la méconnaissance par le projet en litige, constatée au point 10, des dispositions de l'article L. 121-16 du code de l'urbanisme. Dans ces conditions, le vice résultant de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-16 du code de l'urbanisme n'est pas susceptible d'être régularisé ».
Cette décision, bien que sévère, rappelle l'importance de la Loi Littoral pour protéger les espaces naturels côtiers. Si vous envisagez un projet de construction près de la côte, il est essentiel de vérifier les règles en vigueur et de solliciter des conseils juridiques en cas de doute.
Dans cette affaire comme bien souvent, le préjudice est important pour le particulier en question.
Mais ce dernier dispose alors vraisemblablement d’une action indemnitaire contre la mairie de Lacanau afin d’obtenir le versement de dommages et intérêts (V. pour un exemple récent « Loi Littoral et indemnisation à Plestin-les-Grèves »).
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