Cet arrêt est commenté par :
- M. BASCOULERGUE, SJ G, 2013, p. 605.
Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du mardi 15 janvier 2013
N° de pourvoi: 11-28.173
Publié au bulletin Cassation partielle
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 225-35 du code de commerce ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que seuls doivent faire l'objet d'une autorisation du conseil d'administration les engagements souscrits par la société en garantie des obligations pesant sur un tiers ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Air horizons et la société anonyme Star Airlines, devenue la société XL Airways, ayant l'une et l'autre pour activité le transport aérien de passagers, ont, le 2 août 2005, conclu avec la société Marmara, voyagiste, un contrat d'affrètement long et moyen courrier prévoyant notamment que la société Air horizons fournirait des avions afin d'assurer les vols avec l'Egypte ; qu'il était convenu que la société Marmara réglerait l'intégralité des prestations à la société XL Airways, celle-ci devant rétrocéder à la société Air horizons la part lui revenant ; que le 22 septembre 2005, la société Banque Safra (la banque) a accordé une ouverture de crédit à la société Air Horizons afin de lui permettre de faire face aux obligations résultant du contrat d'affrètement ; que, le même jour, ont été conclues une convention de nantissement d'un compte de dépôt à terme par la société XL Airways au profit de la banque, ayant pour objet de garantir le paiement des sommes dues à celle-ci par la société Air horizons au titre de l'ouverture de crédit, et une convention de délégation de créance par laquelle la société XL Airways, débitrice de la société Air horizons, s'obligeait à payer à la banque les sommes dues à celle-ci au titre de l'ouverture de crédit ; que la société Air horizons ayant été mise en redressement puis en liquidation judiciaires, la banque a déclaré la créance née du contrat de crédit ; qu'elle a ensuite réalisé le nantissement ; que, faisant valoir que cette sûreté lui était inopposable en l'absence d'autorisation de son conseil d'administration, la société XL Airways a fait assigner la banque afin d'obtenir la restitution de la somme ainsi perçue ; que le premier juge ayant accueilli cette demande, la banque a soutenu, en cause d'appel, qu'elle était en droit de conserver la somme litigieuse sur le fondement de la convention de délégation de créance ; que la société XL Airways a alors demandé que celle-ci lui soit également déclarée inopposable faute d'autorisation du conseil d'administration ;
Attendu que pour accueillir cette demande et condamner, en conséquence, la banque à restituer à la société XL Airways la somme de 3 223 855 euros, l'arrêt, après avoir relevé que le crédit consenti par la banque à la société Air horizons l'avait été sous la condition de constitution au profit du prêteur de "sûretés", à savoir le nantissement d'un compte de dépôt à terme par la société XL Airways et une délégation de créance qualifiée d'imparfaite, retient qu'il ne peut être contesté que celle-ci s'analyse en une garantie ; qu'il ajoute qu'il est démontré par les stipulations du contrat d'affrètement que le transporteur et le transporteur de substitution avaient chacun leurs obligations propres et que le premier a garanti les obligations du second ; qu'il constate, ensuite, qu'il est démontré qu'il n'existe pas de délibération du conseil d'administration de la société XL Airways, de caractère général, dans les limites légales, ou spéciale, autorisant son président-directeur général à constituer une garantie ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il ne résultait pas des stipulations de la convention de délégation de créance que la société XL Airways ne s'était obligée envers la banque qu'à concurrence du montant des sommes par elle dues à la société Air horizons au titre du contrat d'affrètement, de sorte que l'engagement ainsi contracté par le délégué ne constituait, à son égard, qu'un mode d'extinction de sa propre dette envers le délégant, échappant aux prévisions du texte susvisé, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du premier moyen, non plus que sur les deuxième et troisième moyens :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a rejeté la demande de la société XL Airways tendant à l'irrecevabilité du moyen fondé sur l'existence d'une convention de délégation de créance et confirmé le jugement en ce qu'il a déclaré la convention de nantissement inopposable à la société XL Airways l'arrêt rendu entre les parties, le 20 octobre 2011, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties en l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société XL Airways aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 2 500 euros à la société Banque Safra ; rejette sa demande ;
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