Les articles L. 422-10, L. 422-13 et R. 422-42 du code de l'environnement créent un droit d'opposition des propriétaires fonciers à l'apport forcé de leur terrain au territoire de chasse d'une association communale de chasse agréée (ACCA), sous certaines conditions.

Le Conseil d'Etat s'est prononcé par un arrêt du 25 juin 2012 sur un contentieux relatif à l'intégration d'un terrain dans le périmètre d'une ACCA.

En l'espèce, par un arrêté du 10 juillet 2006 le préfet de la Meuse a modifié la liste des terrains devant être soumis à l'action d'une ACCA en y incluant une parcelle sur laquelle le requérant possédait un droit de chasse.

Le tribunal administratif de Nancy, par un jugement du 23 octobre 2007, a rejeté la demande de ce dernier tendant à faire annuler l'arrêté préfectoral.

Or, par un arrêt du 19 octobre 2009, la cour administrative d'appel de Nancy a fait droit à sa demande. Le ministre de l'Ecologie s'est pourvu en cassation devant le Conseil d'Etat contre cet arrêt.

Le Conseil d'Etat a ainsi pu préciser que le droit d'opposition d'un propriétaire foncier à l'apport de ses terrains au territoire de chasse d'une ACCA « est attaché à une superficie minimale (de 20 hectares) afin de garantir que l'exercice de ce droit ne compromette pas la gestion rationnelle des ressources cynégétiques ».

Le Conseil d'Etat précise que « pour apprécier cette condition, plusieurs parcelles appartenant au même propriétaire peuvent être agrégées, dès lors qu'elles forment un ensemble d'un seul tenant » et « que l'exigence de continuité des fonds doit être considérée comme remplie dès lors que les différentes parcelles en cause se touchent, même par un seul point ».

Le Conseil d'Etat conclu donc que « dès lors qu'ils ne font que traverser un fonds d'un seul tenant, les voies ferrées, routes, chemins, canaux et cous d'eau non domaniaux n'en interrompent pas la continuité », par conséquent la cour administrative d'appel de Nancy n'avait pas commis d'erreur de droit en jugeant que le fait que les deux parties constituant le territoire de chasse du requérant soient séparées par des parcelles appartenant à des tiers n'était pas de nature « à faire juridiquement obstacle à la continuité de son fonds » dès lors que « lesparcelles de Monsieur F. comme celles appartenant à des tiers jouxtaient toutes un même croisement de chemins ruraux ».

Le Conseil d'Etat a donc une vision extensive de la notion de « fonds d'un seul tenant », permettant ainsi aux propriétaires d'un terrain d'au moins 20 hectares de s'opposer à l'apport forcé de leur terrain au territoire de chasse d'une ACCA, conformément à la loi française relative à la chasse mais aussi à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH).

En effet, le lendemain même de cet arrêt, soit le 26 juin 2012, la CEDH a confirmé sa jurisprudence relative à l'apport forcé de terrains au territoire d'une association de chasse dans un arrêt Hermann c. Allemagne (req. n°9300/07).

En l'espèce, l'affaire concernait le grief d'un propriétaire foncier qui se plaignait d'être forcé de tolérer la pratique de la chasse sur ses terres alors qu'il était opposé à cette activité pour des raisons morales.

La Grande Chambre a suivi ses deux précédents arrêts en la matière, qui concernaient la législation sur la chasse en France et au Luxembourg (Chassagnou et autres c. France, arrêt de Grande Chambre du 29 avril 1999, et Schneider c. Luxembourg, arrêt de chambre du 10 juillet 2007,).

En effet, la Grande Chambre a considéré que la loi allemande relative à la chasse n'est pas sensiblement différente de celles qu'elle a examinées dans les affaires précitées.

Par conséquent, la Grande Chambre a estimé que l'obligation faite aux propriétaires fonciers allemands de tolérer la chasse sur leurs terres a imposé à ceux qui sont opposés à cette pratique pour des raisons éthiques une charge disproportionnée violant ainsi l'article 1 (protection de la propriété) du Protocole n°1 à la Convention européenne des droits de l'homme.