Cass. civ2., 24 oct. 2024, n° 22-18.073.
Nullité – Acte de procédure – Article 114 Code de procédure civile – Irrégularité – Grief absence – Défaut de caractérisation.
La deuxième chambre civile de la Cour de cassation, encore elle, casse un arrêt de la cour d’appel de Toulouse déclarant nulle la signification d’un jugement du tribunal de commerce, ainsi que la saisie-attribution qui en découlait.
Au visa de l’article 114 du code de procédure civile, il est fait grief à la cour d’appel de n’avoir pas caractérisé le grief causé par l’irrégularité de la signification ; la nullité ne pouvant être prononcée.
Les faits :
Suivant jugement du 12 décembre 2018, le tribunal de commerce de Paris condamne Mme [L] au paiement d’une certaine somme à la société Presstalis.
Forte de cette décision, cette société, après avoir fait signifier le jugement suivant actes des 7 et 11 février 2019, fait pratiquer une saisie attribution, le 11 février 2020, sur les comptes de la débitrice tenus dans les livres de la Société Générale.
La saisie attribution est contestée devant le JEX, lequel, suivant jugement du 19 juin 2021, déboute la débitrice de sa demande de mainlevée de la saisie.
Appel contre ce jugement JEX est formé.
(NDLA) Petit rappel : Une saisie attribution, comme toute voie d’exécution, suppose une signification préalable au débiteur. Il en va de la régularité de la mesure.
La cour d’appel de Toulouse, dans un arrêt du 21 avril 2022, déclare nul et de nul effet l’acte de signification des 7 et 11 février 2019 du jugement du tribunal de commerce de Paris du 12 décembre 2018. S’en suit naturellement l’anéantissement de la saisie attribution, faute de signification préalable du titre.
En l’absence de signification du titre ayant fondé la saisie, celle-ci est donc naturellement déclarée nulle, la mainlevée ordonnée.
La solution est classique.
Sauf que, les sociétés MJA et [H] Yang-Ting, prises en qualité de liquidateurs à la liquidation judiciaire de la société Presstalis, se pourvoient en cassation, au motif que la cour d’appel de Toulouse n’a pas satisfait aux exigences cumulatives de l’article 114 du cpc, savoir une irrégularité telle que définie par le texte et un grief en découlant.
Plus précisément, la cour n’a pas caractérisé le grief, se contentant de préciser que les diligences effectuées par l’huissier de justice pour rechercher le domicile de Mme [L] « doivent être qualifiées d’insuffisantes ».
Réponse de la cour :
L’article 114 du code de procédure civile pose des conditions cumulatives au prononcé d’une nullité : la nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public.
Pour déclarer nulle la signification du jugement du 12 décembre 2018 et par voie de conséquence, déclarer nulle la saisie-attribution, l’arrêt retient que la société Presstalis, qui a contracté avec Mme [L], l’a autorisée à déléguer l’exploitation de son contrat de dépositaire à la société Tarbes diffusion dont elle était gérante, et que Mme [L] produit le K-bis de la société Tarbes diffusion presse duquel il ressort que la société a été clôturée pour insuffisance d’actif par jugement du 3 novembre 2017 mais que par jugement du 5 février 2018 le tribunal de commerce de Tarbes a décidé la reprise de la procédure de liquidation judiciaire qui a finalement été clôturée le 17 septembre 2019.
Il est fait grief à l’huissier de justice ne pas justifier avoir contacté le liquidateur de cette société pour connaître les coordonnées de sa gérante. Il s’en déduit alors que les diligences de l’huissier de justice étant insuffisantes, la signification est nulle.
Or, les termes de l’article 114 du code de procédure civile ne souffrent pas d’équivoque : pas de nullité sans texte et pas de nullité sans grief.
La cour d’appel de Toulouse a constaté une irrégularité sans se préoccuper d’établir si celle-ci faisait grief ou pas.
La cour casse l’arrêt du 21 avril 2022, renvoyant les parties devant la cour d’appel de Toulouse, autrement composée, qui aura à nouveau à connaître des conditions de mise en œuvre de l’article 114 du code de procédure civile.
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