Madame X a été embauchée par FRANCEE TELEVISIONS en qualité d’Animatrice radio, sous contrat à durée déterminée d’usage successifs du 23 mars 2018 au 18 septembre 2024.
Dans le cadre de ses CDD d’usage, elle était chargée de la préparation et de l’animation de différentes émissions diffusées sur l’antenne de la Réunion 1ère. (Pièces 1 et 2)
En moyenne, sur les années complètes, Madame X travaillait ainsi 94 jours par an.
Son salaire mensuel brut moyen s’élève à 2.486 €.
A la fin de la saison radiophonique 2023/2024, FRANCE TELEVISIONS annonce brutalement à Madame X qu’elle ne sera pas renouvelée sur l’émission Y, qu’elle anime depuis 2019 sur la tranche Z.
La société lui a alors proposé d’animer, pour la rentrée, une émission qui se déroule de 8h à 10h.
Madame X, n’a eu d’autre choix que de décliner cette proposition, en rappelant qu’elle était contrainte de déposer ses enfants à l’école le matin sur ce créneau horaire, ce dont la société FRANCE TELEVISIONS avait connaissance depuis son embauche.
Elle a néanmoins renouvelé son souhait de poursuivre sa collaboration et sa disponibilité pour toute autre émission sur une autre tranche horaire.
Contre toute attente, le 18 septembre 2024, sans que la moindre autre proposition de contrat ne lui soit faite, la société FRANCE TELEVISIONS a notifié à Madame X la rupture de sa collaboration.
Madame X a immédiatement dénoncé les conditions de cette rupture.
Dans un jugement du 3 juillet 2025, le Conseil de Prud’hommes de Paris, statuant publiquement, par jugement contradictoire en premier ressort :
Requalifie les CDD d'usage en CDI à compter du 20 mars 2018 ;
Condamne la Société FRANCE TELEVISIONS à verser à Madame X les sommes suivantes :
- 1554,29 € à titre d'indemnité de requalification ;
- 3108,58 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
- 310,85 € au titre des congés payés afférents ;
- 3264,00 € à titre d'indemnité légale de licenciement ;
- 4662,87 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- 736,80 € à titre de rappel de prime d'ancienneté ;
Rappelle qu'en application des articles 1231-6 et 1231-7 du Code civil, les intérêts courent à compter de la réception, par la partie défenderesse, de la convocation devant le premier bureau de jugement, pour les créances de nature salariale et à compter du prononcé du jugement pour les créances à caractère indemnitaire.
- 2000,00 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Ordonne la remise des documents sociaux conformes à la décision à intervenir (attestation France Travail, certificat de travail) ; •
Déboute Madame X du surplus de ses demandes ;
Déboute la Société FRANCE TELEVISIONS de l'ensemble de ses demandes ;
En application de l'article L.1235-4 du Code du travail, ordonne à la Société FRANCE TELEVISIONS de rembourser à France Travail, les indemnités de chômage versées à Madame X, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite d'un mois d'indemnité de chômage.
Condamne la Société FRANCE TELEVISIONS aux dépens.
1) Sur la demande de requalification des CDD usage en contrat à durée indéterminée
L'article L. 1242-1 du code du travail dispose que : " Un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise « ;
L'article L. 1242-2 du code du travail dispose que : " Sous réserve des dispositions de l'article L.1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas suivants :
- ( ..)
3° Emplois (') pour lesquels, dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois. Lorsque la durée du contrat de travail est inférieure à un mois, un seul bulletin de paie est émis par l'employeur " ;
L'article D. 1242-1 du code du travail dispose que : "En application du 3° de l'article L. 1242-2, les secteurs d'activité dans lesquels des contrats à durée déterminée peuvent être conclus pour les emplois pour lesquels il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nat1,1re temporaire de ces emplois sont les suivants :
- ( ..)
6° Les spectacles, l'action culturelle, l'audiovisuel, la production cinématographique, l'édition phonographique ... " ;
Le seul fait qu'un secteur d'activité figure dans la liste fixée par l'article D. 1242-1 du code du travail ou par l'accord de branche étendu dont relève l'entreprise ne suffit pas à justifier le recours à un contrat de travail à durée déterminée d'usage pour tous les emplois de ce secteur. Il faut également qu'il soit d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison du caractère par nature temporaire de l'emploi concerné. Leur caractère temporaire doit résulter d'un usage et c'est à l'employeur qui se prévaut de cet usage d'en apporter la preuve.
De même la conclusion de contrats de travail à durée déterminée d'usage successifs avec un même salarié est possible à condition d'être justifiée par des raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi concerné.
En l'espèce, l'activité principale de la société France Télévisions dans le secteur de l'audiovisuel figure sur la liste fixée par l'article D. 1242-1 du code du travail et il résulte de l'accord collectif national de branche de la télédiffusion du 22 décembre 2006, produit par la société France Télévisions, que le recours aux contrats à durée déterminée d'usage 'n'est justifié que lorsque l'emploi s'exerce dans les circonstances suivantes: lorsque pèsent sur les activités des incertitudes quant à leur pérennité ou lorsqu'elles ont un caractère exceptionnel ou événementiel ou lorsqu'elles requièrent des compétences techniques ou artistiques spécifiques', relativement aux emplois listés en annexes, dont les animateurs.
Les critères du recours aux contrats de travail à durée déterminée d'usage posés par l'accord collectif national de branche de la télédiffusion du 22 décembre 2006 ne sont pas remplis en ce que les émissions auxquelles a collaboré Madame X n'étaient pas sujettes à des incertitudes quant à leur pérennité, elles n'avaient pas un caractère exceptionnel et ne requéraient pas de sa part de compétences techniques ou artistiques spécifiques.
De plus, la durée réduite des missions ne constitue pas davantage un élément objectif établissant le caractère temporaire de l'emploi de Madame X ;
Ainsi, à défaut d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi de Madame X et le renouvellement systématique de la collaboration pendant de nombreuses années, pour la réalisation d'émissions régulièrement diffusées par la société FRANCE TELEVISION, établi la permanence de l'emploi de l'intéressé, lequel est ainsi lié à l'activité normale de cette entreprise, de sorte que la succession de contrats à durée déterminée constitue un ensemble à durée indéterminée ;
Par conséquent, le Conseil requalifie les contrats de travail à durée déterminée de Madame X à compter du 20 mars 2018 en contrat à durée indéterminée ;
En moyenne, sur les douze derniers mois de collaboration, Madame X a perçu une rémunération brute annuelle de 26 645 € ;
Cependant, en tenant compte de la majoration de 30 % perçu eu égard à son statut de non permanent, il y a lieu de retenir que sa rémunération annuelle, en qualité de permanente doit être fixée à hauteur de 18 651,50 € bruts ;
En conséquence, le Conseil fixe le salaire mensuel brut de Madame X à 1554,29·euros ;
Suivant l'article L.1245-2, lorsque le conseil de prud'hommes fait droit à la demande du salarié, il lui accorde une indemnité, à la charge de l'employeur, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire ; Cette disposition s'applique sans préjudice de l'application des dispositions du titre III du présent livre relatives aux règles de rupture du contrat de travail à durée indéterminée ;
En conséquence, le Conseil condamne la société FRANCE TELEVISIONS à Madame X, la somme de 1554,29·euros à titre d'indemnité de requalification.
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Frédéric CHHUM avocat et ancien membre du conseil de l’ordre des avocats de Paris (mandat 2019-2021)
CHHUM AVOCATS (Paris, Nantes, Lille)
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https://www.instagram.com/fredericchhum/?hl=fr
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