La décision d'ordonner une médiation interrompt les délais impartis pour conclure et former appel incident

 

Cour de cassation - Chambre civile 2

  • N° de pourvoi : 21-23.099
  • ECLI:FR:CCASS:2023:C201157
  • Publié au bulletin
  • Solution : Cassation partielle

Audience publique du jeudi 23 novembre 2023

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, du 22 juillet 2021

Président

Mme Martinel

Avocat(s)

Me Isabelle Galy, SCP Gaschignard, Loiseau et Massignon, SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
 

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

FD



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 23 novembre 2023




Cassation partielle


Mme MARTINEL, président



Arrêt n° 1157 F-B

Pourvoi n° S 21-23.099




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 23 NOVEMBRE 2023

1°/ la société Carmin finance, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],

2°/ la société Glibro Investments Limited, dont le siège est [Adresse 3] (Irlande),

ont formé le pourvoi n° S 21-23.099 contre l'arrêt rendu le 22 juillet 2021 par la cour d'appel de Toulouse (3e chambre), dans le litige les opposant à la société BJ Invest, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Jollec, conseiller référendaire, les observations de Me Isabelle Galy, avocat des sociétés Carmin finance et Glibro Investments Limited, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société BJ Invest, et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 10 octobre 2023 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Jollec, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 22 juillet 2021), par déclaration du 16 janvier 2019, les sociétés Carmin finance et Glibro Investments Limited ont relevé appel d'un jugement dans une instance les opposant à la société BJ Invest.

2. Par ordonnance du 4 avril 2019, le conseiller de la mise en état a ordonné une médiation expirant au 23 août 2019, prolongée jusqu'au 23 novembre 2019 par ordonnance du 13 août 2019.

3. Par une lettre du 25 novembre 2019, reçue au greffe le 28 novembre 2019, le médiateur a indiqué que les parties n'étaient pas parvenues à un accord et par ordonnance du 5 décembre 2019, le conseiller de la mise en état a constaté la fin de la mission du médiateur.

4. La société BJ Invest a soulevé devant le conseiller de la mise en état la caducité de la déclaration d'appel des sociétés Carmin finance et Glibro Investments Limited au motif que leurs conclusions n'avaient pas été déposées dans le délai prévu à l'article 908 du code de procédure civile.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. La société Carmin finance et la société Glibro Investments Limited font grief à l'arrêt de prononcer la caducité de la déclaration d'appel du 16 janvier 2019 à l'égard de la société Carmin finance, alors « que le délai de trois mois imparti à l'appelant pour conclure, interrompu par la décision ordonnant une médiation jusqu'à l'expiration de la mission du médiateur par application de l'article 910-2 du code de procédure civile, recommence à courir à compter de la décision du juge constatant la fin de la médiation ; que la date de fin de mission fixée par la décision ordonnant ou prolongeant cette mesure est celle à laquelle le médiateur est tenu d'informer le juge par écrit du résultat de sa mission par application de l'article 131-11 du code de procédure civile, et ne fait pas courir de nouveau de plein droit les délais impartis aux parties pour conclure ; qu'en retenant que le délai imparti aux appelantes pour conclure avait recommencé à courir à compter du 23 novembre 2019, date de fin de mission fixée par la décision de prolongation de médiation du 13 août 2019, et non à compter de l'ordonnance du 5 décembre 2019 constatant la fin de la médiation, la cour d'appel a violé les textes susvisés. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 910-2 du code de procédure civile, dans sa version issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 :

6. Selon ce texte, la décision d'ordonner une médiation interrompt les délais impartis pour conclure et former appel incident mentionnés aux articles 905-2 et 908 à 910 du même code. L'interruption de ces délais produit ses effets jusqu'à l'expiration de la mission du médiateur.

7. Il en résulte que la date de la fin de mission du médiateur constitue le point de départ du délai pour conclure, à moins qu'une ordonnance d'un juge ne constate l'échec ou la fin de la médiation.

8. Pour déclarer caduque la déclaration d'appel du 16 janvier 2019 à l'encontre de la société Carmin finance, l'arrêt relève que l'ordonnance du conseiller de la mise en état qui constatait l'échec de la médiation n'avait eu aucun effet sur la fin de la mission du conciliateur qu'elle n'avait fait que constater comme résultant de l'arrivée au terme de la mission prévu par l'ordonnance du 13 août 2019 ayant prolongé la mission du médiateur jusqu'au 23 novembre 2019.

9. L'arrêt en déduit que l'ordonnance du 13 août 2019, en ce qu'elle a fixé le terme de la mission au 23 novembre 2019, a mis fin à la mission du conciliateur à cette date et que la société Carmin finance n'avait pas conclu dans le délai de trois mois prévu à l'article 908 du code de procédure civile, qui courait à compter du 23 novembre 2019.

10. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce, d'une part, qu'il confirme l'ordonnance déférée en ce qu'elle a prononcé la caducité de la déclaration d'appel du 16 janvier 2019, mais uniquement à l'encontre de la société Carmin finance et a condamné cette seule société aux dépens de première instance et en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et en ce, d'autre part, qu'il condamne la société Carmin finance à payer à la société BJ Invest la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et condamne la société Carmin finance aux dépens, l'arrêt rendu le 22 juillet 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse, autrement composée ;

Condamne la société BJ Invest aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société BJ Invest et la condamne à payer aux sociétés Carmin finance et Glibro Investments Limited la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois novembre deux mille vingt-trois.ECLI:FR:CCASS:2023:C201157

Analyse

  •  Titrages et résumés

Publié par ALBERT CASTON à 17:20  

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