Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 22-16.221
- ECLI:FR:CCASS:2023:C300558
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du jeudi 13 juillet 2023
Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, du 03 mars 2022
Président
Mme Teiller (président)
Avocat(s)
SCP L. Poulet-Odent, SCP Nicolaý, de Lanouvelle, SCP Yves et Blaise Capron
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 13 juillet 2023
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 558 FS-D
Pourvoi n° M 22-16.221
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 JUILLET 2023
La société Marignan résidences, société en nom collectif, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° M 22-16.221 contre l'arrêt rendu le 3 mars 2022 par la cour d'appel de Douai (chambre 1, section 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [M] [J], domicilié [Adresse 3],
2°/ à la société Omnium finance, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
La société Omnium Finance a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi provoqué contre le même arrêt ;
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation ;
La demanderesse au pourvoi provoqué invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation ;
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la société Marignan résidences, de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de M. [J], de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la société Omnium finance, et l'avis de M. Brun, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 juin 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Delbano, conseiller doyen, Mme Farrenq-Nési, M. Boyer, Mme Abgrall, conseillers, Mmes Djikpa, Brun, Vernimmen, Rat, conseillers référendaires, M. Brun, avocat général, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 3 mars 2022) et les productions, M. [J] a acquis de la société Marignan résidences, par acte de vente en l'état futur d'achèvement du 15 juin 2010, un appartement dans une résidence, à titre d'investissement immobilier locatif bénéficiant d'un dispositif de défiscalisation.
2. La mention « Groupe Omnium finance » figurait sur chaque page de la brochure de commercialisation.
3. Se prévalant d'un manquement des deux sociétés à leur obligation d'information sur la valeur du bien et soutenant que celle-ci avait été garantie sur une période de dix ans, M. [J] a assigné, par actes des 2 et 5 octobre 2020, les sociétés Marignan résidences et Omnium finance aux fins d'indemnisation d'une perte de chance de contracter dans des conditions plus avantageuses.
4. Les sociétés Marignan résidences et Omnium finance ont saisi le juge de la mise en état d'une fin de non-recevoir tirée de la prescription.
Sur le moyen de la société Marignan résidences et sur le moyen du pourvoi provoqué de la société Omnium finance, rédigés en termes similaires, réunis
Enoncé du moyen
5. Par leurs moyens, pris en leurs trois premières branches, rédigées en termes similaires, les sociétés Marignan résidences et Omnium finance font grief à l'arrêt de déclarer recevables l'action et les demandes de M. [J] à leur encontre, alors :
« 1°/ que la prescription de l'action intentée contre un professionnel de l'immobilier à qui est reproché un déficit d'information quant à la valeur du bien vendu, court depuis le jour de la vente ; qu'en ayant jugé que la prescription quinquennale n'avait pu courir qu'au jour de la fin du dispositif de location prévu par la loi Scellier, soit neuf ans après la vente, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil ;
2°/ que la prescription de l'action intentée contre un professionnel de l'immobilier à qui est reproché un déficit d'information quant à la valeur du bien vendu, court depuis le jour de la vente ; qu'en ayant jugé que la prescription quinquennale n'avait pu courir qu'au jour de la fin du dispositif de location prévu par la loi Scellier, soit neuf ans après la vente, au motif inopérant que l'appartement, objet du prétendu déficit d'information, avait été acquis dans le cadre d'un dispositif de défiscalisation, imposant la mise en location d'un bien, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 2224 du code civil ;
3°/ que la prescription de l'action intentée contre un professionnel de l'immobilier à qui est reproché un déficit d'information quant à la valeur du bien vendu, court depuis le jour de la vente ; qu'en ayant jugé que la prescription quinquennale n'avait pu courir qu'au jour de la fin du dispositif de location prévu par la loi Scellier, soit neuf ans après la vente, au motif inopérant qu'il ne pouvait être reproché à M. [J] d'avoir mis son bien en vente avant le mois de décembre 2019, date de l'échéance du dispositif fiscal, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 2224 du code civil. »
6. Par son moyen, pris en sa quatrième branche, la société Marignan résidences fait le même grief à l'arrêt, alors « que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en ayant omis de répondre aux conclusions de l'exposante, ayant souligné qu'en tout état de cause, M. [J] avait pu prendre connaissance, en assistant aux assemblées générales de copropriétaires, de la présence de logements sociaux dans l'immeuble, puisque ce fait était, selon lui, de nature à réduire la valeur vénale de son bien, la cour d'appel a méconnu les prescriptions de l'article 455 du code de procédure civile. »
7. Par son moyen, pris en ses quatrième et cinquième branches, la société Omnium finance fait le même grief à l'arrêt alors :
« 4°/ que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en omettant de répondre aux conclusions, péremptoires, de la société Omnium finance, ayant souligné que M. [M] [J] s'était investi dans la vie de la copropriété dès l'acquisition de ses biens immobiliers et avait été présent à toutes les assemblées générales de copropriétaires et qu'en conséquence, M. [M] [J] avait connaissance, dès l'acquisition de ses biens immobiliers, de la présence de logements sociaux dans l'immeuble où ses biens immobiliers se trouvent, qui, selon lui, serait de nature à réduire la valeur vénale de ses biens immobiliers, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions et a violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;
5°/ et à titre subsidiaire, que le point de départ du délai de prescription en matière de responsabilité civile est la date à laquelle le dommage se manifeste au titulaire du droit ; qu'en énonçant, par conséquent, pour retenir que l'action exercée par M. [M] [J] et les demandes de M. [M] [J] à l'encontre de la société Omnium finance n'étaient pas prescrites et étaient en conséquence recevables, qu'il n'était pas contesté que M. [M] [J], profane de l'immobilier, avait fait l'acquisition de l'appartement objet du litige dans le cadre du dispositif fiscal loi Scellier, imposant la mise en location du bien pendant neuf ans, il ne saurait lui être valablement reproché de ne pas avoir mis son bien en vente avant le mois de décembre 2019, date de l'échéance du dispositif fiscale, et qu'ainsi, le délai de prescription de cinq ans auquel était soumise l'action exercée par M. [M] [J] n'avait commencé à courir qu'à compter de la fin du dispositif de location prévu par la loi Scellier au mois de décembre 2019, date à laquelle M. [M] [J] avait entrepris des démarches en vue de la mise en vente de son appartement, quand, en se déterminant de la sorte, elle ne caractérisait pas que les prétendus dommages invoqués par M. [M] [J], tenant à la prétendue perte de chance d'avoir pu contracter à des conditions plus avantageuses et à la prétendue perte de chance de pouvoir vendre son bien à la valeur prétendument garantie initialement, ne s'étaient manifestés à M. [M] [J] qu'au mois de décembre 2019, soit neuf ans après la vente, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 2224 du code civil. »
Réponse de la Cour
8. La prescription de l'action de l'acquéreur fondée sur un manquement du vendeur à son obligation d'information ne court pas nécessairement à compter du jour de la vente mais, conformément à l'article 2224 du code civil, à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
9. La cour d'appel, devant laquelle M. [J] se prévalait d'une garantie de valeur du bien sur une période de dix ans, répondant aux conclusions des sociétés Marignan résidences et Omnium finance soutenant que l'acquéreur connaissait dès l'acte authentique de vente la valeur de son bien sur le marché immobilier et locatif, a retenu que le délai de prescription de cinq ans n'avait commencé à courir qu'à compter de la fin du dispositif Scellier en décembre 2019, date à laquelle M. [J] avait entrepris des démarches en vue de la mise en vente de son appartement.
10. Elle en a souverainement déduit, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, que M. [J] n'avait eu connaissance qu'à cette date des faits lui permettant d'agir, de sorte que son action n'était pas prescrite à la date de l'assignation.
11. Elle a, ainsi, légalement justifié sa décision.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
Condamne les sociétés Marignan résidences et Omnium finance aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes des sociétés et les condamne à payer à M. [J] la somme de 1 500 euros chacune ;
Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 22-16.221
- ECLI:FR:CCASS:2023:C300558
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du jeudi 13 juillet 2023
Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, du 03 mars 2022
Président
Mme Teiller (président)
Avocat(s)
SCP L. Poulet-Odent, SCP Nicolaý, de Lanouvelle, SCP Yves et Blaise Capron
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 13 juillet 2023
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 558 FS-D
Pourvoi n° M 22-16.221
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 JUILLET 2023
La société Marignan résidences, société en nom collectif, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° M 22-16.221 contre l'arrêt rendu le 3 mars 2022 par la cour d'appel de Douai (chambre 1, section 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [M] [J], domicilié [Adresse 3],
2°/ à la société Omnium finance, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
La société Omnium Finance a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi provoqué contre le même arrêt ;
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation ;
La demanderesse au pourvoi provoqué invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation ;
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la société Marignan résidences, de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de M. [J], de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la société Omnium finance, et l'avis de M. Brun, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 juin 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Delbano, conseiller doyen, Mme Farrenq-Nési, M. Boyer, Mme Abgrall, conseillers, Mmes Djikpa, Brun, Vernimmen, Rat, conseillers référendaires, M. Brun, avocat général, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 3 mars 2022) et les productions, M. [J] a acquis de la société Marignan résidences, par acte de vente en l'état futur d'achèvement du 15 juin 2010, un appartement dans une résidence, à titre d'investissement immobilier locatif bénéficiant d'un dispositif de défiscalisation.
2. La mention « Groupe Omnium finance » figurait sur chaque page de la brochure de commercialisation.
3. Se prévalant d'un manquement des deux sociétés à leur obligation d'information sur la valeur du bien et soutenant que celle-ci avait été garantie sur une période de dix ans, M. [J] a assigné, par actes des 2 et 5 octobre 2020, les sociétés Marignan résidences et Omnium finance aux fins d'indemnisation d'une perte de chance de contracter dans des conditions plus avantageuses.
4. Les sociétés Marignan résidences et Omnium finance ont saisi le juge de la mise en état d'une fin de non-recevoir tirée de la prescription.
Sur le moyen de la société Marignan résidences et sur le moyen du pourvoi provoqué de la société Omnium finance, rédigés en termes similaires, réunis
Enoncé du moyen
5. Par leurs moyens, pris en leurs trois premières branches, rédigées en termes similaires, les sociétés Marignan résidences et Omnium finance font grief à l'arrêt de déclarer recevables l'action et les demandes de M. [J] à leur encontre, alors :
« 1°/ que la prescription de l'action intentée contre un professionnel de l'immobilier à qui est reproché un déficit d'information quant à la valeur du bien vendu, court depuis le jour de la vente ; qu'en ayant jugé que la prescription quinquennale n'avait pu courir qu'au jour de la fin du dispositif de location prévu par la loi Scellier, soit neuf ans après la vente, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil ;
2°/ que la prescription de l'action intentée contre un professionnel de l'immobilier à qui est reproché un déficit d'information quant à la valeur du bien vendu, court depuis le jour de la vente ; qu'en ayant jugé que la prescription quinquennale n'avait pu courir qu'au jour de la fin du dispositif de location prévu par la loi Scellier, soit neuf ans après la vente, au motif inopérant que l'appartement, objet du prétendu déficit d'information, avait été acquis dans le cadre d'un dispositif de défiscalisation, imposant la mise en location d'un bien, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 2224 du code civil ;
3°/ que la prescription de l'action intentée contre un professionnel de l'immobilier à qui est reproché un déficit d'information quant à la valeur du bien vendu, court depuis le jour de la vente ; qu'en ayant jugé que la prescription quinquennale n'avait pu courir qu'au jour de la fin du dispositif de location prévu par la loi Scellier, soit neuf ans après la vente, au motif inopérant qu'il ne pouvait être reproché à M. [J] d'avoir mis son bien en vente avant le mois de décembre 2019, date de l'échéance du dispositif fiscal, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 2224 du code civil. »
6. Par son moyen, pris en sa quatrième branche, la société Marignan résidences fait le même grief à l'arrêt, alors « que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en ayant omis de répondre aux conclusions de l'exposante, ayant souligné qu'en tout état de cause, M. [J] avait pu prendre connaissance, en assistant aux assemblées générales de copropriétaires, de la présence de logements sociaux dans l'immeuble, puisque ce fait était, selon lui, de nature à réduire la valeur vénale de son bien, la cour d'appel a méconnu les prescriptions de l'article 455 du code de procédure civile. »
7. Par son moyen, pris en ses quatrième et cinquième branches, la société Omnium finance fait le même grief à l'arrêt alors :
« 4°/ que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en omettant de répondre aux conclusions, péremptoires, de la société Omnium finance, ayant souligné que M. [M] [J] s'était investi dans la vie de la copropriété dès l'acquisition de ses biens immobiliers et avait été présent à toutes les assemblées générales de copropriétaires et qu'en conséquence, M. [M] [J] avait connaissance, dès l'acquisition de ses biens immobiliers, de la présence de logements sociaux dans l'immeuble où ses biens immobiliers se trouvent, qui, selon lui, serait de nature à réduire la valeur vénale de ses biens immobiliers, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions et a violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;
5°/ et à titre subsidiaire, que le point de départ du délai de prescription en matière de responsabilité civile est la date à laquelle le dommage se manifeste au titulaire du droit ; qu'en énonçant, par conséquent, pour retenir que l'action exercée par M. [M] [J] et les demandes de M. [M] [J] à l'encontre de la société Omnium finance n'étaient pas prescrites et étaient en conséquence recevables, qu'il n'était pas contesté que M. [M] [J], profane de l'immobilier, avait fait l'acquisition de l'appartement objet du litige dans le cadre du dispositif fiscal loi Scellier, imposant la mise en location du bien pendant neuf ans, il ne saurait lui être valablement reproché de ne pas avoir mis son bien en vente avant le mois de décembre 2019, date de l'échéance du dispositif fiscale, et qu'ainsi, le délai de prescription de cinq ans auquel était soumise l'action exercée par M. [M] [J] n'avait commencé à courir qu'à compter de la fin du dispositif de location prévu par la loi Scellier au mois de décembre 2019, date à laquelle M. [M] [J] avait entrepris des démarches en vue de la mise en vente de son appartement, quand, en se déterminant de la sorte, elle ne caractérisait pas que les prétendus dommages invoqués par M. [M] [J], tenant à la prétendue perte de chance d'avoir pu contracter à des conditions plus avantageuses et à la prétendue perte de chance de pouvoir vendre son bien à la valeur prétendument garantie initialement, ne s'étaient manifestés à M. [M] [J] qu'au mois de décembre 2019, soit neuf ans après la vente, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 2224 du code civil. »
Réponse de la Cour
8. La prescription de l'action de l'acquéreur fondée sur un manquement du vendeur à son obligation d'information ne court pas nécessairement à compter du jour de la vente mais, conformément à l'article 2224 du code civil, à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
9. La cour d'appel, devant laquelle M. [J] se prévalait d'une garantie de valeur du bien sur une période de dix ans, répondant aux conclusions des sociétés Marignan résidences et Omnium finance soutenant que l'acquéreur connaissait dès l'acte authentique de vente la valeur de son bien sur le marché immobilier et locatif, a retenu que le délai de prescription de cinq ans n'avait commencé à courir qu'à compter de la fin du dispositif Scellier en décembre 2019, date à laquelle M. [J] avait entrepris des démarches en vue de la mise en vente de son appartement.
10. Elle en a souverainement déduit, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, que M. [J] n'avait eu connaissance qu'à cette date des faits lui permettant d'agir, de sorte que son action n'était pas prescrite à la date de l'assignation.
11. Elle a, ainsi, légalement justifié sa décision.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
Condamne les sociétés Marignan résidences et Omnium finance aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes des sociétés et les condamne à payer à M. [J] la somme de 1 500 euros chacune ;
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 13 juillet 2023
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 558 FS-D
Pourvoi n° M 22-16.221
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 JUILLET 2023
La société Marignan résidences, société en nom collectif, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° M 22-16.221 contre l'arrêt rendu le 3 mars 2022 par la cour d'appel de Douai (chambre 1, section 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [M] [J], domicilié [Adresse 3],
2°/ à la société Omnium finance, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
La société Omnium Finance a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi provoqué contre le même arrêt ;
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation ;
La demanderesse au pourvoi provoqué invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation ;
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la société Marignan résidences, de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de M. [J], de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la société Omnium finance, et l'avis de M. Brun, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 juin 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Delbano, conseiller doyen, Mme Farrenq-Nési, M. Boyer, Mme Abgrall, conseillers, Mmes Djikpa, Brun, Vernimmen, Rat, conseillers référendaires, M. Brun, avocat général, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 3 mars 2022) et les productions, M. [J] a acquis de la société Marignan résidences, par acte de vente en l'état futur d'achèvement du 15 juin 2010, un appartement dans une résidence, à titre d'investissement immobilier locatif bénéficiant d'un dispositif de défiscalisation.
2. La mention « Groupe Omnium finance » figurait sur chaque page de la brochure de commercialisation.
3. Se prévalant d'un manquement des deux sociétés à leur obligation d'information sur la valeur du bien et soutenant que celle-ci avait été garantie sur une période de dix ans, M. [J] a assigné, par actes des 2 et 5 octobre 2020, les sociétés Marignan résidences et Omnium finance aux fins d'indemnisation d'une perte de chance de contracter dans des conditions plus avantageuses.
4. Les sociétés Marignan résidences et Omnium finance ont saisi le juge de la mise en état d'une fin de non-recevoir tirée de la prescription.
Sur le moyen de la société Marignan résidences et sur le moyen du pourvoi provoqué de la société Omnium finance, rédigés en termes similaires, réunis
Enoncé du moyen
5. Par leurs moyens, pris en leurs trois premières branches, rédigées en termes similaires, les sociétés Marignan résidences et Omnium finance font grief à l'arrêt de déclarer recevables l'action et les demandes de M. [J] à leur encontre, alors :
« 1°/ que la prescription de l'action intentée contre un professionnel de l'immobilier à qui est reproché un déficit d'information quant à la valeur du bien vendu, court depuis le jour de la vente ; qu'en ayant jugé que la prescription quinquennale n'avait pu courir qu'au jour de la fin du dispositif de location prévu par la loi Scellier, soit neuf ans après la vente, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil ;
2°/ que la prescription de l'action intentée contre un professionnel de l'immobilier à qui est reproché un déficit d'information quant à la valeur du bien vendu, court depuis le jour de la vente ; qu'en ayant jugé que la prescription quinquennale n'avait pu courir qu'au jour de la fin du dispositif de location prévu par la loi Scellier, soit neuf ans après la vente, au motif inopérant que l'appartement, objet du prétendu déficit d'information, avait été acquis dans le cadre d'un dispositif de défiscalisation, imposant la mise en location d'un bien, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 2224 du code civil ;
3°/ que la prescription de l'action intentée contre un professionnel de l'immobilier à qui est reproché un déficit d'information quant à la valeur du bien vendu, court depuis le jour de la vente ; qu'en ayant jugé que la prescription quinquennale n'avait pu courir qu'au jour de la fin du dispositif de location prévu par la loi Scellier, soit neuf ans après la vente, au motif inopérant qu'il ne pouvait être reproché à M. [J] d'avoir mis son bien en vente avant le mois de décembre 2019, date de l'échéance du dispositif fiscal, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 2224 du code civil. »
6. Par son moyen, pris en sa quatrième branche, la société Marignan résidences fait le même grief à l'arrêt, alors « que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en ayant omis de répondre aux conclusions de l'exposante, ayant souligné qu'en tout état de cause, M. [J] avait pu prendre connaissance, en assistant aux assemblées générales de copropriétaires, de la présence de logements sociaux dans l'immeuble, puisque ce fait était, selon lui, de nature à réduire la valeur vénale de son bien, la cour d'appel a méconnu les prescriptions de l'article 455 du code de procédure civile. »
7. Par son moyen, pris en ses quatrième et cinquième branches, la société Omnium finance fait le même grief à l'arrêt alors :
« 4°/ que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en omettant de répondre aux conclusions, péremptoires, de la société Omnium finance, ayant souligné que M. [M] [J] s'était investi dans la vie de la copropriété dès l'acquisition de ses biens immobiliers et avait été présent à toutes les assemblées générales de copropriétaires et qu'en conséquence, M. [M] [J] avait connaissance, dès l'acquisition de ses biens immobiliers, de la présence de logements sociaux dans l'immeuble où ses biens immobiliers se trouvent, qui, selon lui, serait de nature à réduire la valeur vénale de ses biens immobiliers, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions et a violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;
5°/ et à titre subsidiaire, que le point de départ du délai de prescription en matière de responsabilité civile est la date à laquelle le dommage se manifeste au titulaire du droit ; qu'en énonçant, par conséquent, pour retenir que l'action exercée par M. [M] [J] et les demandes de M. [M] [J] à l'encontre de la société Omnium finance n'étaient pas prescrites et étaient en conséquence recevables, qu'il n'était pas contesté que M. [M] [J], profane de l'immobilier, avait fait l'acquisition de l'appartement objet du litige dans le cadre du dispositif fiscal loi Scellier, imposant la mise en location du bien pendant neuf ans, il ne saurait lui être valablement reproché de ne pas avoir mis son bien en vente avant le mois de décembre 2019, date de l'échéance du dispositif fiscale, et qu'ainsi, le délai de prescription de cinq ans auquel était soumise l'action exercée par M. [M] [J] n'avait commencé à courir qu'à compter de la fin du dispositif de location prévu par la loi Scellier au mois de décembre 2019, date à laquelle M. [M] [J] avait entrepris des démarches en vue de la mise en vente de son appartement, quand, en se déterminant de la sorte, elle ne caractérisait pas que les prétendus dommages invoqués par M. [M] [J], tenant à la prétendue perte de chance d'avoir pu contracter à des conditions plus avantageuses et à la prétendue perte de chance de pouvoir vendre son bien à la valeur prétendument garantie initialement, ne s'étaient manifestés à M. [M] [J] qu'au mois de décembre 2019, soit neuf ans après la vente, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 2224 du code civil. »
Réponse de la Cour
8. La prescription de l'action de l'acquéreur fondée sur un manquement du vendeur à son obligation d'information ne court pas nécessairement à compter du jour de la vente mais, conformément à l'article 2224 du code civil, à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
9. La cour d'appel, devant laquelle M. [J] se prévalait d'une garantie de valeur du bien sur une période de dix ans, répondant aux conclusions des sociétés Marignan résidences et Omnium finance soutenant que l'acquéreur connaissait dès l'acte authentique de vente la valeur de son bien sur le marché immobilier et locatif, a retenu que le délai de prescription de cinq ans n'avait commencé à courir qu'à compter de la fin du dispositif Scellier en décembre 2019, date à laquelle M. [J] avait entrepris des démarches en vue de la mise en vente de son appartement.
10. Elle en a souverainement déduit, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, que M. [J] n'avait eu connaissance qu'à cette date des faits lui permettant d'agir, de sorte que son action n'était pas prescrite à la date de l'assignation.
11. Elle a, ainsi, légalement justifié sa décision.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
Condamne les sociétés Marignan résidences et Omnium finance aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes des sociétés et les condamne à payer à M. [J] la somme de 1 500 euros chacune ;
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