2021 est une année doublement électorale puisque les citoyens français sont amenés à élire les conseillers régionaux et les conseillers départementaux.

Le contexte sanitaire actuel a un impact sur le déroulement de la campagne et la majorité des candidats ont recours massivement au numérique pour contourner les nombreuses restrictions sanitaires.

Cette campagne électorale est donc définitivement 2.0 !

En toute logique, le caractère incontournable des NTIC comme vecteurs de communication a conduit le juge électoral à être saisi concernant les réseaux sociaux tels que Facebook ou Twitter.

Ainsi dans deux décisions récentes de mai 2021 relatives au premier tour des élections municipales de 2020, le Conseil d'Etat a épinglé des utilisations du réseau Facebook par des candidats élus.

1. La propagande électorale et réseaux sociaux

Aux Etats-Unis l’usage de Facebook a été au cœur des polémiques de la dernière campagne présidentielle.

En France, la propagande électorale numérique est soumise aux mêmes règles que celles de la vie réelle.

La propagande l’électorale est encadrée notamment par l’article L.48-1 du code électoral qui dispose que :

« les interdictions et restrictions prévues par le présent code en matière de propagande électorale sont applicables à tout message ayant le caractère de propagande électorale diffusé par tout moyen de communication au public par voie électronique ».

Ainsi, l’usage du numérique est expressément visé par le Code.


2. Quid des contenus sponsorisés ?

Il faut entendre par contenus sponsorisés les publications pour lesquelles l’auteur va acheter de la visibilité, au travers de référencement payant, d’achat de liens sponsorisés ou de mots clés.

Ces contenus payés sont considérés comme de la publicité et donc interdits par le Code électoral.

La jurisprudence en matière électorale a déjà eu l’occasion de sanctionner, l’achat du référencement d'un site auprès de Google ainsi que l'apparition de ce site, en tant qu'annonce publicitaire sur Facebook (CE 13 février 2009, n° 317637 ; CE 25 février 2015, n° 382904)

A contrario, les publications dites « organiques » (non-payées) ne sont pas soumises à l'application de l'article 52-1 du code électoral, c’est ce qu’a pris soin de préciser la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP).

De plus, dans deux décisions des 28 et 31 mai 2021 le Juge électoral a considéré que:

"cette diffusion, qu'elle ait été volontaire ou non de la part du candidat, revêt le caractère d'un procédé de publicité commerciale interdit par le premier alinéa de l'article L.52-1 du code électoral. Cependant, il résulte de l'instruction que, compte tenu du caractère non polémique de son contenu et du faible impact de cette publication sponsorisée sur la fréquentation de la page Facebook du candidat, cette irrégularité n'est pas susceptible à elle seule, d'avoir altéré la sincérité du scrutin". (CE, 28 mai 2021, req. n°445567 ; CE, 31 mai 2021, req. n°441849.) 

La lecture de ces deux arrêts pousse donc à appeler à la plus grande prudence en ce qui concerne l’usage des réseaux sociaux, d’autant plus s’il peut être démontré que cet usage prohibé a eu un impact sur l’issue du scrutin notamment en cas de résultat très serré.

Concernant l’écart de voix, généralement, au-delà d’un écart de voix de 5%, le juge électoral considère que l’abus de propagande n’a pu altérer la sincérité du scrutin. (CE, 29 juillet 2002, Elec. Mun. La Grande Motte, req. n° 236405 Rec. T.).


3. Veillez à différencier le réseau de la collectivité et celui du candidat

Le principe est l’interdiction des campagnes de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion de la collectivité pendant la période pré-électorale en application de l’article L52-1 du Code électoral qui dispose que :

« A compter du premier jour du sixième mois précédant le mois au cours duquel il doit être procédé à des élections générales, aucune campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d’une collectivité ne peut être organisée sur le territoire des collectivités intéressées par le scrutin. Sans préjudice des dispositions du présent chapitre, cette interdiction ne s’applique pas à la présentation, par un candidat ou pour son compte, dans le cadre de l’organisation de sa campagne, du bilan de la gestion des mandats qu’il détient ou qu’il a détenus. Les dépenses afférentes sont soumises aux dispositions relatives au financement et au plafonnement des dépenses électorales contenues au chapitre V bis du présent titre ».

C’est notamment ce qui est rappelé dans une circulaire du 31 août 2020 relative aux élections départementales et régionales et qui vise à rappeler les principes essentiels et en premier lieu celui de la non-utilisation des moyens publics au bénéfice d'un candidat ou d'une liste candidate.

En période électorale, la collectivité peut communiquer sous réserve que les publications respectent de quatre principes :

  •  l’antériorité ;
  •  la régularité ;
  •  l’identité de forme ;
  •  la neutralité.

Dès lors, il est nécessaire de rester vigilant.


3. Rappel des règles à l’approche du scrutin

La Gazette des communes rappelle que sur internet, les candidats peuvent créer et utiliser leurs sites pendant la campagne. Mais si ces sites permettent des interactions avec des visiteurs, il faudra veiller à désactiver la possibilité de laisser des messages à partir de la veille du scrutin (source Gazette des communes).

Le site du Conseil constitutionnel rappelle que « Les limitations apportées à la liberté de communication sur internet à l’approche du scrutin ont pour objet de garantir la liberté d’expression des électeurs et d’empêcher toute pression de nature à altérer la sincérité du scrutin. »

Le code électoral prévoit deux interdictions spécifiques le jour et la veille du scrutin.

Il est interdit, à partir de la veille du scrutin à zéro heure, de diffuser ou de faire diffuser « par tout moyen de communication au public par voie électronique » tout message ayant le caractère de propagande électorale.

Il est également interdit, à partir de la veille du scrutin à zéro heure, « de procéder, par un système automatisé ou non, à l’appel téléphonique en série des électeurs afin de les inciter à voter pour un candidat ».

Par conséquent, la campagne électorale en vue du premier tour de scrutin est ouverte le lundi 31 mai 2021 à zéro heure et s’achève le vendredi 18 juin 2021 à minuit. En cas de second tour, la campagne est ouverte le lundi 21 juin à zéro heure et close le vendredi 25 juin à minuit.

Dans tous les cas, il convient de se rappeler que la campagne numérique n’est pas exclue du champ d’application du code électoral.