Cour de cassation

chambre civile 1

Audience publique du mercredi 19 juin 2013

N° de pourvoi: 12-15.880

Non publié au bulletin Rejet

Attendu , selon l'arrêt attaqué (Douai , 16 novembre 2011), que la société Entreprise X... prétendant que Mme Y... lui avait demandé de réaliser, à son domicile, des travaux de peinture dont elle avait surveillé la réalisation, a assigné cette dernière en paiement ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que la société Entreprise X... fait grief à l'arrêt confirmatif de la débouter de l'ensemble de ses demandes de condamnation de Mme Y..., alors, selon le moyen :

1°/ que le propriétaire de l'immeuble, qui a bénéficié des travaux réalisés sous sa conduite et acceptés par lui sans réserve, est présumé les avoir commandés ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la société X..., en septembre 2006, a réalisé des travaux de peinture dans la maison louée et finalement acquise par Mme Y... ; que celle-ci, seule, a accueilli et guidé l'ouvrier notamment pour le choix de la couleur, et que, dans un premier temps, elle n'a pas protesté à la réception des demandes en paiement lui ayant été adressées ; qu'il était tout aussi constant que Mme Y..., loin de nier l'existence du contrat d'entreprise et de son contenu -la réalisation de travaux de peinture-, a seulement soutenu que la commande avait été passée non par elle-même mais par son ancien compagnon, M. Z... ; qu'en reprochant à la société X... de ne pas rapporter la preuve que les travaux litigieux lui avaient été commandés par Mme Y..., la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1315 du code civil ;

2°/ que celui qui accepte les travaux est débiteur de leur prix quand bien même ne les aurait-il pas personnellement commandés ; qu'en l'espèce, il n'était pas contesté que les travaux réalisés chez Mme Y..., locataire puis propriétaire de la maison, ont été acceptés par celle-ci ; qu'en déboutant cependant la société X... de sa demande en paiement par cela seul qu'elle n'établissait pas que Mme Y... en avait initialement passé commande, la cour d'appel a violé les articles 1134, 1315 et 1710 du code civil ;

3°/ que le maître de l'ouvrage, cocontractant redevable du prix, est celui pour qui la prestation est accomplie et celui qui commande l'ouvrier ; que le locataire puis propriétaire d'un immeuble dans lequel des travaux ont été réalisés, sous son autorité, sans que ni la réalité ni le contenu du contrat d'entreprise soit discuté, et tandis que ces travaux ont été acceptés, doit acquitter le prix réclamé par l'entrepreneur sans pouvoir utilement opposer à ce dernier les arrangements intervenus dans le cadre d'un concubinage ni prétendre que la commande -au sens de sollicitation de l'entrepreneur- aurait initialement émané d'une autre personne et notamment de son concubin ; qu'en permettant à Mme Y..., locataire puis propriétaire de la maison dans laquelle les travaux ont été réalisés par la société X..., sous son seul contrôle, et donc sous sa commande, et dont ni la réalité ni le caractère satisfactoire n'ont été contestés, d'échapper au paiement du prix de ces travaux au seul motif qu'il n'est pas exclu que son ancien compagnon, M. Z..., ait initialement passé commande de ces derniers, en ce sens qu'il avait sollicité les services de la société X..., la cour d'appel a violé les articles 1101, 1134 et 1710 du code civil ;

Mais attendu qu'après avoir constaté, par motifs propres et adoptés , que le devis produit n'était pas signé de Mme Y..., et relevé que l'absence de toute protestation de cette dernière à la réception de la facture ne suffisait pas à établir l'effectivité du contrat, la cour d'appel, a, sans inverser la charge de la preuve et par une appréciation souveraine de la portée des éléments de preuve versés aux débats, estimé que la société Entreprise X... n'établissait pas que Mme Y... eût été engagée à son égard par un contrat d'entreprise ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société Entreprise X... fait reproche à l'arrêt de rejeter l'ensemble de ses prétentions, alors, selon le moyen, que le bénéficiaire d'un enrichissement ne peut opposer à l'appauvri le contrat conclu avec un tiers , l'appauvri ne disposant d'aucune action contractuelle contre l'enrichi ; qu'en considérant que la société Entreprise X... ne pouvait agir contre Mme Y... sur le terrain de l'enrichissement sans cause , la demande étant fondée à titre principal sur l'exécution d'un contrat , après avoir pourtant constaté que Mme Y... n'était pas partie au contrat d'entreprise et que la société Entreprise X... ne pouvait agir en exécution de celui-ci, la cour d'appel n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences en résultant et a violé l'article 1371 du code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel ayant constaté que la société Entreprise X... ne rapportait pas la preuve de l'existence d'un contrat d'entreprise conclu avec Mme Y..., lequel constituait le fondement de son action principale, en a exactement déduit qu'elle ne pouvait pallier sa carence dans l'administration d'une telle preuve par l‘exercice d'une action subsidiaire fondée sur l'enrichissement sans cause ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Entreprise X... aux dépens ;

Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette les demandes ;