Dans un arrêt du 15 juin 2023 (n°21-20.538), la Cour de cassation rappelle que la loi française s'applique quelle que soit la loi régissant le contrat d’assurance. De fait, une clause d'exclusion de garantie soumise à une loi étrangère doit s'apprécier au regard de la loi française.




Un particulier fait installer des panneaux photovoltaïques de marque SCHEUTEN sur la toiture de bâtiments abritant son élevage de lapins.

De la fumée provenant d'un module, le particulier fait mettre hors service l'installation et fait procéder au remplacement de la totalité des panneaux.

Il assigne ensuite l'entreprise qui lui a vendu et installée les panneaux, les fournisseurs et le fabricant desdits panneaux, ainsi que les assureurs de chacun, en indemnisation des frais de remplacement des panneaux et des pertes de recettes causées par les pertes de production.

On rappellera que la société SCHEUTEN a fait faillite, après que plusieurs dizaines d'installations aient pris feu (voir ici).

L'assureur néerlandais de la société SCHEUTEN oppose une clause d’exclusion de sa police d'assurance pour ne pas prendre en charge la réparation du préjudice, mais aussi que la loi applicable serait la loi du pays de l’assureur.

Le 6 avril 2021, la Cour d’appel de Poitiers accède à la demande de l'assureur, considérant la clause d’exclusion claire et précise. De fait, elle rejette l’appel en garantie formé par les assureurs français contre l'assureur de droit étranger.

La Cour de cassation, saisie, censure les juges poitevins pour deux motifs.

En premier lieu, l’article L. 181-3 alinéa 1er du Code des assurances dispose que les dispositions d’ordre public de la loi française sont applicables quelle que soit la loi régissant le contrat d’assurance.

La censure était donc inévitable. Pour ce faire, la Cour de cassation rappelle "qu'en matière d'assurance de dommages non obligatoire, les dispositions d'ordre public des articles L. 112-4 et L. 113-1 du code des assurances sont applicables quelle que soit la loi régissant le contrat."

En second lieu, la clause d’exclusion du contrat d'assurance de la société SCHEUTEN ne répondait pas aux exigences d’ordre public des articles L. 112-4 et L. 113-1 du Code des assurances.

Effectivement, il existe deux types d’exclusions de garantie : les exclusions légales et les exclusions conventionnelles.

S’agissant des exclusions conventionnelles, la jurisprudence les a encadrés de manière stricte : pour être valables, ces exclusions doivent être écrites en caractères gras et apparent, mais également être formelles, limitées et ne pas vider la police de sa substance.

En l'espèce, les juges d'appel n'ont pas vérifié si les conditions d'exclusion, quand bien même il s’agit d’une police étrangère, répondaient aux exigences d'ordre public des articles L. 112-4 et L. 113-1 du code des assurances.

Là encore, la censure ne pouvait être empêchée.

On retiendra donc de cette affaire que pour toute assurance de dommages non obligatoire, les dispositions d’ordre public françaises s'appliquent même en présence d'un assuré étranger.




Me Grégory ROULAND - avocat au Barreau de PARIS

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