La délivrance du titre de séjour « vie privée et familiale » est conditionnée par l’intensité des liens personnels et familiaux en France

Je publie un jugement rendu le 26 novembre 2018 par le tribunal administratif de Marseille dans une affaire où le Préfet avait refusé de délivrer un titre de séjour « vie privée et familiale » à un étranger qui vivait en France avec sa compagne depuis 2 ans et leur enfant âgé de 1 an.

En droit et en raison de la nationalité algérienne de l’étranger, l’article 6 – 5) de l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968  prévoit que : « Le certificat de résidence d’un an portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit : – 5) au ressortissant algérien, qui n’entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d’autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; ».

L’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme protège le droit au respect de la vie privée et familiale en indiquant : « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ».

Le motif de refus du Préfet étaient dans cette affaire : une insuffisance de preuve de l’ancienneté et la stabilité des liens personnels et familiaux en France

Le Préfet justifiait ainsi son refus d’admettre au séjour l’intéressé : « « l’ensemble des documents présentés par Monsieur …. ne permet pas d’établir ses moyens d’existence et de subsistance…ni n’établit l’ancienneté et la stabilité de ses liens personnels et familiaux ».

Le Juge a retenu que le Préfet avait commis une erreur d’appréciation des faits

J’ai exercé un recours contentieux devant le Tribunal contre les décisions du Préfet portant refus d’admission au séjour et obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours.

Je soutenais notamment que le Préfet avait commis une erreur manifeste d’appréciation des faits dans la mesure où, à la date de la décision contestée, mon client résidait en France depuis plus de 2 ans avec une personne titulaire d‘un titre de séjour de 10 ans et leur enfant âgé de 1 ans. Il avait au surplus conclu un pacte civil de solidarité (PACS) un mois après la décision préfectorale.

Le Tribunal dispose d’un pouvoir souverain pour apprécier l’existence des liens personnels et familiaux de l’intéressé en France et le caractère disproportionné de l’atteinte que porte un refus de séjour au droit de l’intéressé au respect de sa vie privée et familiale (article 8 de la CEDH ).

Le Tribunal va juger que : « eu égard à cette situation familiale, M…est fondé à soutenir que le Préfet des Bouches-du-Rhône, en prenant l’arrêté en litige, a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de ses décisions et a ainsi méconnu les stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ».

Cette jurisprudence est intéressante car, dans une espèce comparable où les liens familiaux pouvaient être considérés comme plus anciens et stables (l’étranger résidait en France depuis 3 ans avec son épouse titulaire d’un titre de séjour de 4 ans, épouse avec laquelle il avait un enfant âgé de 1 an et qui était enceinte de leur 2ème enfant), le Tribunal avait considéré à l’inverse que : « ces circonstances, relativement récentes à la date de la décision attaquée ne suffisent pas à établir qu’il aurait constitué en France le centre de ses intérêts familiaux ».

Je communique en pièce jointe le jugement. 

Jean-Laurent BUQUET, Avocat au Barreau de Marseille, tél: 06 16 31 08 42 ; mail : jeanlaurent.buquet@gmail.com; site internet : buquet-avocat.fr