L'interruption est non avenue si le demandeur se désiste de sa demande ou laisse périmer l'instance, ou si sa demande est définitivement rejetée.

 

Cour de cassation - Chambre civile 2

  • N° de pourvoi : 21-24.137
  • ECLI:FR:CCASS:2023:C201266
  • Non publié au bulletin
  • Solution : Cassation sans renvoi

Audience publique du jeudi 21 décembre 2023

Décision attaquée : Cour d'appel de Nimes, du 09 septembre 2021

Président

Mme Martinel (président)

Avocat(s)

SCP Gury & Maitre, SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
 

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

FD



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 21 décembre 2023




Cassation sans renvoi


Mme MARTINEL, président



Arrêt n° 1266 F-D

Pourvoi n° V 21-24.137




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 DÉCEMBRE 2023

La société Grangeon & Fils, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° V 21-24.137 contre l'arrêt rendu le 9 septembre 2021 par la cour d'appel de Nîmes (2e chambre, section A), dans le litige l'opposant à la société [Adresse 1], société civile d'exploitation agricole, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bohnert, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gury & Maitre, avocat de la société Grangeon & Fils, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société [Adresse 1], et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 novembre 2023 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Bohnert, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 9 septembre 2021), estimant que la société Grangeon & Fils s'était maintenue dans les lieux sur lesquels elle lui avait concédé des contrats de forage au delà de leur terme, la société [Adresse 1] l'a assignée en référé en paiement d'une provision à valoir sur l'indemnité d'occupation.

2. Le juge des référés s'étant déclaré incompétent en raison de l'existence d'une contestation sérieuse, la société Grangeon & Fils a saisi le tribunal de grande instance au fond.

3. La société Grangeon & Fils a soulevé l'irrecevabilité de la demande en raison de la prescription.

4. Par ordonnance du 19 janvier 2021, le juge de la mise en état a rejeté cette fin de non recevoir.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. La société Grangeon & Fils fait grief à l'arrêt de la débouter de sa fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes formées par la société [Adresse 1] pour la période du 1er septembre 2014 au 11 mars 2015, alors « que si la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription, l'interruption est regardée comme non avenue si la demande est rejetée et qu'en se déclarant incompétent en raison de l'existence d'une contestation sérieuse, le juge des référés statue sur la demande, de sorte que sa décision rend non avenue l'interruption de prescription résultant de l'assignation en référé ; qu'en décidant que l'assignation en référé délivrée le 22 août 2019 constitue un acte interruptif de prescription jusqu'à l'ordonnance de référé intervenue le 18 décembre 2019 conformément à l'article 2242 du code civil, date à laquelle un nouveau délai de cinq ans court selon l'article 2231 du code civil, quand il résulte de ses propres constatations qu'aux termes de son ordonnance du 18 décembre 2019, le juge des référés s'était déclaré incompétent au profit du juge du fond à raison d'une contestation sérieuse, de sorte que l'assignation en référé délivrée le 22 août 2019 avait perdu son effet interruptif de prescription, la cour, qui a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 2243 du code civil par refus d'application. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 2241 et 2243 du code civil :

6. Selon le premier de ces textes, la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion. Selon le second, l'interruption est non avenue si le demandeur se désiste de sa demande ou laisse périmer l'instance, ou si sa demande est définitivement rejetée.

7. Pour confirmer l'ordonnance du juge de la mise en état et rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes en paiement d'une indemnité d'occupation du 1er septembre 2014 au 11 mars 2015, l'arrêt retient que l'assignation en référé délivrée le 22 août 2019 constitue un acte interruptif de prescription jusqu'à l'ordonnance de référé intervenue le 18 décembre 2019, date à laquelle un nouveau délai de cinq ans court selon l'article 2231 du code civil.

8. En statuant ainsi, alors qu'en se déclarant incompétent en raison de l'existence d'une contestation sérieuse, le juge des référés a définitivement rejeté la demande de référé, la cour d'appel, qui ne pouvait que constater que cette décision rendait non avenue l'interruption de prescription résultant de l'assignation en référé, a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

9. Tel que suggéré par la société Grangeon & Fils, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

10. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

11.Il résulte de ce qui est dit aux paragraphes 6 et 7 que l'ordonnance du juge des référés a rendu non avenue l'interruption de prescription résultant de l'assignation en référé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 septembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Infirme l'ordonnance du juge de la mise en état du 19 janvier 2021 ;

DECLARE prescrite, pour la période du 1er septembre 2014 au 11 mars 2015, l'action de la société [Adresse 1] en paiement d'une indemnité d'occupation pour la période du 1er septembre 2014 au 7 mai 2015 ;

Condamne la société [Adresse 1] aux dépens, en ce compris ceux exposés devant la cour d'appel ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société [Adresse 1] et la condamne à payer à la société Grangeon & Fils la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un décembre deux mille vingt-trois.ECLI:FR:CCASS:2023:C201266

Publié par ALBERT CASTON à 14:27  

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