La question énergétique est aujourd'hui au coeur des préoccupations du secteur agricole français et l'agriculteur se positionne de plus en plus comme un acteur majeur de la transition énergétique. Suite au Grenelle de l'Environnement de 2007, le Ministère de l'Agriculture a lancé un « Plan de performances énergétiques » dans les exploitations agricoles pour la période 2009-2013 dans le but d'accompagner le changement de modèle énergétique en agriculture [1]. Ce plan a favorisé l'émergence de nombreux projets d'aides aux investissements d'économies d'énergies ainsi que la multiplication d'installations de production d'énergies renouvelables au sein des exploitations agricoles [2]. Nombreux sont les agriculteurs qui ont ainsi adopté la production d'énergies renouvelables dans le cadre de la diversification de leur activité. Le soleil, le vent et la biomasse sont aujourd'hui les principales sources d'énergies renouvelables exploitées dans les fermes françaises.

L'énergie radiative du soleil

La production d'électricité à partir de l'énergie radiative du soleil a rencontré un grand succès dans les exploitations agricoles. Durant les années 2000, les projets d'installation de panneaux solaires photovoltaïques sur des bâtiments agricoles se sont multipliés en raison de tarifs d'achat attractifs et de la baisse constante des prix des outils de production. L'engouement a été tel que les pouvoirs publics ont été contraints d'y mettre un terme assez brutal, par le décret du 9 décembre 2010 [3] qui a suspendu durant trois mois l'obligation d'achat de l'électricité photovoltaïque produite par certaines installations. Ce moratoire avait pour objectif de désengorger les files d'attente des projets chez l'opérateur ERDF et de prévenir les effets d'aubaine liés à des rentabilités excessives. Il a été suivi par des baisses de tarifs d'achat importantes [4]. Cet événement a jeté le trouble sur l'avenir de la filière photovoltaïque et provoqué la colère du secteur agricole. De nombreuses zones d'ombre subsistent actuellement sur le marché du solaire [5] et rendent difficile de réaliser d'éventuelles prédictions quant à son devenir. Reste que la pose et l'exploitation de panneaux photovoltaïques est un type de projet qui peut être encore aujourd'hui rentable pour les agriculteurs, notamment dans le cadre d'une rénovation ou d'une création de hangar agricole, à condition que le projet soit convenablement mené.

L'énergie mécanique du vent

Le développement de l'exploitation de l'énergie mécanique du vent a conduit les agriculteurs à accueillir de plus en plus d'éoliennes sur leurs propriétés agricoles, soit en mettant leurs terres à disposition d'un tiers désirant exploiter l'énergie, soit en exploitant eux-mêmes des installations. En ce qui concerne l'éolien industriel, les questions juridiques émanant du développement de ce type de production ont notamment rendu nécessaire l'établissement d'un « protocole national éolien » approuvé en 2002 entre l'APCA, la FNSEA, le Syndicat des énergies renouvelables et l'association France énergie éolienne, servant de guide de recommandations relatives à l'implantation d'éoliennes sur des parcelles agricoles [6]. Quant au petit éolien, il est considéré de longue date comme particulièrement adapté aux contraintes des exploitations agricoles [7]. Il n'a toutefois aujourd'hui pas encore pris son envol : de multiples difficultés liées notamment au marché de ces installations et au tarif d'achat qui leur est attribué ont ralenti leur multiplication. Ce type d'installation devrait néanmoins trouver à se développer dans les prochaines années [8]. Une meilleure prise en compte de la part des pouvoirs publics serait de bon augure pour cette filière.

La biomasse

La biomasse est un débouché connu depuis longtemps en agriculture, pouvant servir notamment de base à la fabrication de carburants [9], ou de combustibles [10]. La France s'est récemment lancée dans le développement de la méthanisation agricole, qui s'appuie principalement sur l'exploitation de la biomasse issue de l'activité agricole. La méthanisation est définie comme le « processus de transformation anaérobie de matières organiques qui conduit à la production de biogaz et de digestat » [11]. En 2010, la méthanisation est devenue explicitement agricole au sens du droit rural [12] et depuis, le cadre juridique de cette activité n'a cessé de s'étoffer, facilitant ainsi le développement de ces projets. Le plan Énergie Méthanisation Autonomie Azote (EMAA), présenté début 2013 par Stéphane Le Foll, Ministre de l'Agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, et Delphine Batho, ex-Ministre de l'Ecologie, du développement durable et de l'énergie, confirme la volonté des pouvoirs publics de développer un modèle français de la méthanisation agricole. L'objectif annoncé est d'atteindre 1000 méthaniseurs à la ferme à l'horizon 2020. La société GDF Suez, désireuse de participer au développement de cette technologie, a d'ores et déjà mis en oeuvre des partenariats avec le Ministère de l'agriculture et la FNSEA.

Conclusion

Le développement de la production d'énergies renouvelables dans les exploitations agricoles participe sans nul doute à la réussite de la transition énergétique en France. C'est aussi un élément central des stratégies mises en place pour mieux maîtriser les coûts énergétiques dans les exploitations agricoles, mais également pour aider à diversifier les activités des agriculteurs. À court terme, c'est la bonne santé des exploitations qui est en jeu ainsi que la compétitivité du secteur agricole français. Sur le long terme, c'est l'environnement et les territoires ruraux qui peuvent en tirer bénéfice, à condition que la concertation soit de mise entre les différents acteurs dans le développement de ces projets. À ce titre semble se dessiner un meilleur destin pour le développement de la méthanisation que celui que l'on a connu pour le photovoltaïque.

Henri Maria

Membre de l'association des Juristes en Droit de l'Environnement