Ayant eu l’occasion ces dernières années de divorcer des cadres bancaires, j’ai pu voir certaines spécificités qu’il me semble utile de connaître.
Il n’y a bien entendu aucune règle légale qui ne s’appliquerait qu’à cette catégorie professionnelle particulière. Il s’agit ici de quelques réflexions amenées par ma pratique et qui je l’espère pourront aider les cadres bancaires qui seraient en passe de divorcer ou de se séparer.

1. Des placements gérés au mieux de l’intérêt commun.

Tout d’abord, ils sont généralement des gestionnaires attentifs et à ce titre, ils placent, au fur et à mesure, l’argent de la famille au mieux afin de lui donner une rentabilité optimale.

Conscients de leurs compétences, leurs conjoints les laissent en général gérer sans s’y intéresser plus que cela, ce qui les rend au moment d’une séparation à la fois suspicieux et démunis d’informations.

Nombre de cadres bancaires déménagent fréquemment, au gré des mutations et parfois à l’étranger. Ces déménagements répétés les poussent top souvent à se débarrasser des documents obsolètes où dont ils pensent ne plus avoir besoin. C’est tout à fait légal et légitime mais les conséquences financières peuvent s’avérer compliquées en cas de séparation.

Les banques ne conservant les documents que 10 ans, il sera impossible de compter sur une demande d’information pour suivre les mouvements de fonds plus anciens et si les époux n’ont pas conservé les éléments bancaires, tout l’historique sera perdu… Avec des conséquences qui dépendent évidemment des situations.

Il n’est pas rare en cas de séparation soit que les documents aient été perdus, soit que l’un des époux les conserve par devers lui refusant de les rendre ou arguant ne pas les avoir car n’importe lequel des époux peut « mettre la main » sur ces documents et partir avec.

Rappelons qu’il n’y a pas de vol entre époux sauf pour certains documents officiels, ce qui n’est pas le cas des relevés bancaires.

Or, s’ils ont plus de 10 ans, les justificatifs des mouvements financiers sont totalement et souvent définitivement, inaccessibles à l’autre époux.

De même, la pratique rend difficile voire impossible la recherche de placements faits à l’étranger, de comptes bancaires surtout s’ils ont été fermés entre-temps, d’assurances vie et autres placements par des officines spécialisées.

Quant aux fichiers officiels des comptes bancaires ou des assurances vie, s’ils existent effectivement, ils sont en réalité peu fiables.

Il serait fastidieux de faire ici le catalogue des conséquences financières d’autant qu’elles dépendent à la fois du régime matrimonial des époux, de leurs habitudes de vie, des placements effectués, des donations et héritages éventuellement reçus…

Il est donc souhaitable que le cadre bancaire conserve la trace de l’ensemble des mouvements durant toute la durée du mariage de sorte que l’on puisse suivre les entrées et sorties d’argent. À l’idéal, il tiendra un tableau annuel avec les justificatifs annexés, de sorte qu’il ne se retrouve pas devant un travail dantesque au moment de la séparation.

2. Des emprunts réalisés auprès de la banque employeur.

Généralement, les établissements bancaires proposent à leurs employés des conditions de crédit favorables de sorte que lorsqu’ils doivent s’endetter les cadres bancaires le font préférentiellement auprès de leur employeur.

Toutefois, en cas de séparation, cela peut avoir des conséquences douloureuses. En effet, l’endettement, notamment pour un domicile familial, est souvent très élevé prenant en compte l’ensemble des revenus de la famille.

Or, un cadre bancaire ne peut se permettre de ne plus payer son crédit à son employeur, ni de se retrouver interdit bancaire ou fiché à ce titre.

La conséquence en est, qu’il va souvent devoir, pour s’assurer du bon paiement des crédits du couple, s’engager à les payer directement, quitte à en obtenir ultérieurement remboursement par son conjoint.

Cela a pour lui des conséquences fâcheuses :

  • Il va se retrouver avec une somme de crédit mensuel à la limite du surendettement (qu’il ne peut non plus se permettre) sans pouvoir obtenir immédiatement remboursement de la part de son conjoint,
  • Il va devoir informer sa hiérarchie de la difficulté, si le montant est trop élevé, pour tenter de renégocier le montant global à payer,
  • Cela va avoir des conséquences sur ce qu’il peut offrir à son conjoint et à ses enfants dans le cadre de la procédure,
  • Les impôts ne tenant pas compte de ces charges exceptionnellement élevées, il continuera à être imposé sur ses revenus, souvent excellents, alors qu’en réalité il peine à vivre.

La situation est d’autant plus difficile que le conjoint, en cours de séparation, va devenir excessivement méfiant, persuadé, le plus souvent à tort, que le cadre bancaire lui cache des choses et « a les moyens », sans se rendre compte que la réalité est bien différente.

Au final dans ces situations, tout le monde est perdant. Il est donc indispensable de constituer un dossier complet, dont une copie sera mise en sécurité, et de l’apporter à son avocat dès le début de la séparation pour voir les difficultés éventuelles et pallier les plus gros problèmes quand il est encore temps, c’est-à-dire au tout début, avant que les conflits ne se cristallisent et que la méfiance ne devienne paranoïa.