Cet arrêt est commenté par :

- LAMY ASSURANCES - actualités, 2013, n° 210, p. 6.

Cour de cassation

chambre civile 2

Audience publique du jeudi 3 octobre 2013

N° de pourvoi: 12-23.684

Non publié au bulletin Rejet

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 octobre 2010), qu'à la suite des dégâts des eaux survenus en janvier 2000 dans un studio lui appartenant au rez-de-chaussée de l'immeuble en copropriété provenant d'un studio situé au premier étage, propriété des consorts X..., la société Groupe Franklin a assigné en réparation de son préjudice tant les consorts X... que le syndicat des copropriétaires ;

Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt de confirmer le rejet de leur demande de garantie, formée contre l'assureur et de les condamner à payer diverses sommes au profit du groupe Franklin et du syndicat des copropriétaires, alors, selon le moyen :

1°/ que les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré étant à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police, la clause excluant la garantie de l'assureur en cas de défaut d'entretien ou de réparation caractérisé et connu de l'assuré ne se référant pas à des critères précis et à des hypothèses limitativement énumérées n'est pas formelle et limitée et ne peut recevoir application en raison de son imprécision ; qu'après avoir constaté que le contrat d'assurance consenti par l'assureur pour le studio appartenant aux consorts X... à Paris comporte une clause d'exclusion de garantie, dans laquelle il est stipulé « nous ne garantissons pas les infiltrations dues à l'usure ou à défaut de réparation ou d'entretien indispensable incombant à l'assuré (tant avant qu'après sinistre), sauf cas de force majeure », la cour d'appel, qui a fait application de cette clause pourtant non formelle et non limitée, a violé l'article L. 113-1 du code des assurances ;

2°/ que les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré étant à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police, la clause excluant la garantie de l'assureur en cas de défaut d'entretien ou de réparation caractérisé et connu de l'assuré ne se référant pas à des critères précis et à des hypothèses limitativement énumérées n'est pas formelle et limitée et ne peut recevoir application en raison de son imprécision ; qu'en se bornant à affirmer que la clause d'exclusion de garantie contenue dans le contrat d'assurance consenti par l'assureur pour le studio appartenant aux consorts X... à Paris aurait « une formulation claire » et qu'elle aurait « respecté les préconisations de l'article L. 113-1 du code des assurances » sans rechercher, comme il lui était demandé par les consorts X..., si cette clause se référait à des faits, circonstances ou obligations définis avec précision ou si elle devait donner lieu à interprétation, si cette clause était fondée sur des hypothèses limitativement énumérées et si cette clause permettait à l'assuré de connaître exactement l'étendue de la garantie à lui consentie, la cour d'appel a entaché son arrêt d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 113-1 du code des assurances ;

Mais attendu que l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que la clause contractuelle d'exclusion de garantie visait expressément, dans une formulation claire respectant les préconisations de l'article L. 113-1 du code des assurances, le défaut de réparation ou d'entretien indispensable incombant à l'assuré, tant avant qu'après sinistre, sauf cas de force majeure ; que l'expertise a démontré que les infiltrations étaient dues au mauvais état des installations sanitaires et à l'absence d'étanchéité des parois murales et du sol ; que le premier désordre s'est manifesté en 2000 et que des réparations certes insatisfaisantes ont été commandées par Mme X... en 2001 mais qu'elles n'ont pas mis fin au désordre qui s'est poursuivi et a pris de l'ampleur, jusqu'au départ du locataire ; qu'ainsi il apparaît que les causes du désordre étaient connues des assurés à partir de 2000 mais qu'ils n'ont pas pris les mesures suffisantes pour empêcher l'aggravation du désordre ; que dès lors sera-t-il considéré qu'informés du sinistre les consorts X... n'ont pas fait procéder aux réparations nécessaires pour y mettre fin ; que les conditions d'application de la clause d'exclusion de garantie dont il s'agit sont réunies ; que l'assureur est, par conséquent, fondé à ne pas accorder sa garantie ;

Qu'en l'état de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a pu déduire que la clause d'exclusion de garantie prévue au contrat, formelle et limitée, devait recevoir application ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les consorts X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des consorts X..., les condamne à payer à la société Groupama Océan indien et Pacifique la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois octobre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Roger, Sevaux et Mathonnet, avocat aux Conseils, pour les consorts X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le rejet de la demande de garantie, formée à l'égard de la société Groupama par les consorts X..., de la condamnation in solidum des six consorts X..., nupropriétaires, et Madame Yolande X..., usufruitière, à payer au groupe Franklin les sommes de 6.900 euros augmentés des intérêts légaux à compter du 11 janvier 2007, 21.620 euros augmentés des intérêts légaux à compter de la signification du jugement de première instance, de la condamnation in solidum des six consorts X..., nu-propriétaires, à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 7.532,90 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement de première instance, et de la condamnation des six consorts X..., nu-propriétaires, à payer les sommes de 5.000 euros au groupe Franklin et 2.000 euros au syndicat des copropriétaires en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Aux motifs propres que les consorts X... soutiennent d'abord que les conclusions de Groupama n'excipaient pas de la clause d'exclusion de garantie contenue au contrat et que le juge ne pouvait soulever d'office une telle clause ; qu'il est mentionné au jugement : « par dernières conclusions récapitulatives signifiées le 13 décembre 2007, SA Groupama Océan Indien et Pacifique demande au Tribunal de : - débouter le groupe Franklin de ses demandes au motif qu'en l'absence d'aléa il ne garantit pas les consorts X... » ; que les conclusions de première instance ne sont pas versées aux débats ; que, toutefois, d'évidence, si les premiers juges exposent le moyen de non garantie pour absence d'aléa, pouvaient-ils se référer à la police d'assurance et mentionner qu'elle déclare, dans les conditions générales que l'assureur ne « garantit pas les infiltrations dues à l'usure ou à un défaut de réparations ou d'entretien indispensable incombant à l'assuré (tant avant qu'après le sinistre), sauf cas de force majeure » ; que le moyen pris d'une absence de pouvoir du juge est dépourvu de fondement et de surcroît sans portée puisqu'en appel l'assureur se prévaut du même moyen de défense ; que les appelants estiment que l'exclusion figurant au contrat n'est pas conforme aux prescriptions de l'article L.113-l du Code des assurances ; qu'aux termes de celui-ci : « les pertes et dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police » ; que l'assuré doit en effet être à même, dès la souscription du contrat de connaître l'étendue exacte de sa garantie ; que le contrat souscrit auprès de Groupama déclare : « Nous ne garantissons pas ... les infiltrations dues à l'usure ou à un défaut de réparation ou d'entretien indispensable incombant à l'assuré (tant avant qu'après sinistre), sauf cas de force majeure » ; que le cabinet Polyexpert, missionné par la compagnie Groupama, suite au dégât des eaux du 1er janvier 2000, a indiqué dans son rapport du 30 mai 2000 que la salle de bains de l'appartenant des consorts X... était dans un état de délabrement avancé consécutif au défaut d'entretien du locataire ; qu'il indique que, d'après l'Agence Invalides Immobilier, mandataire de l'assuré, les travaux de rénovation devaient être réalisés le 29 mai 2000 ; que Madame X... a fait procéder à des travaux de réfection de sa salle de bain pour 19.781,25 francs, selon facture du 16 août 2000 ; que ces travaux ont été faits par une SARL Conception et Protection Anticorrosion, dont on ignore la qualification ; que la facture porte la seule mention : « réfection d'une salle de bains » sans que soient précisés plus avant les travaux réalisés ; que la société Groupama soutient que ceux-ci n'ont apporté aucun remède à la situation, l'expert indiquant que les conséquences du sinistre dégât des eaux retombent sur Madame X... « dont l'aménagement privatif ne répond ni aux normes, ni aux règles de l'art, ni au règlement sanitaire de Paris » ; que le rapport d'expertise n'est pas versé aux débats ; que, toutefois, il ressort du jugement que les parties privatives du groupe Franklin et les parties communes de la copropriété ont été endommagées par des infiltrations d'eau qui ont duré de janvier 2000 à décembre 2004, la première visite de l'expert datant du 4 décembre 2004 ; que ces constatations démontrent que, comme le relève la SA Groupama, les travaux réalisés en 2000 ont été inefficaces ; que, par ailleurs, Groupama évoque un procès-verbal de l'assemblée générale de la copropriété du 24 octobre 2002 indiquant dans sa résolution 32 qu'il y a : « des dégâts des eaux permanents et abondants qui dégradent les murs et l'appartement en dessous qui est inhabitable », ces affirmations concernant l'appartement Ethève ; que Groupama ne produit pas ce procès-verbal, qui est produit, tronqué, par les consorts X..., les résolutions 27 à 33 n'étant pas versées aux débats ; qu'il est mentionné cependant en point 32 de l'ordre du jour : « problèmes concernant M. Y... qui a sa machine branchée en permanence et crée des dégâts des eaux permanents abondants » ; que cet élément permet de considérer qu'en 2002, soit deux ans après la réalisation des travaux par les consorts X..., les inondations perduraient ; que la clause contractuelle d'exclusion de garantie visait expressément, dans une formulation claire respectant les préconisations de l'article L.113-1 du Code des assurances, le « défaut de réparation ou d'entretien indispensable incombant à l'assuré (tant avant qu'après sinistre) » ; que dès lors sera-t-il considéré qu'informés du sinistre les consorts X... n'ont pas fait procéder aux réparations nécessaires pour y mettre fin ; que les conditions d'application de la clause d'exclusion de garantie dont il s'agit sont réunies ;

Et aux motifs, à les supposer repris, des premiers juges que, sur les recours, les consorts X... forment un recours en garantie contre leur assureur Groupama ; qu'il ressort des conditions générales de la police d'assurance (page 42) que l'assureur ne « garantit pas les infiltrations dues à l'usure ou à un défaut de réparation ou d'entretien indispensable incombant à l'assuré (tant avant qu'après le sinistre), sauf cas de force majeure » ; que l'expertise a démontré que les infiltrations étaient dues au mauvais état des installations sanitaires et à l'absence d'étanchéité des parois murales et du sol ; qu'en l'occurrence les consorts X... font valoir que l'état de santé de leur locataire doit être assimilé à un cas de force majeure ; que la force majeure implique que les conditions d'irrésistibilité, d'imprévisibilité et d'extranéité soient remplies ; que les circonstances de fait, telles qu'elles ont été rappelées par l'expert, et les parties font apparaître que le premier désordre s'est manifesté en 2000 et que des réparations certes insatisfaisantes ont été commandées par Madame Yolande X... en 2001 mais qu'elles n'ont pas mis fin au désordre qui s'est poursuivi et a pris de l'ampleur, jusqu'au départ du locataire ; qu'ainsi il apparaît que les causes du désordre étaient connues des assurés de Groupama à partir de 2000 mais qu'ils n'ont pas pris les mesures suffisantes pour empêcher l'aggravation du désordre ; que, dès lors, les caractères de la force majeure et notamment l'imprévisibilité ne sont pas constitués ; que Groupama est, par conséquent, fondé à ne pas accorder sa garantie ;

Alors, de première part, que les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré étant à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police, la clause excluant la garantie de l'assureur en cas de défaut d'entretien ou de réparation caractérisé et connu de l'assuré ne se référant pas à des critères précis et à des hypothèses limitativement énumérées n'est pas formelle et limitée et ne peut recevoir application en raison de son imprécision ; qu'après avoir constaté que le contrat d'assurance consenti par la société Groupama Océan Indien et Pacifique pour le studio appartenant aux consorts X... à Paris comporte une clause d'exclusion de garantie, dans laquelle il est stipulé « nous ne garantissons pas les infiltrations dues à l'usure ou à défaut de réparation ou d'entretien indispensable incombant à l'assuré (tant avant qu'après sinistre), sauf cas de force majeure » (p. 41 et 42), la Cour d'appel, qui a fait application de cette clause pourtant non formelle et non limitée, a violé l'article L. 113-1 du Code des assurances ;

Alors, subsidiairement, de seconde part, que les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré étant à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police, la clause excluant la garantie de l'assureur en cas de défaut d'entretien ou de réparation caractérisé et connu de l'assuré ne se référant pas à des critères précis et à des hypothèses limitativement énumérées n'est pas formelle et limitée et ne peut recevoir application en raison de son imprécision ; qu'en se bornant à affirmer que la clause d'exclusion de garantie contenue dans le contrat d'assurance consenti par la société Groupama Océan Indien et Pacifique pour le studio appartenant aux consorts X... à Paris aurait « une formulation claire » et qu'elle aurait « respect é les préconisations de l'article L.113-1 du Code des assurances » (arrêt p. 5 § 1), sans rechercher, comme il lui était demandé par les consorts X..., si cette clause se référait à des faits, circonstances ou obligations définis avec précision ou si elle devait donner lieu à interprétation, si cette clause était fondée sur des hypothèses limitativement énumérées et si cette clause permettait à l'assuré de connaître exactement l'étendue de la garantie à lui consentie, la Cour d'appel a entaché son arrêt d'un défaut de base légale au regard de l'article L.113-1 du Code des assurances.