Vente immobilière et obligation de délivrance

 

Cour de cassation - Chambre civile 3

  • N° de pourvoi : 23-17.751
  • ECLI:FR:CCASS:2025:C300389
  • Non publié au bulletin
  • Solution : Cassation

Audience publique du jeudi 11 septembre 2025

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, du 18 novembre 2022

Président

Mme Teiller (présidente)

Avocat(s)

SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, SCP Krivine et Viaud

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
 

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

CL



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 11 septembre 2025




Cassation


Mme TEILLER, présidente



Arrêt n° 389 F-D

Pourvoi n° V 23-17.751




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 SEPTEMBRE 2025

1°/ M. [F] [Z],

2°/ Mme [R] [I],

tous deux domiciliés [Adresse 1],

ont formé le pourvoi n° V 23-17.751 contre l'arrêt rendu le 18 novembre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 1), dans le litige les opposant :

1°/ à M. [P] [X],

2°/ à Mme [W] [O],

tous deux domiciliés [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

M. [X] et Mme [O] ont formé un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt.




Les demandeurs au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, trois moyens de cassation.

Les demandeurs au pourvoi incident éventuel invoquent, à l'appui de leur recours, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Guillaudier, conseillère, les observations de la SCP Krivine et Viaud, avocat de M. [Z] et de Mme [I], de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de M. [X] et de Mme [O], après débats en l'audience publique du 11 juin 2025 où étaient présents Mme Teiller, présidente, Mme Guillaudier, conseillère rapporteure, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Maréville, greffière de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée de la présidente et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 novembre 2022), par acte authentique du 16 mai 2013, M. [X] et Mme [O] (les vendeurs) ont vendu des lots de copropriété d'un immeuble à M. [Z] et Mme [I] (les acquéreurs).

2. Ayant découvert après la vente que des travaux avaient été réalisés dans l'immeuble sans permis de construire préalable, les acquéreurs ont assigné les vendeurs en réparation de leurs préjudices sur le fondement de l'obligation de délivrance.

Examen des moyens

Sur le premier moyen du pourvoi principal et sur le moyen du pourvoi incident éventuel

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi principal, pris en leur première branche, réunis



Enoncé des moyens

4. Par leur deuxième moyen, les acquéreurs font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes au titre de leurs préjudices matériel, moral et de jouissance, alors « que le vendeur a l'obligation de délivrer une chose conforme à la réglementation en vigueur ; qu'à ce titre et sauf stipulation de l'acte de vente l'en dispensant, le vendeur d'un immeuble doit délivrer un bien conforme aux autorisations d'urbanisme obtenues pour ce bien, le cas échéant après avoir régularisé les travaux effectués sans autorisation ; que dès lors, en énonçant que « s'il est constant que les transformations subies par le bien depuis sa construction n'ont pas été régularisées par l'obtention d'un permis de construire, il n'incombait pas à M. [X] et Mme [O] au titre de l'obligation de délivrance conforme de délivrer un bien disposant d'un permis de construire pour des travaux réalisés avant leur acquisition, l'acte de vente ne faisant aucune mention de ce que les transformations subies par le bien auraient été autorisées par un permis de construire » et que « l'absence de livraison d'un bien disposant de toutes les autorisations d'urbanisme et conforme à la réglementation en vigueur ne relève pas d'un défaut de délivrance conforme mais de la garantie des vices cachés dès lors qu'aucune stipulation de l'acte de vente ne mentionne la délivrance d'un permis de construire en bonne et due forme pour les transformations opérées sur l'immeuble ni la conformité du bien aux normes d'accessibilité et aux normes thermiques, les appelants n'établissant pas en outre un risque d'avoir à remettre le bien en son état antérieur », cependant qu'au titre de leur obligation de délivrance, M. [X] et Mme [O] devaient livrer un immeuble conforme aux autorisations d'urbanisme obtenues pour ce bien, le cas échéant après avoir régularisé les travaux effectués sans autorisation, peu important que les vendeurs n'aient pas été à l'origine des transformations du bien justifiant une régularisation, que l'acte de vente n'ait pas mentionné que ces transformations avaient été autorisées ou encore que les acquéreurs n'aient pas prouvé l'existence d'un risque de devoir remettre le bien en son état antérieur, la cour d'appel a violé les articles 1603 et 1604 du code civil. »

5. Par leur troisième moyen, les acquéreurs font le même grief à l'arrêt, alors « que le vendeur a l'obligation de délivrer une chose conforme à la réglementation en vigueur ; que dès lors, en énonçant que « l'absence de livraison d'un bien disposant de toutes les autorisations d'urbanisme et conforme à la réglementation en vigueur ne relève pas d'un défaut de délivrance conforme mais de la garantie des vices cachés dès lors qu'aucune stipulation de l'acte de vente ne mentionne la délivrance d'un permis de construire en bonne et due forme pour les transformations opérées sur l'immeuble ni la conformité du bien aux normes d'accessibilité et aux normes thermiques, les appelants n'établissant pas en outre un risque d'avoir à remettre le bien en son état antérieur », cependant qu'au titre de leur obligation de délivrance, M. [X] et Mme [O] devaient livrer un immeuble conforme aux normes d'accessibilité et aux normes thermiques, peu important que l'acte de vente n'ait pas affirmé la conformité du bien à ces normes, la cour d'appel a violé les articles 1603 et 1604 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1604 du code civil :

6. Il résulte de ce texte que le vendeur doit délivrer une chose conforme à la convention des parties et, sauf stipulation contraire, à la réglementation en vigueur.

7. Pour rejeter les demandes des acquéreurs, l'arrêt retient, d'abord, que, s'il est constant que les transformations subies par le bien depuis sa construction n'ont pas été régularisées par l'obtention d'un permis de construire, il n'incombait pas au vendeur au titre de l'obligation de délivrance conforme de délivrer un bien disposant d'un permis de construire pour des travaux réalisés avant son acquisition, l'acte de vente ne faisant aucune mention de ce que les transformations subies par le bien auraient été autorisées par un permis de construire.

8. Il relève, ensuite, que l'absence de livraison d'un bien disposant de toutes les autorisations d'urbanisme et conforme à la réglementation en vigueur ne relève pas d'un défaut de délivrance conforme mais de la garantie des vices cachés, dès lors qu'aucune stipulation de l'acte de vente ne mentionne la délivrance d'un permis de construire en bonne et due forme pour les transformations opérées sur l'immeuble ni la conformité du bien aux normes d'accessibilité et aux normes thermiques, les appelants n'établissant pas en outre un risque d'avoir à remettre le bien en son état antérieur.

9. En statuant ainsi, par des motifs impropres à exclure le manquement des vendeurs à leur obligation de délivrance conforme, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 novembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne M. [X] et Mme [O] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [X] et Mme [O] et les condamne in solidum à payer à M. [Z] et Mme [I] la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé publiquement le onze septembre deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2025:C300389

Publié par ALBERT CASTON à 16:44  

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