Pierre Moscovici, ministre de l'Économie et des Finances et Jérôme Cahuzac, ministre délégué au Budget ont rendu public, le 17 septembre 2012, un rapport de l'Inspection générale des finances (IGF) intitulé « L'État et ses agences » qui avait été commandé par le précédent Gouvernement en août 2011 (http://www.economie.gouv.fr/files/2012-rapport-igf-l-etat-et-ses-agences...). Hasard du calendrier (ou pas ?) il suit de près celui du Conseil d'État consacré au même sujet (Les agences une nouvelle gestion publique, Étude annuelle 2012 du Conseil d'État : JCP A 2012, act. 595, aperçu rapide par Hélène Pauliat ; http://www.conseil-etat.fr/fr/rapports-et-etudes/etude-annuelle-2012.html). Tout comme l'examen du Palais Royal était sans concession, les conclusions de l'IGF sont sans appel.

Des définitions divergentes de la notion d'« agences » :

- le Conseil d'État recense 103 organismes qui peuvent être considérés comme des agences et dont il donne la liste exhaustive dans l'annexe 1 (p. 183 à 209) en détaillant, pour chacune son statut, son budget, ses effectifs, son ministère de rattachement et ses missions. Les ressources allouées par l'État à ces entités s'élèvent à 330 milliards d'euros (72,8 milliards en excluant les trois caisses de sécurité sociale) et les effectifs des agences représentent environ 8 % des effectifs totaux de la fonction publique de l'État ;

- l'IGF entend la notion d'agence dans un sens beaucoup plus large semble-t-il, puisqu'elle en a répertorié 1 244 à fin 2010 pour des moyens financiers - crédits budgétaires et taxes affectées - qui s'élèvent en 2012 à 50 milliards d'euros, en progression de 15 % depuis 2007.

Preuve s'il en est, comme le notent les juges du Palais Royal, que l'agence ne correspond « à aucune catégorie juridique définie ». La différence d'approche s'explique par la définition retenue : les magistrats caractérisent l'agence comme « un organisme autonome, exerçant une responsabilité structurante dans la mise en oeuvre d'une politique nationale » (p. 58) donc se distinguant de l'autorité indépendante ou de l'opérateur ; l'IGF retient le terme d'agence pour définir « les entités qui, quoique distinctes de l'État, sont étroitement contrôlées et largement financées par lui ».

La question de la pertinence d'un mode d'action publique. - Différence de périmètre d'étude mais rapprochement des perspectives. C'est bien « l'amplification du phénomène de recours par l'État à des entités qu'il contrôle et qui exercent pour son compte des missions de service public non marchand » qui intéresse les deux institutions.

Des propositions pour réformer l'État. - Leurs conclusions sont, en définitive similaires, et assez peu amènes pour les agences. « Le problème, ce n'est pas l'agence, c'est l'État » (p. 121), écrivent les magistrats. « L'agence est une réponse à la menace permanente du risque bureaucratique qui sape l'efficacité attendue des services et accroît les coûts » (p.186). L'inspection des finances ne dit pas autre chose en estimant que l'État recourt à des créations d'agences alors « qu'il n'existe pas d'analyse systématique de la pertinence du recours à ce mode de gestion. La création de telles agences engendre des coûts importants, alors qu'elle ne correspond pas toujours à une amélioration de la qualité du service public et se traduit dans certains cas par une moindre efficience de cette gestion déléguée par rapport à une gestion en direct par l'État » (comme en témoigne, à périmètre constant, l'augmentation des effectifs physiques des opérateurs qui ont cru de 6 % depuis 2007 tandis que ceux de l'État diminuaient de 6 %). En outre, « l'exercice de la tutelle reste insuffisamment stratégique ».

Si le Conseil d'État formulait 25 propositions, l'Inspection générale des finances en donne 35. La réforme de l'État, et de son architecture, ne périra pas par manque d'idées.

Pierre Moscovici et Jérôme Cahuzac ont annoncé à cet égard que les premières mesures seront proposées dans le cadre des lois financières de l'automne et qu'une mission de réflexion sera lancée dans les prochaines semaines. La stratégie globale de réforme et de modernisation de l'action publique doit être définie à l'automne 2012.