L'ère numérique a vu l'émergence de technologies disruptives, notamment les intelligences artificielles (IA) génératives, qui ont le potentiel de transformer de nombreux secteurs. Cependant, leur développement soulève des questions juridiques complexes, en particulier en ce qui concerne l'utilisation de données protégées par le droit d'auteur. Aux États-Unis, l'impact de ces technologies sur le droit d'auteur est illustré par des affaires judiciaires telles que Authors Guild et al v. OpenAI Inc. et al, Chabon v. OpenAI, Inc., et Universal Music Corp et al. v. Anthropic PBC. Ces cas mettent en lumière la tension entre l'innovation technologique et la protection des créations intellectuelles.
La réponse de l'Union européenne à la fouille de données
Face à ces enjeux, l'Union européenne a pris des mesures pour adapter le cadre juridique aux nouvelles réalités du marché numérique. La directive européenne de 2019 sur le droit d’auteur dans le marché unique numérique (directive DSM) représente une étape importante dans cette adaptation. Elle introduit des exceptions spécifiques pour la fouille de données, une pratique qui consiste en l'analyse automatisée de textes et de données numériques pour en extraire des informations pertinentes. Les articles 3 et 4 de la directive DSM établissent des exceptions aux droits de reproduction et de réutilisation, visant à soutenir la recherche scientifique et à améliorer l'accès public aux données.
L'incorporation des exceptions de la directive DSM dans le droit français
La France, en tant que membre de l'Union européenne, a intégré ces exceptions dans son propre cadre juridique. L'article L122-5-3 du code de la propriété intellectuelle permet désormais l'utilisation de données pour l’entraînement d’IA, tout en imposant certaines conditions. Un mécanisme d'opt-out est également mis en place, offrant aux titulaires de droits la possibilité de s'opposer à l'utilisation de leurs œuvres pour la fouille de données.
La position de la SACEM sur l'utilisation de son répertoire
La Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) a récemment mis en œuvre son droit d'opt-out, conditionnant l'utilisation de son vaste répertoire pour la fouille de données à une autorisation préalable. Cette initiative de la SACEM, qui représente plus de 200 000 œuvres, vise à trouver un équilibre entre les droits des créateurs et les avancées technologiques. Elle encourage la négociation et la transparence dans l'utilisation des œuvres pour l'entraînement des IA.
La démarche de la SACEM s'inscrit dans un contexte plus large de débats sur le projet de règlement sur l’IA au niveau européen, où la transparence est une valeur fondamentale. Elle pourrait également influencer d'autres sociétés de gestion collective à adopter des approches similaires.
La réaction des médias français à l'accès non autorisé aux données
Dans le paysage médiatique français, des entités telles que Radio France et TF1 ont pris position contre l'accès non autorisé à leurs données. Ils ont interdit l'accès à leurs sites au robot GPTBot d'OpenAI, marquant une tendance vers des restrictions plus strictes sur l'utilisation des données pour l'entraînement des IA sans consentement explicite.
Ces actions reflètent une prise de conscience croissante de la nécessité de protéger le contenu protégé par le droit d'auteur dans un environnement numérique en constante évolution. Elles soulignent également l'importance d'une réglementation adaptée qui puisse concilier les intérêts des créateurs avec les possibilités offertes par les technologies de pointe.
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En résumé, l'interaction entre le droit d'auteur et les IA génératives est un domaine en pleine évolution, nécessitant une réflexion continue et des ajustements législatifs pour garantir que les droits des créateurs soient respectés tout en permettant l'innovation technologique. La directive DSM de l'UE, la transposition de ses principes dans le droit national français, les actions de la SACEM et les mesures prises par les médias français sont autant d'exemples de la manière dont les législateurs et les acteurs du marché s'efforcent de naviguer dans ce paysage complexe.
(imgage générée par l'IA Craiyon)
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