1. Qu’est-ce que la détention provisoire ?
La détention provisoire est une mesure privative de liberté qui permet d’incarcérer une personne mise en examen ou prévenue dans l’attente d’une décision définitive de jugement.
La détention provisoire est une mesure attentatoire aux libertés individuelles. C’est pourquoi, son prononcé doit être strictement encadré par les articles 143-1 et 144 du Code de procédure pénale.
Quels sont les critères pour placer une personne en détention provisoire ?
L’article 144 du Code de procédure pénale dispose que la détention provisoire peut être ordonnée ou prolongée lorsque le contrôle judiciaire ou l’assignation à résidence avec surveillance électronique (bracelet électronique) sont insuffisants pour parvenir aux objectifs suivants :
- Conserver les preuves ou les indices matériels qui sont nécessaires à la manifestation de la vérité ;
- Empêcher une pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille ;
- Empêcher une concertation frauduleuse entre la personne mise en examen et ses coauteurs ou complices ;
- Protéger la personne mise en examen ;
- Garantir le maintien de la personne mise en examen à la disposition de la justice ;
- Mettre fin à l’infraction ou prévenir son renouvellement ;
- Mettre fin au trouble exceptionnel et persistant à l’ordre public provoqué par la gravité de l’infraction, les circonstances de sa commission ou l’importance du préjudice qu’elle a causé. Ce trouble ne peut résulter du seul retentissement médiatique de l’affaire. Toutefois, le présent alinéa n’est pas applicable en matière correctionnelle.
De la sorte, il y a donc une double condition qui est posée par cet article pour ordonner ou prolonger le placement en détention provisoire d’une personne :
- Le contrôle judiciaire ou l’assignation à résidence avec surveillance électronique paraissent insuffisants pour atteindre les objectifs de l’article 144 ;
- La détention provisoire constitue l’unique moyen de respecter l’un, au moins, de ses objectifs.
Même si le prononcé d’une détention provisoire semble devenir un automatisme dans le monde judiciaire, il est à rappeler que la détention provisoire doit être exceptionnelle.
Ainsi, si les conditions posées aux articles 143-1 et 144 du Code de procédure pénale ne sont plus réunies, une demande de mise en liberté peut être réalisée, à tout moment de la procédure, par la personne concernée ou par son avocat.
Cette faculté est aussi ouverte au ministère public. En revanche, la partie civile n’est pas avisée de cette demande.
2. Comment faire une demande de mise en liberté ?
À qui adresser une demande de mise en liberté ?
La demande de mise en liberté varie en fonction du cadre procédural :
- La demande de mise en liberté au cours de l’instruction
Lorsqu’une information judiciaire (instruction) est ouverte, il s’agit d’adresser sa demande de mise en liberté auprès du juge d’instruction. Celui-ci statue sur les demandes de mises en liberté tout au long de l’instruction jusqu’à l’ordonnance de règlement.
Le juge d’instruction bénéficie d’un délai de 5 jours pour se prononcer sur la demande de mise en liberté.
Il est à noter qu’en cas de refus du juge d’instruction de faire droit à cette demande de mise en liberté, il lui appartient de rendre une ordonnance de saisine du juge des libertés et de la détention (JLD) aux fins de rejet de la demande de mise en liberté. Ce dernier aura, quant à lui, un délai de 3 jours pour statuer sur cette demande.
En cas de non-respect des délais imposés, le détenu aura la possibilité de saisir le Chambre de l’instruction.
Attention : il est à noter qu’il n’y a pas d’audience d’organisée par le juge d’instruction ni par le juge des libertés et de la détention. La demande de mise en liberté ne fait pas l’objet d’un débat contradictoire. C’est pourquoi, il est important de transmettre une demande étoffée et justifiée pour mettre toutes les chances de votre côté.
- La demande de mise en liberté hors instruction
Lorsqu’aucune information judiciaire n’est ouverte et que la détention provisoire intervient dans le cadre d’une procédure correctionnelle, il appartient à la juridiction de jugement saisie de se prononcer sur la demande de mise en liberté. Cette demande est généralement réalisée directement à l’audience.
En matière criminelle, la cour d’assises n’est compétente que lorsque la demande est formée durant la session au cours de laquelle elle doit juger l’accusé. Dans les autres cas, la demande est examinée par la chambre de l’instruction.
En cas de pourvoi et jusqu’à l’arrêt de la Cour de cassation, il est statué sur la demande de mise en liberté par la juridiction qui a connu en dernier lieu de l’affaire au fond. Si le pourvoi a été formé contre un arrêt de la cour d’assises, il est statué sur la détention par la chambre de l’instruction.
Quelle forme doit prendre une demande de mise en liberté ?
- La demande de mise en liberté au cours de l’instruction
Dans le cadre d’une instruction, la demande doit être formulée auprès du juge d’instruction (v. supra).
Néanmoins, il n’y a pas de formalisme imposé.
La personne détenue peut remplir un formulaire directement auprès du greffe de l’établissement pénitentiaire.
Sinon, la personne détenue peut également charger son avocat de réaliser la demande de mise en liberté. Cette solution est plus que conseillé puisque l’avocat aura la possibilité de développer le fait que la détention provisoire n’est plus justifiée au regard des nécessités de l’instruction, qu’il y a un changement de circonstances rendant la détention provisoire injustifiée au regard de l’article 144 du code de procédure ou que l’état de santé du détenu n’est plus compatible avec la détention provisoire. De la même manière, l’avocat peut joindre à sa demande l’ensemble des pièces justificatives liées au projet de sortie (emploi, formation, hébergement, etc.).
Le dépôt de cette demande se réalise auprès du greffe du juge d’instruction ou par lettre recommandée lorsque la personne détenue ou son avocat ne résident pas dans le ressort de la juridiction compétente.
- La demande de mise en liberté hors instruction
Lorsque la personne est détenue dans une procédure hors instruction, il y a également la possibilité de faire une demande au sein du greffe de l’établissement pénitentiaire.
La demande peut aussi être formalisée par lettre recommandée ou par déclaration au greffe de la juridiction compétente.
Enfin, la demande peut aussi être formalisée au cours de l’audience par déclaration verbale ou par voie de conclusions. Il est important de se munir de toutes les pièces justificatives permettant d’appuyer la remise en liberté.
3. J’aimerais qu’un avocat intervienne en détention, comment faire ?
Il est tout à fait possible de faire appel à un avocat, même en cas de détention provisoire, pour assurer la défense de la personne détenue, dans son projet de sortie et dans sa défense au fond.
Pour ce faire, la personne détenue devra rédiger une lettre de désignation à envoyer directement au cabinet de l’avocat : « Je soussigné(e), Monsieur/Madame X, né(e) le X, à X, actuellement incarcéré au centre pénitentiaire de X, désigne Maître X pour assurer la défense de mes intérêts dans le cadre de la procédure X ».
Il est important que la personne notifie sur le courrier le nom complet de l’avocat, l’adresse de son cabinet, ainsi que son numéro d’écrou. Si la personne détenue connait également les numéros de sa procédure (numéro de parquet et numéro d’instruction), il est possible de les ajouter dans le courrier. Le nom, prénom et numéro d’écrou du détenu doivent également être inscrits au dos de l’enveloppe.En effet, pour que l’avocat puisse justifier de sa désignation et obtenir la copie de la procédure, il doit transmettre la lettre de désignation et son enveloppe.
Maître Clémence GUIHARD vous assiste sur Paris et dans toute la France pour votre procédure correctionnelle ou criminelle. N’hésitez pas à prendre rendez-vous ou à contacter Me GUIHARD pour toute question.
4. Quelles sont les suites d’une demande de mise en liberté ?
- La demande de mise en liberté au cours de l’instruction
Pour une demande de mise en liberté formée au cours de l’instruction, le juge d’instruction a un délai de 5 jours pour se prononcer.
Dans ce cadre, il peut :
- Ordonner une libération du détenu – la personne et son avocat se voient notifier cette libération ;
- Ordonner une saisine du juge des libertés et de la détention aux fins de rejet de la demande de mise en liberté. Le rejet doit être motivé sur le fondement des articles 143-1 et 144 du code de procédure pénale.
Attention : le délai de 5 jours ne court pas à compter du dépôt de la demande de mise en liberté, mais à compter du lendemain de dépôt du dossier au Procureur de la république aux fins de réquisitions. En effet, le Procureur de la république a également un rôle actif dans cette demande de mise en liberté puisqu’il peut s’y positionner favorablement ou défavorablement.
Le juge des libertés et de la détention bénéficie quant à lui d’un délai de 3 jours à compter de la transmission du dossier par le juge d’instruction et des réquisitions du Procureur de la république.
Dans ce cadre, il peut :
- Ordonner une libération du détenu – la personne et son avocat se voient notifier cette libération ;
- Ordonner un rejet de la demande de mise en liberté – la personne et son avocat se voient notifier ce refus. Le rejet doit être motivé sur le fondement des articles 143-1 et 144 du code de procédure pénale.
Il est à préciser qu’en cas de décision favorable de mise en liberté, la personne peut être placée sous contrôle judiciaire ou sous assignation à résidence sous surveillance électronique (bracelet électronique).
Il faut compter un délai d’environ quatre heures à la suite de la notification de la mise en liberté. Ce délai se justifie au regard de la possibilité pour le Procureur de la république de réaliser une procédure de référé-détention (article 148-1-1 du code de procédure pénale).
En cas de rejet, il est possible d’interjeter appel de cette décision dans un délai de 10 jours à compter de la notification de la décision. La Chambre de l’instruction devra statuer dans un délai de 15 jours.
- La demande de mise en liberté hors instruction
Dans la mesure où la demande est formalisée devant la juridiction de jugement, la décision arrive en principe directement après le délibéré. De ce fait, la décision ordonnant la remise en liberté peut être immédiate.
Les décisions rendues par les juridictions correctionnelles statuant sur les demandes de mises en liberté sont soumises aux délais de droit commun. En revanche, pour les décisions de refus de mise en liberté après la clôture de l’instruction, le délai d’appel est de 24 heures et pour les pourvois en cassation, de 5 jours.
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