Cet arrêt est commenté par :

- M. ROUSSEL, REVUE GENERALE DU DROIT DES ASSURANCES RGDA, 2013, p. 1000.

Cour de cassation

chambre civile 2

Audience publique du jeudi 13 juin 2013

N° de pourvoi: 12-22.207

Non publié au bulletin Cassation

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Marie-Thérèse X..., épouse Y..., et sa fille, Mme Delphine Y..., après avoir hérité d'un important portefeuille d'actions d'un groupe industriel, ont souhaité optimiser leur patrimoine d'un point de vue fiscal ; qu'elles ont en conséquence, sur les conseils d'un avocat fiscaliste et d'un notaire, confié l'étude de ce projet par lettre de mission du 12 octobre 1999 à un agent général d'assurance de la société Axa conseil, M. Z...; que le montage financier finalement conseillé a reposé sur la création d'une société civile de portefeuille soumise à l'impôt sur les sociétés, la société Delphidel, ayant pour associés Mme Y...et sa fille ; que cette société a par ailleurs souscrit le 8 décembre 1999 un emprunt de 6 707 756, 76 euros remboursable sur cinq ans auprès de la société Axa conseil finances, aux droits de laquelle vient la société Axa banque ; que cet emprunt était garanti par les cautions personnelles et solidaires des mêmes associées ainsi que par le nantissement de contrats d'assurance sur la vie ; que les sommes empruntées ont été versées sur deux contrats d'assurance sur la vie souscrits par l'Association générale interprofessionnelle de prévoyance et d'investissement (AGIPI) auprès de la société Axa France vie, venue aux droits de la société Axa conseil, et auxquels Mmes Y...se trouvaient avoir déjà adhéré ; que le prêt a été intégralement remboursé fin décembre 2004 ; qu'estimant que l'opération conseillée et le choix de gestion réalisé n'avaient pas rempli les objectifs recherchés de stabilisation et d'optimisation fiscale de leur patrimoine, Mmes Y...ont assigné en responsabilité et indemnisation les sociétés Axa gestion privée, Axa banque, Axa conseil et AGIPI pour manquement à leur obligation d'information et à leur devoir de conseil ;

Attendu que les cinquième et sixième branche du moyen ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles 4, 5 et 16 du code de procédure civile ;

Attendu que pour débouter Mmes Y...de leur demande tendant à ce que la société Axa banque, la société Axa France vie et l'association AGIPI soient condamnées à leur verser des dommages-intérêts, l'arrêt énonce qu'il ressort des éléments du dossier que Mme Y...a, le 12 octobre 1999, établi une lettre de mission au bénéfice d'un agent général d'assurance d'Axa conseil, M. Z..., pour demander à ce dernier de réaliser pour son compte un travail de réflexion et d'analyse visant à l'optimisation fiscale et successorale de son patrimoine ; que, partant, nonobstant sa qualité d'agent général de la société Axa conseil, devenu Axa France vie, M. Z...est en réalité, dans les circonstances de la présente espèce, vis-à-vis de l'entreprise qu'il représente normalement à l'égard du public, mandataire de Mme Y..., dès lors que celle-ci lui a demandé un renseignement personnalisé ;

Qu'en statuant ainsi, sans inviter les parties à s'expliquer sur le moyen tiré de ce que M. Z...aurait agi comme mandataire de la cliente et non comme mandataire de l'assureur, alors qu'aucune des parties n'avait soulevé ce moyen, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu les articles L. 511-1 et R. 511-1 du code des assurances, dans leur rédaction alors applicable ;

Attendu que pour statuer comme il l'a fait, l'arrêt énonce que M. Z...est en réalité, dans les circonstances de la présente espèce, vis-à-vis de l'entreprise qu'il représente normalement à l'égard du public, mandataire de Mme Y...dès lors que celle-ci lui a demandé un renseignement personnalisé ;

Qu'en statuant ainsi, par un tel motif inopérant, alors que l'agent général d'une société d'assurance agit dans l'exercice de ses fonctions de mandataire rémunéré de cette société quand il met à la disposition du public sa compétence technique en vue de la recherche et de la souscription des contrats présentés par sa société les mieux adaptés à la situation et aux objectifs de son client, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les troisième et quatrième branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 avril 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Condamne la société Axa France vie et la société AGIPI aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de la société Axa France vie, de l'association AGIPI et de la société Axa banque, condamne la société Axa France vie et l'association AGIPI à payer à Mmes Y...la somme globale de 3 000 euros ;