Le mariage crée des devoirs pour chacun des époux. En passant devant le maire, ils s’engagent aux devoirs de fidélité, d’assistance et de contribution aux charges du mariage (articles 212 et svts code civil).

 

Si aucun article du code civil ne mentionne le « devoir conjugal », il est rattaché par les juges, à l’obligation  de communauté de vie (art. 215 ali.1 C.C.) et à celle de fidélité entre époux (art. 212 C.C.).

 

 Ce devoir consiste en l’obligation d’entretenir des relations sexuelles régulières entre époux.

 

Toutefois, le mariage n’étant pas un long fleuve tranquille, le refus d’accomplir son devoir conjugal peut avoir de lourdes conséquences sur le mariage, si l’absitnence se prolonge.  Une abstinence temporaire n’aura pas de conséquences alors qu’une abstinence prolongée peut constituer un manquement au devoir conjugal pouvant entrainer la rupture du mariage .

 

En premier lieu : l’époux victime pourra agir en justice et demander le versement de dommages-intérêts sur le fondement de l’article 1240 du code civil,  qui condamne toute personne qui "cause à autrui un dommage à autrui" à le réparer.

 

La Cour d'Appel d’Aix-en-Provence a ainsi octroyé la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts à l'épouse sur le fondement de l'article 1382 du Code civil (ancien article 1240), pour absence de relations sexuelles pendant plusieurs années du fait du mari, âgé de 51 ans, qui, invoquant des problèmes de santé, ne justifiait pas d'une incapacité totale d'avoir des relations intimes avec son épouse. L'abstinence ainsi imposée  constituait donc une faute engageant sa responsabilité civile.

La Cour a précisé : « Les attentes de l'épouse étaient légitimes dans la mesure où les rapports sexuels entre époux sont notamment l'expression de l'affection qu'ils se portent mutuellement, tandis qu'ils s'inscrivent dans la continuité des devoirs découlant du mariage ».

(C Appel 6e ch. B, 3 mai 2011 n° 2011/292, RG 09/05752)

 

 En second lieu : L’époux pourra engager une procédure en divorce pour faute aux torts exclusifs de son conjoint sur le fondement de 242 du code civil

Toutefois la jurisprudence exige certaines conditions pour que le refus du devoir conjugal soit constitutif d’une faute :

-L’interruption sexuelle doit être • prolongée : dans un arrêt du 28 janvier 2015, la Cour de Cassation a estimé qu’un refus de relations pendant plus de 8 ans constituait une faute   (Cass. Civ. 28 janv. 2015, 13-27.466),

         •     à l’initiative d’un seul des époux et

          •     étrangère à des raisons médicales

 

La Cour d'appel d'Amiens dans un arrêt du 28 février 1996  définissait les conditions de l’abstinence  dans le cas d'une épouse qui prétendait suivre un traitement médical sans en justifier

"S'il est admissible de refuser des relations sexuelles à son conjoint pendant quelques semaines, cela ne l'est plus quand le refus s'est installé pendant plus d'une année et qu'il n'était pas prévu d'y mettre fin un jour. Il s'agit donc d'une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage, rendant intolérable le maintien de la vie commune et dans ces conditions, le divorce sera prononcé aux torts de la femme, le premier jugement étant infirmé sur ce point. 

 

-L’époux victime devra toutefois, prouver l’absence de relations sexuelles.

 Cette preuve peut s’avérer délicate à obtenir au regard du contexte. S’agissant d’un fait, cette preuve est libre  par tout moyen : preuves médicales, certificat médicaux, échanges de correspondance, mails SMS entre les époux. La jurisprudence ayant admis en 2013, la production d’une télécopie contenant les aveux de l’époux.  (Cass. Cv. 10 juillet 2013, n°12-18.274).

 

Enfin, il faut préciser que si les époux décident d'un commun accord de ne plus avoir de relations sexuelles, aucune faute ne pourra être retenue contre l’un d’eux. De même que d’insuffisantes « prouesses » sexuelles ne sauraient constituer une faute.

 

Après la contrainte sexuelle, l’abstinence sexuelle fait donc l’objet de sanctions.

 

Si selon Honoré de Balzac, « le lit est tout le mariage », les Tribunaux s’immiscent dans le lit conjugal, ceci pour le meilleur ou pour le pire…