L'action récursoire d'un responsable contre l'assureur de responsabilité d'un co-responsable se prescrit selon les mêmes règles que celles applicables à l'action récursoire contre cet autre responsable

 

Cour de cassation - Chambre civile 3

  • N° de pourvoi : 22-20.555
  • ECLI:FR:CCASS:2024:C300132
  • Publié au bulletin
  • Solution : Rejet

Audience publique du jeudi 07 mars 2024

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, du 14 juin 2022

Président

Mme Teiller

Avocat(s)

SCP Boutet et Hourdeaux, SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, SCP L. Poulet-Odent

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
 

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 7 mars 2024




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 132 FS-B

Pourvoi n° X 22-20.555







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 7 MARS 2024

La société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3], agissant en sa qualité d'assureur de l'entreprise [N] [W], a formé le pourvoi n° X 22-20.555 contre l'arrêt rendu le 14 juin 2022 par la cour d'appel de Caen (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à la Mutuelle des architectes français, dont le siège est [Adresse 2], prise en sa qualité d'assureur de la société [X] et [S] [B] 2 architectes,

2°/ à la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), dont le siège est [Adresse 4], prise en sa qualité d'assureur de la société Isigny peinture,

3°/ à la société MMA IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Axa France IARD, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société MMA IARD, de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la Mutuelle des architectes français, de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics, et l'avis de M. Burgaud, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 23 janvier 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Delbano, conseiller doyen, MM. Boyer, Pety, Brillet, Mme Pic, conseillers, Mmes Djikpa, Brun, Vernimmen, Rat, conseillers référendaires, M. Burgaud, avocat général référendaire, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Caen, 14 juin 2022), le département du Calvados a fait réaliser en 2001 des travaux d'extension et de restructuration d'un collège. La maîtrise d'oeuvre a été confiée à la société [X] et [S] [B] 2 architectes (l'architecte), assurée auprès de la Mutuelle des architectes français (la MAF).

2. Les travaux ont été confiés notamment :

- à la société Noyon, assurée auprès de la société MMA IARD pour le lot métallerie-serrurerie ;
- à la société Isigny peinture, assurée auprès de la SMABTP, pour le lot peinture et menuiseries extérieures ;
- à M. [W], assuré auprès de la société Axa France IARD (la société Axa), pour le lot revêtements de sol en carrelage ;
- à la société Veritas pour le contrôle technique.

3. Par jugement du 2 novembre 2010, un tribunal administratif a condamné solidairement l'architecte, Mme [T], prise en sa qualité de liquidateur de la société Noyon, la société Isigny peinture, M. [W] et la société Veritas à payer diverses sommes au département du Calvados.

4. En octobre 2013 et mai 2014, la MAF a réglé certaines sommes en exécution des condamnations prononcées contre son assurée. Les 11 et 12 janvier 2016, elle a assigné les sociétés MMA IARD, SMABTP et Axa en remboursement des sommes versées au-delà de la part de son assurée.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. La société Axa fait grief à l'arrêt de rejeter sa fin de non-recevoir tirée de la prescription, alors « que l'assureur qui a payé la totalité de la dette solidaire de son assuré, subrogé dans les droits de ce dernier, est forclos pour exercer l'action en contribution contre l'assureur de responsabilité du codébiteur solidaire ¿ son assuré ¿ lorsqu'il n'est plus exposé au recours de ce dernier ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que par un jugement du tribunal administratif de Caen en date du 16 novembre 2010, l'entreprise [W] a été condamnée à garantir la société [X] et [S] [B] 2 architectes, à hauteur de 80 % des condamnations mises solidairement à leur charge par les articles 2, 3 et 4 du jugement au profit du département du Calvados ; qu'il résulte encore des constatations de l'arrêt que la MAF, assureur de la société [X] et [S] [B] 2 architectes, a payé ès qualités (octobre 2013 et mai 2014), la totalité de la condamnation solidaire prononcée à l'encontre de son assurée, de sorte qu'elle était subrogée dans les droits de celle-ci en vertu de l'article L. 121-12 du code des assurances, ce qui fondait son action à l'encontre de la société Axa France IARD, assureur de l'entreprise [W] ; qu'en retenant que l'action en contribution de la MAF n'était pas prescrite contre la société Axa France IARD puisque la prescription applicable au recours entre coobligés était la prescription de droit commun de l'article 2224 du code civil commençant à courir à la date des payements faits par la MAF, de sorte qu'à la date de l'assignation de la société Axa France IARD (janvier 2016), son action n'était pas prescrite, sans constater qu'à la date de l'assignation de la MAF, la société Axa France IARD était toujours exposée au recours de son assurée, l'entreprise [W], ce qui était expressément contesté, la cour d'appel a violé les articles 2224 du code civil, L. 110-4 du code de commerce et L. 114-1 du code des assurances. »

Réponse de la Cour

6. L'action récursoire d'un responsable contre l'assureur de responsabilité d'un co-responsable se prescrit selon les mêmes règles que celles applicables à l'action récursoire contre cet autre responsable.

7. En conséquence, l'action récursoire de l'assureur d'un constructeur, subrogé dans les droits de son assuré, contre l'assureur d'un autre constructeur n'est pas prescrite tant que le délai prévu à l'article 2224 du code civil n'est pas expiré, peu important que l'assureur ainsi recherché ne soit plus exposé au recours de son assuré, en raison de l'expiration de la prescription biennale de l'article L. 114-1 du code des assurances.

8. Le moyen, qui postule le contraire, n'est pas fondé.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

9. La société Axa fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la MAF la somme en principal de 14 362,27 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 11 janvier 2016, et celle de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, alors « que la cassation qui interviendra du chef de la recevabilité de l'action critiquée par le premier moyen de cassation entraînera en application de l'article 624 du code de procédure civile, par voie de conséquence, la cassation du chef de la condamnation prononcée critiquée par le second moyen qui est dans sa dépendance. »

Réponse de la Cour

10. Le premier moyen étant rejeté, le grief, tiré d'une cassation par voie de conséquence, est devenu sans portée.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Axa France IARD aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille vingt-quatre.ECLI:FR:CCASS:2024:C300132

Analyse

  •  Titrages et résumés

Publié par ALBERT CASTON à 11:42  

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