Un enjeu émergent du dialogue social
Depuis plusieurs années, la question de la santé des femmes au travail s’impose progressivement dans le débat public et dans le champ de la négociation collective.
Alors que plusieurs propositions de loi ont été déposées pour encadrer le congé menstruel ou mieux reconnaître les pathologies comme l’endométriose, aucune n’a, à ce jour, été adoptée.
Pour autant, les partenaires sociaux se sont saisis du sujet : de nombreuses entreprises, tous secteurs confondus, intègrent désormais ces thématiques dans leurs accords sur l’égalité professionnelle et la qualité de vie au travail.
Une jurisprudence favorable à des dispositifs ciblés
La Cour de cassation, dans un arrêt du 12 juillet 2017 (Cass. soc., 12 juill. 2017, n°15-26.262), a expressément admis qu’un accord collectif puisse instaurer une mesure spécifique au bénéfice des femmes, dès lors qu’elle vise à corriger une inégalité de fait.
Autrement dit, un congé réservé aux salariées peut être juridiquement valide s’il tend à rétablir une égalité réelle entre les hommes et les femmes au sein de l’entreprise.
Cette décision a ouvert la voie à des initiatives conventionnelles concrètes, centrées sur la prévention, la santé et le bien-être au travail.
Les accords collectifs en faveur de la santé des femmes
Plusieurs entreprises françaises, de tailles et de secteurs différents, ont intégré des dispositions innovantes dans leurs accords récents.
Elles concernent notamment le congé menstruel, la prise en charge de l’endométriose, la fausse couche, ou encore l’accompagnement des femmes ayant recours à la PMA.
Exemples récents d’accords collectifs :
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EPTA France (réfrigération commerciale) – 1 jour d’absence rémunéré par mois pour les salariées atteintes d’endométriose, sur présentation d’un certificat médical.
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Carrefour (grande distribution) – 12 jours d’absence pour endométriose reconnue, 3 jours en cas de fausse couche, 1 jour pour PMA.
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L’Oréal (industrie cosmétique) – 3 jours d’absence pour endométriose ou fausse couche, sans condition d’ancienneté.
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Cargill France (industrie alimentaire) – Jusqu’à 13 jours par an pour menstruations incapacitantes.
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Groupe Stef (logistique agroalimentaire) – 1 jour d’absence pour endométriose, 2 jours pour fausse couche pour la salariée et son conjoint.
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SNCF Connect & Tech (activités administratives) – Création d’un « compteur solidaire » de 3 jours par an pour fausse couche, violences conjugales ou accompagnement d’un proche.
Ces dispositifs s’accompagnent d’un souci de confidentialité et d’une souplesse d’application, souvent sans délai de prévenance, avec un simple justificatif médical.
Une nouvelle approche de l’égalité au travail
L’émergence de ces accords traduit une évolution majeure du droit social :
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la reconnaissance de la spécificité des enjeux de santé féminine,
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la valorisation du dialogue social comme instrument d’adaptation du droit,
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et la promotion d’une égalité réelle, fondée sur la prise en compte des différences de situation.
Ces initiatives démontrent que la négociation collective peut précéder la loi et créer des standards de protection innovants, conciliant la performance de l’entreprise et la santé au travail.
La santé des femmes devient un axe structurant du dialogue social et un indicateur de maturité sociale des entreprises.
En intégrant la dimension biologique et médicale dans la gestion des ressources humaines, les accords collectifs ouvrent la voie à une égalité professionnelle plus concrète et plus protectrice.

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