Il y a peu, une association m’a sollicité afin que je relise son projet de droit de réponse, par suite d’un article peu élogieux la concernant paru sur un site internet.

Cette demande a été l’occasion pour moi de leur rappeler que ce droit, fondé par une loi ancienne, obéit à des règles strictes tenant tant au fond de la réponse qu’à la forme.

Et plutôt que de simplement corriger ce qui pouvait l’être, je leur ai suggéré de laisser faire leur avocat, dont c’est un peu le métier !

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A savoir tout d’abord que l’avocat exerçant un droit de réponse pour le compte d'un tiers doit justifier d’un mandat spécial remis préalablement à cet effet (Cass Crim 22 fév 2000 n° 99-82.011) : « alors, d'une part, qu'un avocat ne peut adresser une réponse au nom de son client que s'il peut justifier d'un mandat spécial ; que ce mandat doit nécessairement être transmis par l'avocat au directeur de la publication dans le même courrier que la réponse établie au nom de son client, faute de quoi le directeur de la publication n'est pas valablement saisi de la demande d'insertion d'un droit de réponse ».

 

Sur le fond :

Toute personne nommée ou désignée dans un article de presse (écrite, audio ou télévisuelle) peut obtenir un droit de réponse, conformément aux dispositions de l’article 13 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.

 

S’agissant des contenus publiés à la radio ou à la télévision, le droit de réponse est encadré par l’article 6 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle et le décret n°87-246 du 6 avril 1987 relatif à l'exercice du droit de réponse dans les services de communication audiovisuelle.

 

En ce qui concerne les publications sur Internet, le droit de réponse est encadré par le décret n°2007-1527 du 24 octobre 2007 relatif au droit de réponse applicable aux services de communication au public en ligne et pris pour l'application du IV de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, visant les personnes nommées ou désignées « dans un service de communication au public en ligne ».

 

La réponse sera toujours gratuite.

 

L’existence d’un préjudice n’est pas requise, le demandeur à l'insertion n'a pas à démontrer qu'il a été diffamé par l'article auquel il entend répondre, mais seulement qu'il y a été nommé ou désigné (Cass. crim., 3 novembre 2020, n° 19-85.276).

Il s’agit d’un droit strictement personnel et celui qui entend en user ne peut répondre qu'à sa propre mise en cause, et non à celle d'un tiers, celui-ci aurait-il été également nommé ou désigné dans la publication suscitant la réponse (Cass. crim., 3 novembre 2020, n° 19-85.276). Ainsi, seule la personne visée par l’article peut l’exercer (d’où le mandat donné à l’avocat).

 

Pour autant, ne se prévaut pas d’un droit de réponse collectif, la personne qui, en exerçant son droit de réponse, reprend les faits et fait référence aux personnes nommées dans l’article incriminé auquel elle répond (CA Montpellier, 31 mai 2012, RG 11/07547).

 

L’article 13.1 de la loi prévoit toutefois que ce droit de réponse pourra être exercé par certaines associations, lorsqu’une personne ou un groupe de personnes ont fait l’objet d’imputations susceptibles de porter atteinte à leur honneur ou à leur réputation à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée. Toutefois, quand la mise en cause concerne des personnes considérées individuellement, l’association ne peut exercer le droit de réponse que si elle justifie avoir reçu leur accord.

 

Sur les délais :

Le droit de réponse doit impérativement être exercé dans le délai non-prorogeable de trois mois, courant à compter de la date de la publication de l’article.

En matière audiovisuelle toutefois : lorsque, à l'occasion de l'exercice de poursuites pénales, ont été diffusées dans le cadre d'une activité de communication audiovisuelle des imputations susceptibles de porter atteinte à l'honneur ou à la réputation d'une personne physique ou morale, ce délai de trois mois est réouvert à son profit à compter du jour où la décision de non-lieu dont elle fait l'objet est intervenue ou celle de relaxe ou d'acquittement la mettant expressément ou non hors de cause est devenue définitive.

 

Sur la forme :

A peine d’irrecevabilité, la demande d’insertion doit être adressée au directeur de la publication lui-même à l’adresse du siège social du journal (Cass., Civ., 2ème, 29 avril 1998). Lorsque les mentions légales d’un site internet font défaut, il convient d’adresser le droit de réponse au titulaire du nom de domaine du site.

 

L’article 1er du décret 1527 prévoyant que l’exercice du droit de réponse ne trouve pas à s’appliquer « lorsque les utilisateurs sont en mesure, du fait de la nature du service de communication au public en ligne, de formuler directement les observations qu'appelle de leur part un message qui les met en cause ». Tel est le cas par exemple des forums de discussion, au sein desquels le droit de réponse peut s’exercer directement en ligne par la victime de l’atteinte à sa réputation.

 

Pour la presse écrite, non compris l’adresse, les salutations, les réquisitions d’usage et la signature qui ne seront jamais comptées dans la réponse, celle-ci doit être limitée à la longueur de l’article qui l’a provoquée. Toutefois, elle peut atteindre cinquante lignes, alors même que cet article serait d’une longueur moindre, mais elle ne peut dépasser deux cents lignes, alors même que l’article est d’une longueur supérieure. Le demandeur en insertion ne pourra excéder ces limites en offrant de payer le surplus.

 

Ces dispositions s’appliquent aux répliques, lorsque le journaliste aura accompagné la réponse de nouveaux commentaires.

 

En matière de publication sur Internet, la demande doit indiquer les références du message, ses conditions d'accès (lien http par ex.), préciser s'il s'agit d'un écrit, de sons ou d'images et le nom de son auteur (s'il est mentionné). La réponse doit également contenir la mention des passages contestés et la teneur de la réponse sollicitée.

Surtout : la réponse doit prendre la forme d'un écrit, quelle que soit la nature du message auquel elle se rapporte. Elle sera limitée à la longueur du message qui l'a provoquée ou, lorsque celui-ci ne se présente pas sous une forme alphanumérique, à celle de sa transcription sous forme d'un texte, la réponse ne pouvant pas être supérieure à 200 lignes.

La personne qui adresse une demande d'exercice de droit de réponse relatif à un contenu en ligne peut préciser que sa demande deviendra sans objet si le directeur de publication accepte de supprimer ou de rectifier tout ou partie du message à l'origine de l'exercice de ce droit. La demande précise alors les passages du message dont la suppression est sollicitée ou la teneur de la rectification envisagée.

Le directeur n'est alors pas tenu d'insérer la réponse s'il procède à la suppression ou à la rectification sollicitée dans un délai de trois jours à compter de la réception de la demande.

En matière audiovisuelle, le texte de la réponse ne peut être supérieur à trente lignes dactylographiées. La durée totale du message ne peut excéder deux minutes. Pour les services de vidéographie, la réponse est accessible au public au minimum pendant vingt-quatre heures.

 

Sur l’obligation de publication du droit de réponse :

L'insertion d'une réponse présentée dans les conditions de forme mentionnées ci-dessus ne peut être refusée que si ladite réponse est contraire aux lois, à l'intérêt légitime des tiers, n'est pas en corrélation avec l'article auquel il est répondu et met en cause l'honneur du journaliste ou de l'organe de presse de façon disproportionnée à la teneur de l'article initial (Cass. crim., 3 novembre 2020, n° 19-85.276).

Le directeur de la publication ne dispose d’aucun pouvoir d’appréciation sur l’opportunité ou même sur l’exactitude du droit de réponse demandé lorsqu’il est exercé selon les règles de formes prescrites par la loi : il est dans l’obligation de publier intégralement le droit de réponse, sans faire de modification.

 

En matière de publication par voie de presse, le directeur de la publication est alors tenu d’insérer dans les trois jours de leur réception (ce délai étant réduit à 24h en période électorale), les réponses de toute personne nommée ou désignée dans le journal ou écrit périodique quotidien.

En ce qui concerne les journaux ou écrits périodiques non quotidiens, le directeur de la publication, sous les mêmes sanctions, sera tenu d’insérer la réponse dans le numéro qui suivra le surlendemain de la réception.

Cette insertion devra être faite à la même place et en mêmes caractères que l’article qui l’aura provoquée, et sans aucune intercalation.

La réponse ne sera exigible que dans l’édition ou les éditions où aura paru l’article.

 

S’agissant des publications sur Internet, la réponse est mise à la disposition du public par le directeur de publication dans des conditions similaires à celles du message en cause et présentée comme résultant de l'exercice du droit de réponse. Elle est soit publiée à la suite du message en cause, soit accessible à partir de celui-ci. Lorsque le message n'est plus mis à la disposition du public, la réponse est accompagnée d'une référence à celui-ci et d'un rappel de la date et de la durée de sa mise à disposition du public. La réponse doit demeurer accessible durant la même période que celle pendant laquelle l'article ou le message qui la fonde est mis à disposition du public par l'éditeur de service de communication au public en ligne. La durée d’accessibilité ne pouvant être inférieure à un jour.

Lorsque le message est mis à la disposition du public par le biais d'un courrier électronique périodique non quotidien, le directeur de la publication est tenu d'insérer la réponse dans la parution qui suit la réception de la demande.

 

En matière audiovisuelle, la réponse doit être annoncée comme s'inscrivant dans le cadre de l'exercice du droit de réponse, et faire référence au titre de l'émission ou du message en cause et rappelle la date ou la période de la diffusion ou de la mise à la disposition du public.

Elle doit être diffusée dans les huit jours, et par des conditions techniques équivalentes à celles dans lesquelles a été diffusé le message contenant l'imputation invoquée et de manière à lui assurer une audience équivalente à celle du message précité (ce délai étant porté à quinze jours lorsque le message contesté a été exclusivement mis à disposition du public dans les départements, territoires ou collectivités territoriales d'outre-mer ou lorsque le demandeur réside outre-mer ou à l'étranger).

 

Sur le défaut ou le refus de publication :

Le défaut d’insertion dans les délais prévu par la loi est puni de 3 750 euros d’amende, sans préjudice des autres peines et dommages-intérêts auxquels l’article pourrait donner lieu.

En cas de défaut ou de refus de publication, le demandeur a la possibilité de solliciter l’insertion forcée de la réponse en déposant une plainte en refus d’insertion (art. 13 loi du 29 juillet 1881).

Et, sur le fondement de l’article 809 du code de procédure civile autorisant le juge des référés à prendre les mesures conservatoires nécessaires en cas de trouble manifestement illicite, le demandeur peut sollicite la condamnation des défendeurs à l’insertion forcée sous astreinte.

L’article 53 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse prévoyant que la citation doit préciser et qualifier le fait incriminé et indiquer le texte de loi applicable à la poursuite, formalités prescrites à peine de nullité de la poursuite.

Le tribunal se prononce dans les dix jours de la citation. Il peut décider que le jugement ordonnant l’insertion soit exécutoire sur minute, nonobstant opposition ou appel, mais uniquement en ce qui concerne l’insertion. S’il y a appel, il y sera statué dans les dix jours de la déclaration, faite au greffe.

Si l’insertion ainsi ordonnée n’est pas faite dans le délai prenant cours à compter du prononcé du jugement, le directeur de la publication sera passible de trois mois d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende.

L’action en insertion forcée se prescrit après trois mois révolus, à compter du jour où la publication a eu lieu.

En outre, toute personne nommée ou désignée dans un journal ou écrit périodique à l’occasion de l’exercice de poursuites pénales peut également exercer l’action en insertion forcée, dans le délai de trois mois à compter du jour où la décision de non-lieu dont elle fait l’objet est intervenue ou celle de relaxe ou d’acquittement la mettant expressément ou non hors de cause est devenue définitive.

Enfin, le refus d’insertion est de nature à fonder une action en réparation du préjudice subis en cas de non-publication du droit de réponse.