Le gouvernement vient d'ouvrir jusqu'au 30 juillet 2011 une consultation publique sur un projet de décret portant diverses modifications des modalités de mise en oeuvre de l'obligation de remise en état en matière d'ICPE.

Il y a lieu de s'intéresser plus particulièrement au nouvel article 516-5-3 du Code de l'environnement qu'envisage d'introduire le projet de décret, et susceptible de bouleverser les conditions de la réalisation de la remise en état.

Afin de mieux comprendre les enjeux de cet article, celui-ci est reproduit ci-dessous :

"Le préfet peut prescrire à un tiers, qui en fait la demande, la réalisation des mesures requises lors de la cessation d'activité prévue aux articles L. 512-6-1, L. 516-7-6 et L. 512-12-1 à condition que la demande porte sur un projet de réhabilitation et que le demandeur dispose de garanties financières et capacités techniques suffisantes pour réaliser ce projet.

Les garanties financières exigées dans ce cas résultent:

* soit de l'engagement écrit d'un établissement de crédit ou d'une entreprise d'assurance,

* soit d'une consignation volontaire déposée sur un compte ouvert dans les livres de la caisse des Dépôts et Consignations.

Le tiers transmet au préfet un document attestant de la constitution des garanties financières ou un document attestant de l'ouverture d'un compte dans les livres de la Caisse des Dépôts et Consignations.

Cette disposition n'exonère pas l'exploitant de ses obligations de remise en état en cas de défaillance de ce tiers".

Pour mémoire, il a été réaffirmé à plusieurs reprises par la juridiction judiciaire que l'obligation de remise en état incombe au dernier exploitant de l'installation classée, en dehors de tout rapport de droit privé, ce qui exclue toute convention de droit privé destinée à transmettre l'obligation de dépollution à une personne autre que l'exploitant lui-même.

Cette règle quoique critiquable car portant atteinte à l'autonomie de volonté de l'exploitant souhaitant transférer à un cocontractant la charge de la dépollution, et n'allant pas nécessairement dans le sens d'un renforcement de l'efficacité (le tiers pouvant se révéler plus compétent et mieux équipé pour procéder à la remise en état), a le mérite de mettre l'exploitant face à ses responsabilités.

Cette construction juridique semble être remise en question par le projet de décret en cours de consultation.

En effet, celui-ci affirme que le préfet peut prescrire à un tiers l'obligation de remise en état. Cette disposition doit être nuancée dans la mesure où il ne s'agit pas d'une obligation pour le préfet mais bien d'une simple faculté. Par ailleurs, la demande doit émaner du tiers lui-même, ce qui soulève un ensemble de questions quant aux modalités précises de cette demande (formalités, moment de la demande, rétractation,...). Enfin, on peut s'interroger du devenir de l'obligation de remise en état à travers le jeu des diverses prescriptions.

De surcroît, le texte fait référence à « un projet de réhabilitation » sur lequel la demande du tiers doit porter. Or, force est de constater qu'aucune précision n'est donnée quant à cette formulation somme toute assez floue. Le problème de l'articulation entre le projet de remise en état présenté par l'exploitant dès le début de la procédure d'autorisation de l'installation et le projet de réhabilitation présenté par le tiers doit être également éclairci, notamment dans le cas où l'un ou l'autre serait rejeté.

Enfin, la troisième condition posée par le projet de décret porte sur les garanties financières et les capacités techniques dont doit justifier le tiers. Sur ce point encore, des éclaircissements sont nécessaires afin de déterminer sur quoi les garanties financières devront porter.

Malgré les quelques zones d'ombre relevées dans ce projet de décret, il est probable que celui-ci contribue à une amélioration de la remise en état des sites industriels.