COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE BORDEAUX.

4ème Chambre

PLEIN CONTENTIEUX

N° 11BX02414

6 juin 2013.

Inédite au recueil Lebon.

Vu la requête, enregistrée le 31 août 2011 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 5 septembre 2011, présentée pour la société Betem Ingénierie, société anonyme dont le siège est 6 impasse Alphonse Bremond à Toulouse (31000), représentée par ses représentants légaux, par MeB... ;

La société Betem Ingénierie demande à la cour :

1º) d'annuler le jugement nº 0601195 du 1er juillet 2011 du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'après l'avoir condamnée solidairement avec MM.D..., C...et A...et la société Coste Frères à payer à la région Midi-Pyrénées, d'une part, la somme de 341 494,48 euros en réparation des désordres affectant le parking inférieur du lycée professionnel de Saint-Affrique, assortie des intérêts de droit à compter du 27 mars 2006, avec capitalisation de ces intérêts à compter du 27 mars 2007 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date, et, d'autre part les frais et honoraires de l'expert liquidés et taxés à la somme de 53 797,50 euros, le tribunal a décidé qu'elle supporterait la charge finale des sommes précitées à concurrence de 20% ;

2º) de condamner la société Coste Frères à la garantir de l'intégralité des condamnations mises à sa charge ;

3º) de mettre à la charge de la société Coste Frères la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

1. Considérant que dans le cadre des travaux d'extension du lycée professionnel de Saint-Affrique, la COGEMIP, en sa qualité de maître d'ouvrage délégué de la région Midi-Pyrénées, a confié, par acte d'engagement du 5 octobre 2000, la maîtrise d'oeuvre de la construction d'un parking, dit " parking inférieur ", à un groupement composé de M.D..., mandataire du groupement, de MM. C...etA..., architectes, et de la société Betem Ingénierie, bureau d'études techniques ; que suivant acte d'engagement du 1er août 2001, la région Midi-Pyrénées a confié à un groupement d'entreprises solidaires composé des sociétés Coste Frères, Sevigné et Reynaud Caminade l'exécution du lot nº 1 relatif aux travaux de terrassement ; que la réception des travaux a été prononcée le 3 décembre 2002 avec effet au 28 aout 2002 ; que des désordres affectant les sols de l'ouvrage ayant été constatés, la région a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, qui a désigné un expert par ordonnance du 26 mars 2003 ; que l'expert a rendu son rapport le 18 juillet 2005 ; que, saisi par la région Midi-Pyrénées sur le fondement de la garantie décennale, le tribunal administratif de Toulouse, dans le jugement attaqué, a condamné solidairement la société Coste frères et le groupement de maîtrise d'oeuvre à payer à la région Midi-Pyrénées les sommes, de 341 494,48 euros au titre du préjudice subi et de 53 797,50 euros au titre des frais de l'expertise ; que la société Betem Ingénierie relève appel de ce jugement en tant que, statuant sur les conclusions d'appel en garantie, le tribunal a jugé que la charge finale de ces sommes sera supportée à concurrence de 20 % par les membres du groupement de maîtrise d'oeuvre ;

Sur la charge finale de l'indemnité accordée à la région Midi-Pyrénées :

2. Considérant qu'il est constant que les désordres affectant le parking inférieur du lycée professionnel ont pour origine l'utilisation par la société Coste Frères, en dépit des stipulations du cahier des clauses techniques particulières (CCTP), de matériaux de remblais non traités à la chaux ; qu'il résulte de l'instruction que, par courrier du 9 octobre 2001, la société Betem Ingénierie a mis en demeure la société Coste Frères de lui communiquer sous vingt-quatre heures les plans d'exécution, notes de calcul et plans de contrôle des ouvrages, sous peine d'interruption du chantier à ses frais ; que devant l'insuffisance des éléments communiqués, la société Betem Ingénierie, par courrier du 6 décembre 2001, a informé la société Coste Frères qu'elle avait pris les dispositions nécessaires pour réaliser des essais et lui a transmis les résultats ainsi que le pré-rapport d'analyse du Centre expérimental de recherches et d'études du bâtiment et des travaux publics du 29 novembre 2001, qui conclut que les remblais n'ont pas été réalisés selon la méthode préconisée par le CCTP ; que par ordre de service nº 7 du 22 janvier 2002, la COGEMIP a mis en demeure la Société Coste Frères de se conformer à ses obligations contractuelles ; qu'ainsi, malgré les diligences de la maîtrise d'oeuvre, la société Coste Frères a constamment refusé de se conformer aux prescriptions du CCTP ; que, dès lors, en l'absence de faute caractérisée et d'une suffisante gravité de sa part dans la mission de surveillance qui lui incombe, la société Betem Ingénierie est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse l'a condamnée, avec MM.D..., C...etA..., à garantir la société Coste Frères à hauteur de 20 % des condamnations prononcées ; qu'il y a lieu, par suite, de condamner la société Coste Frères à garantir la société Betem Ingénierie de l'intégralité des condamnations prononcées par le tribunal administratif de Toulouse ;

Sur les appels provoqués :

3. Considérant, en premier lieu, que les conclusions de la société Coste Frères tendent à l'annulation du jugement du 1er juillet 2011 en tant qu'il a engagé la responsabilité décennale des constructeurs ; qu'elles portent ainsi sur un litige distinct de celui soulevé par l'appel principal, relatif au partage de responsabilité effectué par le tribunal de Toulouse entre la société Coste Frères et le groupement de maîtrise d'oeuvre et ne sont, dès lors, par recevables ; que pour les mêmes motifs, les conclusions de MM.D..., C...et A...tendant à ce que la cour limite le montant de la condamnation prononcée par les premiers juges sont également irrecevables ;

4. Considérant, en second lieu, que les conclusions de MM.D..., C...etA..., tendant à ce que la cour condamne la société Coste Frères à les garantir intégralement des condamnations prononcées sont recevables, dès lors que leur situation est aggravée par l'admission des conclusions de l'appelant principal ; que, pour les raisons énoncées au point 2, il y a lieu de condamner la société Coste Frères à les garantir de l'intégralité des condamnations prononcées par le tribunal administratif de Toulouse ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Coste Frères la somme de 1 000 euros au profit de la société Betem Ingénierie et de 1 000 euros au profit de MM. D..., C... etA... ; qu'il y a lieu, en revanche, de rejeter les conclusions présentées sur ce fondement par la société Coste Frères, la région Midi-Pyrénées et la société Sévigné ;

DÉCIDE :

Article 1er : La société Coste Frères est condamnée à garantir la société Betem Ingénierie et MM.D..., C...et A...de l'intégralité des condamnations prononcées à leur encontre par le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 1er juillet 2011.

Article 2 : Les conclusions d'appel provoqué présentées par la société Coste Frères sont rejetées.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : La société Coste Frères versera au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 000 euros d'une part à la société Betem Ingénierie, d'autre part à MM.D..., C...et A....

Article 5 : Les conclusions présentées par la région Midi-Pyrénées, la société Sévigné et la société Coste Frères tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrativesont rejetées.