Les interdictions d’exercer prononcées par le CNAPS à l’encontre des entreprises de sécurité privée peuvent entraîner des conséquences directes et immédiates sur les marchés publics, et ce quand bien même la sanction est annulée par la suite.

Un arrêt récent de la Cour administrative d’appel de NANCY (4 novembre 2025, n° 22NC01421) illustre cette situation.

Plusieurs personnes publiques ont confié, via un marché public conclu par un groupement de commandes, une mission de télésurveillance et de gardiennage des bâtiments et espaces publics à une Société de sécurité privée.

Au mois de mai 2021, une commission locale d'agrément et de contrôle du CNAPS a interdit à cette Société de sécurité privée le droit d'exercer toute activité privée de sécurité pendant vingt-quatre mois.

Le coordinateur du groupement de commande a résilié le marché pour faute en se fondant sur l’article 32.1 du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de fournitures courantes et de services de 2009 applicable au marché (CCAG FCS, article aujourd’hui repris à l’article 41.1 du CCAG FCS de 2021).

Considérant cette résiliation irrégulière, la société de sécurité privée a sollicité une indemnisation devant les juridictions administrative.

La Cour administrative d’appel de NANCY vient de confirmer la légalité de la résiliation.

En premier lieu, la juridiction a relevé que l’interdiction prononcée par le CNAPS empêchait l’entreprise de sécurité privée, société immatriculée au registre du commerce, ayant la qualité de commerçante, d'assurer les missions relevant du marché et « et dont il n'est par ailleurs pas contesté qu'elles sont les seules que son objet social lui permet d'exercer », au jour de la résiliation.

En deuxième lieu, la Cour a estimé qu’aucune mise en demeure n’était nécessaire en se fondant sur l’article 32.2 du CCAG FCS. En effet, la résiliation était fondée sur l’interdiction, intervenue après la signature du marché, pour le titulaire d’un marché d’exercer toute profession industrielle ou commerciale (article 31.1 m) CCAG FCS).

En troisième lieu, la juridiction a estimé que la sous-traitance agrée d’une partie du marché, à savoir les missions de télésurveillance, n’a aucune incidence sur la possibilité pour une personne publique de résilier la totalité du marché.

En quatrième et dernier lieu, la circonstance que l’interdiction du CNAPS ait été suspendue par le Juge des référés n’a pas eu d’incidence sur la résiliation. La Cour a constaté que la résiliation a été mise en œuvre alors que la sanction prononcée par le CNAPS était valide. La suspension de cette dernière n’ayant eu lieu que plusieurs semaines après la résiliation, le coordinateur du groupement n’a pas commis de faute.

L’arrêt ici résumé illustre bien les conséquences d’une sanction du CNAPS sur les marchés publics attribués à des entreprises de sécurité privée. Il peut paraître sévère dès lors que la décision du CNAPS a été d’abord suspendue par le juge des référés (TA Amiens, 29 juin 2021) puis annulée au fond (TA Amiens, 22 décembre 2022, n° 2103397, décision dont il ne peut être déterminée si elle est définitive à ce jour). Toutefois, il correspond aux règles gouvernant l’exécution des contrats de la commande publique.

Aussi, il ne peut être que conseillé aux entreprises privées de sécurité de contester le plus vite possible les sanctions prononcées à leur encontre, action facilitée par une analyse du dossier dès son commencement.

En l'espèce, la question de la responsabilité du CNAPS et notamment pour la perte du chiffre d’affaires peut aussi se poser si l’annulation de la sanction est aujourd’hui définitive.

Damien GUILLOU

Avocat

damien.guillou@avocat.fr