Avant l'agrandissement d'une maison, d'un bâtiment professionnel ou de toute autre construction, il est essentiel de vérifier si cette extension peut être autorisée par les règles d'urbanisme applicables, pour pouvoir obtenir un permis de construire et pour ne pas risquer des sanctions pénales. 

Mais pour cela, il ne suffit pas toujours de consulter le document d'urbanisme adopté localement (Plan Local d'Urbanisme / PLU, Plan d'Occupation des Sols / POS, carte communale...). 

En effet, comme le rappellent deux décisions récentes, certaines situations impliquent une analyse juridique supplémentaire, soit au vu d'autres règles applicables, soit au vu de la situation de la construction existante. 

 

Un exemple de règles d'urbanisme spécifiques : celles applicables dans les zones littorales

En bord de mer, de l'océan ou de certains lacs, la loi Littoral du 3 janvier 1986 (qui a donné lieu aux articles L. 121-1 et suivants de l'actuel code de l'urbanisme) fixe des règles spécifiques qui peuvent restreindre les possibilités de construction, en plus des règles d'urbanisme locales, afin de protéger les rivages sensibles à l'urbanisation. 

Une décision rendue par le Conseil d'Etat le 3 avril 2020 (n° 419139, 419142, 419144) est venue préciser l'application des règles de cette loi Littoral dans le cas des extensions de constructions. 

Les juges du Conseil d'Etat considèrent que la règle de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme (anciennement L. 146-4), selon laquelle l'extension de l'urbanisation doit se réaliser dans la continuité des secteurs déjà urbanisés, ne s'applique qu'aux constructions isolées et ne concerne donc pas l'agrandissement d'une construction existante. 

En revanche, les juges vérifient bien que l'extension n'empiète pas sur la bande littorale des 100 mètres, qui est inconstructible en application du même article du code de l'urbanisme. 

 

Une situation particulière : l'extension d'une construction irrégulière

A côté des règles d'urbanisme telles que le PLU ou la loi Littoral, la situation de la construction existante peut également poser une difficulté pour son agrandissement, lorsque celle-ci a été édifiée irrégulièrement. 

En effet, depuis la loi d'urbanisme du 15 juin 1943, il est nécessaire, en principe, d'obtenir un permis de construire avant de débuter une construction, sauf dans une série de cas listés aujourd'hui par le code de l'urbanisme. 

Si jamais une construction a été réalisée sans permis de construire alors qu'il était obligatoire, une fois passé le risque de sanctions pénales pendant plusieurs années (démolition, amende...), toute modification impliquera de demander une autorisation pour régulariser la construction dans sa totalité, y compris ce qui existe déjà depuis longtemps. 

C'est ce que rappelle la Cour administrative d'appel de Nantes, dans un arrêt du 5 novembre 2019 (n° 17NT01941), en annulant un permis de construire l'extension d'une maison initialement construite sans autorisation : la demande de permis ne pouvait pas porter uniquement sur l'extension, elle devait régulariser la totalité de la construction. 

 

On le voit, une analyse juridique peut être nécessaire même pour un simple agrandissement, afin de bien appliquer les différentes règles d'urbanisme et de bien prendre en compte la situation de la construction existante.  

 

Charlie ZERNA

Avocat à la Cour