Pour en savoir plus : voir « Traité de la responsabilité des constructeurs », par A. CASTON, F.-X. AJACCIO, R. PORTE et M. TENDEIRO, 7ème édition (960 pages), septembre 2013, éd. « Le Moniteur », page 443.
Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 9 octobre 2013
N° de pourvoi: 12-13.390 12-14.644
Non publié au bulletin Rejet
Joint les pourvois n° C 12-13.390 et n° R 12-14.644 :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 12 décembre 2011), que le 29 mars 1991, le ministère de la défense a chargé de la reconstruction de l'hôpital militaire Percy, l'entreprise générale Chantiers modernes, ayant pour gérante la société Laine Delau et assurée par la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), qui a sous-traité les travaux de carrelage à la société OFT entreprises, assurée par la société Caisse générale d'assurances mutuelles, aujourd'hui représentée par son liquidateur, M. X... et son mandataire judiciaire, la société civile professionnelle Y... ; qu'après réception sans réserve le 4 octobre 1995, le maître de l'ouvrage, se plaignant de désordres des carrelages, a obtenu des juridictions administratives la condamnation de l'architecte et de la société Chantiers modernes à lui payer diverses sommes ; qu'après paiement par la société Laine Delau, celle-ci et la SMABTP ont agi en remboursement contre la société OFT entreprises qui a appelé en garantie son assureur ;
Sur le premier moyen du pourvoi N° C 12-13.390 de la société OFT entreprises et le premier moyen du pourvoi N° R 12-14.644 de M. X... et la société Philippe Y... en qualité de liquidateurs de la Caisse générale d'assurances mutuelles, réunis, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé, d'une part, que la société Laine Delau, associée de la société Chantiers modernes au sein d'une société en participation, chargée du suivi opérationnel et administratif du chantier avait effectué le paiement résultant de la condamnation prononcée contre son associée par la juridiction administrative au profit du maître de l'ouvrage et d'autre part, que la SMABTP justifiait avoir dédommagé son assurée, la cour d'appel, qui, sans être tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, en a exactement déduit que la société OFT entreprises devait être condamnée à garantir la société Laine Delau et la SMABTP des sommes qu'elles avaient déboursées, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Sur le second moyen du pourvoi N° C 12-13.390 de la société OFT entreprises et le second moyen du pourvoi N° R 12-14.644 de M. X... et de la société Y... en qualité de liquidateurs de la Caisse générale d'assurances mutuelles, réunis :
Attendu que la société OFT entreprises et M. X... et la société Philippe Y..., en qualité de liquidateurs de la Caisse générale d'assurances mutuelles font grief à l'arrêt de les condamner à garantir la société Chantiers modernes et/ou la société Laine Delau ainsi que toutes compagnies d'assurances qui leur seraient subrogées de l'intégralité des sommes mises à leur charge au profit de Chantiers modernes par les juridictions administratives, alors, selon le moyen :
1°/ que faute pour les juges du fond d'avoir identifié le fondement juridique de la condamnation de la société OFT entreprises, l'arrêt attaqué est dépourvu de base légale au regard des articles 12 et 455 du code de procédure civile ;
2°/ que, faute d'avoir recherché si à supposer qu'une condamnation ait été prononcée sur un fondement contractuel, le caractère apparent des désordres éventuels ne faisait pas obstacle à la demande, les juges du fond ont à tout le moins privé leur décision de base légale au regard des articles 1137 et 1147 du code civil ;
3°/ qu'à supposer que les juges du fond aient raisonné au regard des règles de la garantie décennale, faute d'avoir recherché si le caractère apparent des désordres, lors de la réception, ne faisait pas obstacle à la garantie décennale, les juges du fond ont à tout le moins privé leur décision de base légale au regard de l'article 1792 du code civil ;
4°/ que la cassation à intervenir sur le pourvoi de la société OFT Entreprises entraînera par voie de conséquence la cassation de l'arrêt en ce qu'il a dit acquise à la société OFT Entreprises la garantie de la compagnie CGAM pour partie du montant des condamnations prononcées à l'encontre de la société OFT Entreprises et fixé la créance de la société OFT Entreprises au passif de la CGAM à cette somme ;
5°/ que la cour d'appel ne pouvait, sans se contredire et priver son arrêt de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile, tout à la fois déduire des termes des décisions rendues par la juridiction administrative que la responsabilité de la société OFT entreprises et son engagement dans les désordres litigieux et refuser de tenir compte de ces mêmes décisions en ce qu'elles avaient estimé que ces désordres avaient fait l'objet de réserves lors de la réception, excluant, lors même que ces désordres étaient de nature décennale, que la garantie souscrite auprès de la CGAM par la société OFT entreprises puisse être mobilisées à leur endroit ;
6°/ qu'il résulte de l'ordre de service du 8 décembre 1995 et de la notification de levée de réserves du 20 mai 1996 que la réception était intervenue avec réserves portant notamment sur la planéité des sols ; qu'il résulte des ordres de service des 29 et 30 mars 1995 que dès cette date, le maître d'ouvrage avait exigé le remplacement complet des carrelages et des ordres de service des 21 et 27 mars 1996, signalant l'existence du décollement des carrelages, que c'est dans le cadre de la garantie de parfait achèvement que la reprise de ces décollements avaient été exigée ; que la cour d'appel ne pouvait dès lors affirmer, de façon générale que la réception était intervenue sans réserves, et de façon plus particulière qu'elle était intervenue sans réserves portant sur les décollements du carrelage, sans dénaturer, en violation de l'article 1134 du code civil, les ordres de service précités dont il résultait que la réception était intervenue avec des réserves, et avec notamment des réserves portant sur les carrelages, sans que puissent en être exclus les décollements litigieux ;
Mais attendu, d'une part, que le premier moyen de la société OFT entreprises étant rejeté, le moyen en ce qu'il invoque une cassation par voie de conséquence est sans objet ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant souverainement retenu, sans dénaturation, que le décollement du carrelage fourni et posé par la société OFT entreprises était postérieur à la réception, compromettait la solidité de l'ouvrage et l'affectait dans un de ses éléments constitutifs en le rendant impropre à sa destination, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes et qui a pu retenir, sans être liée par les constatations des juridictions administratives, que le désordre des carrelages avait une nature décennale et que la société OFT entreprises, sous-traitante de la société Chantiers modernes avait manqué à son obligation de résultat, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société OFT entreprises, M. X... et la société Philippe Y..., en qualité de liquidateurs de la Caisse générale d'assurances mutuelles, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société OFT entreprises, M. X... et la société Philippe Y..., en qualité de liquidateurs de la Caisse générale d'assurances mutuelles, à payer ensemble : à la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP) la somme de 3 000 euros, à la société Vinci construction, venant aux droits de la société Chantiers modernes et la société Laine Delau, ensemble la somme de 3 000 euros ; rejette les demandes de la société Oft entreprises, de M. X... et de la société Philippe Y... en qualité de liquidateurs de la Caisse générale d'assurances mutuelles ;
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