Le décret du 17 janvier 2011 relatif au regroupement et à la modernisation de certaines installations classées d'élevage, pris en application de la loi de modernisation de l'agriculture du 27 juillet 2010, permet d'exonérer d'étude d'impact et d'enquête publique les regroupements et les modernisations d'élevages bovins, porcs et volailles déjà soumis à la réglementation des installations classées, lorsqu'ils répondent à certaines conditions.

Ce décret a fait l'objet d'une requête tendant à son annulation devant le Conseil d'Etat par l'association Eaux et Rivières de Bretagne peu de temps après sa publication.

L'association soulève trois moyens :

- La procédure d'adoption du décret est irrégulière au motif que la commission de l'Assemblée nationale consultée n'était pas compétente et les membres du Sénat n'ont pas été suffisamment informés ;

- Les dispositions de l'article 1er du décret, insérant les articles R515-52, R 515-53, R 515-54 et R 515-55 dans le code rural et de la pêche maritime et fixant les conditions dans lesquelles peuvent être acceptées par le préfet les opérations de regroupement et de modernisation de certaines installations d'élevage, portent atteinte aux intérêts protégés par l'article L 511-1 du code de l'environnement et méconnaissent l'article L 211-1 du même code posant le principe d'une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau, dès lors notamment qu'elles conduiront à étendre les surfaces d'épandage, à augmenter les cheptels et permettront de regrouper les élevages sur les bassins versants ;

- Les dispositions de l'article 1er du décret sont incompatibles avec les objectifs poursuivis par la Directive cadre du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau.

Pas sa décision du 6 juin 2012, le Conseil d'Etat rejette la requête de l'association en écartant chacun des moyens soulevés.

Sur la légalité externe, le Conseil d'Etat estime la commission de l'Assemblée nationale consultée était bien compétente et que les membres du Sénat ont été suffisamment informés.

Sur la légalité interne, le Conseil d'Etat considère en premier lieu que les articles R515-52 à R515-57 du code de l'environnement s'appliquent à des opérations de regroupement ou de modernisation de certains élevages « dès lors qu'elles satisfont à certaines conditions précisément définies et n'emportent pas de modifications substantielles de l'installation, étude d'impact et enquête publique ». De plus, ces opérations s'appliquent à des installations « déjà autorisées et contrôlées au titre de la législation des installations classées » et l'article R 515-53 encadre ces opérations de telle sorte « qu'il n'en résulte aucune modification substantielle du plan d'épandage, et en limitant à des niveaux modestes l'augmentation des effectifs d'animaux ». Le Conseil d'Etat rappelle aussi que l'autorité administrative compétente peut toujours apprécier si les projets de regroupement ou de modernisation peuvent effectivement bénéficier des dispositions du décret querellé, en rendant nécessaire la délivrance d'une nouvelle autorisation.

En second lieu, le Conseil d'Etat rappelle que la Directive cadre sur l'eau du 23 octobre 2000 a été transposée en droit français par la Loi n°2004-338 du 21 avril 2004. Le Conseil d'Etat relève donc que l'association ne prouve pas que cette loi ait méconnu les objectifs de la directive ou qu'elle l'ait imparfaitement transposée.

La requête de l'association ayant été rejetée, le décret du 17 janvier 2011 relatif au regroupement et à la modernisation de certaines installations classées d'élevage est, par conséquent, toujours en vigueur.