chambre civile 3
Audience publique du jeudi 4 février 2016
N° de pourvoi: 13-23.654 13-25.548 14-23.648 14-28.052
Non publié au bulletin Cassation partielle
M. Chauvin (président), président
Me Le Prado, SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Boutet-Hourdeaux, SCP Odent et Poulet, avocat(s)
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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Joint les pourvois n° U 14-23. 648, E 13-23. 654, P 13-25. 548 et F 14-28. 052 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 21 juin 2013), rendu sur renvoi après cassation (2e chambre, 4 décembre 2008, pourvoi n° 07-19. 872), que la caisse générale de sécurité sociale de la Martinique (CGSSM) a fait construire un immeuble de bureaux et a souscrit une police d'assurance dommages-ouvrage auprès de la société La Mutuelle du Mans assurances IARD (MMA) ; que le lot portant sur la climatisation a été attribué à la société Saga, assurée auprès de la société SMABTP, qui s'est approvisionnée en produits de calorifugeage auprès de la société Isolmat, assurée auprès de la MMA, qui a elle-même acquis des matériaux auprès de la société HGD, aux droits de laquelle vient la société Total Petrochemicals France ; que des désordres sont apparus dans le réseau de climatisation après réception de l'immeuble ; que la CGSSM a assigné, après expertise, la MMA, la société Saga et la SMABTP, la société bureau Veritas, contrôleur technique, MM. X... et Y..., architectes, la société Génipa, sous-traitant de la société Saga pour les travaux de calorifugeage, et la société Bet Scoop, bureau d'études sous-traitant des architectes pour le lot litigieux ; que, le 29 septembre 1997, la société Saga et la SMABTP ont appelé en garantie la société Gan, assurance des architectes, la société Isolmat et la MMA ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal de la société Isolmat et de la société MMA dans les pourvois n° U 14-23. 648, E 13-23. 654 :
Vu les articles 1792 et 1792-4 du code civil ;
Attendu que, pour déclarer la société Isolmat responsable et la condamner, avec la société MMA, à indemniser le maître d'ouvrage, l'arrêt retient que, le produit fourni par l'entreprise se trouvant incorporé à un immeuble, la garantie applicable est la garantie décennale et non celle due par le vendeur ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le vendeur de matériaux, qui n'est pas assimilé à un fabricant, n'est pas soumis à la garantie décennale, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident de la SMABTP et des sociétés Saga dans les pourvois n° U14-23. 648, E13-23. 654 et sur le troisième moyen du pourvoi principal et incident de la CGSSM n° P 13-25. 548, F 14-28. 052 et U 14-23. 648, réunis :
Vu l'article 1792 du code civil ;
Attendu que, pour mettre hors de cause MM. Y... et X..., l'arrêt retient que les architectes ont sous-traité au bureau d'études techniques Scoop le lot litigieux dans sa totalité et qu'aucun élément du dossier ne démontre qu'ils aient commis une faute ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'architecte, investi d'une mission complète de maîtrise d'oeuvre, est tenu envers le maître d'ouvrage d'une présomption de responsabilité dont il ne peut s'exonérer qu'en prouvant une cause étrangère qui ne peut provenir de l'action de son sous-traitant, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal et incident de la CGSSM dans les pourvois n° P 13-25. 548, F 14-28. 052, et U 14-23. 648, qui est recevable :
Vu les articles 1792, 1147 et 1203 du code civil ;
Attendu que l'arrêt retient que la responsabilité des désordres incombera au BET Scoop pour 40 %, à la société Saga et à la société Genipa pour 40 %, mais entre eux à 20 % chacun, et à la société Isolmat pour 20 % et que ces sociétés seront condamnées à la prise en charge de l'indemnisation du maître de l'ouvrage, à proportion de leurs parts respectives de responsabilité ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la CGSSM sollicitait une condamnation in solidum et que chaque responsable d'un même dommage doit être condamné à le réparer en totalité, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le deuxième moyen du pourvoi principal et incident de la CGSSM dans les pourvois n° P 13-25. 548, F 14-28. 052 et U 14-23. 648, qui est recevable :
Vu l'article L. 124-3 du code des assurances ;
Attendu que, pour condamner la SMABTP et la société MMA, l'arrêt retient que ces assureurs doivent garantir leurs assurés respectifs du montant des condamnations prononcées à leur encontre ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur et que la CGSSM demandait la condamnation in solidum des constructeurs et de leurs assurances, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
DIT n'y avoir lieu à mettre la société GAN hors de cause ;
Met hors de cause la société Bureau Veritas ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il retient la responsabilité de la société Isolmat sur le fondement décennal, met hors de cause les architectes X... et Y..., condamne la société Bet Scoop, la société Saga, la société Genipa et la société Isolmat à payer les sommes fixées à proportion de leurs parts de responsabilité et condamne la SMABTP et la société MMA à garantir leurs assurés du montant des condamnations prononcées à leur encontre, l'arrêt rendu le 21 juin 2013 par la cour d'appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
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