L’allocation d’éducation de l’enfant handicapé est une aide aux parents pour la prise en charge de leur enfant handicapé. Le handicap est défini comme une limitation à la vie en société en raison d’une altération dans les fonctions physiques, mentales, sensorielles, entre autres. Les parents d’un enfant handicapé font face à de charges lourdes pour subvenir à ses besoins. Certains se voient forcés d’arrêter ou diminuer leur charge de travail pour s’en occuper, d’autres doivent embaucher une tierce personne pour une aide spécialisée. De même, certains handicaps exigent des dépenses adaptées à la situation de l’enfant. Ces pertes financières et surcoûts pèsent gravement sur l’économie familiale.
 
Face à cette problématique, parmi de nombreuses aides, les pouvoirs publics garantissent une prestation monétaire aux familles : l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH). Depuis le 1er avril 2023, le montant de cette allocation peut aller jusqu’à 1830.75 € par mois et par enfant.
 
Pour comprendre le régime juridique de cette allocation, Maître Johan Zenou expert en droit du handicap à Paris aborde les fondements de son attribution (I) et son fonctionnement pratique (II).
 

I. Les fondements juridiques de l’attribution de l’AEEH

 
Des conditions d’attribution exigeantes

 
Selon l’article L.541-1 du Code de la Sécurité sociale, plusieurs conditions cumulatives sont nécessaires pour bénéficier de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé :

 

  • L’enfant doit être âgé de moins de 20 ans et résider en France.
  • Un taux de handicap déterminé doit être certifié. Le taux de handicap est une façon de chiffrer les difficultés d’une personne handicapée face à sa vie quotidienne. Il est établi par le médecin et, pour bénéficier de l’AEEH, il doit être :
  • De plus de 80% ou
  • D’entre 50% et 79%, si l’enfant nécessite des soins spécialisés déterminés par la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées ou s’il est accueilli dans un centre spécialisé.

 

Ce taux est établi selon un guide barème (annexe 2-4 du Code de l'action sociale et des familles). Il tient compte de l’autonomie de l’enfant. Par exemple, il sera moins important si l’enfant peut se laver, s’habiller ou suivre les cours tout seul.
 

  • Cette allocation n’est pas conditionnée à des critères de revenu des parents.
  • Cependant, l'enfant ne doit pas non plus être placé en internat avec prise en charge intégrale des autorités ou de l’assurance maladie.

 
Une fois ces conditions réunies, une demande peut être adressée à l’Administration.

 
Une procédure spécifique

 
La demande doit être déposée auprès de la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) du département. Celle-ci l’enverra à la Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) qui prendra une décision dans les quatre mois suivant le dépôt.
 
Les pièces justificatives requises sont les suivantes:
 

  • Le formulaire de la demande (Cerfa n°15695*01).
  • Un certificat médical (Cerfa 15695*01) à remplir avec le médecin traitant ou un spécialiste, expliquant la situation de l’enfant et ses problèmes de santé.
  • Des pièces complémentaires sont aussi nécessaires, telles que des documents d’identité de l’enfant et des parents, un justificatif de domicile, des photocopies du livret de famille, entre autres.
  • Il faudrait aussi apporter des pièces liées à l’objet de la demande telles que le contrat signé avec le personnel spécialisé, les factures des dépenses engagées / prévues, ou l’attestation de réduction de l’emploi des parents.

 
Certains départements permettent de saisir les demandes en ligne et d’autres les traitent seulement par courrier ou sur place. Il faudra se référer aux dispositions administratives à ce sujet pour procéder correctement selon vos préférences. Cette décision est assujettie au silence administratif négatif, c'est-à-dire que si une réponse n’est pas donnée à la fin du délai prévu, elle est réputée de constituer un rejet (CSS, article R 541-6). En attendant la décision de la MDPH, l’allocation journalière de présence parentale (AJPP) peut être demandée, dans le cas où l’un des parents a diminué son activité avec un délai de deux mois seulement.
 
Plusieurs administrations sont responsables de verser les allocations, dans la plupart des cas où il s’agit de la caisse d’allocations familiales (CAF). Néanmoins, si le bénéficiaire exerce une profession agricole, il s’agit de la Mutualité sociale agricole (MSA).

 
II. Les suites pratiques de la décision de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé


 
Un montant variable
 
Cette allocation est composée d’une base et de compléments. Plusieurs critères sont pris en compte pour décider du montant de l’aide :

 

  • Les dépenses liées au handicap (l’aménagement de locaux, l’appareillage…) ou à des actes médicaux non remboursés. Par exemple, un fauteuil roulant, la construction d’une rampe, un moyen de transport spécialisé…
  • Le recours à de tierces personnes (des aides-soignants, une surveillance…)
  • La diminution de l’activité professionnelle du parent, qui peut être à temps partiel ou à temps plein. Cette diminution est appréciée globalement si les deux parents diminuent leur temps de travail pour aider l’enfant. Par exemple, si le père travaille à 60% du temps plein et la mère à 60%, la réduction globale sera de 80%.

 
Le montant de l’allocation, par mois et par enfant, est décidé selon la combinaison des critères mentionnés. Il est actualisé au 1er avril de chaque année. En 2023, le montant de base de l’AEEH était de 142,70 € et les montants des compléments, comprenant six niveaux différents, étaient de :

 
Catégorie de complément 2    432,55 €
Catégorie de complément 3    552,95 €
Catégorie de complément 4    778,46 €
Catégorie de complément 5    955,23 €
Catégorie de complément 6    1353,60 €


 
En cas de parent isolé, il est possible d’obtenir une majoration qui s’ajoute à la base et au complément, selon l’article L 541-4 du Code de la Sécurité sociale. Elle peut aller jusqu’à 320,59 € en catégorie 6. En outre, l’AEEH peut se cumuler avec l’allocation journalière de présence parentale (AJPP), cependant elle ne peut pas se cumuler avec la majoration de parent isolé. L’AEHH peut également se cumuler avec le revenu de solidarité active (RSA). Afin de décider parmi ces bénéfices, la MDPH ou un avocat peuvent vous conseiller.
 
A contrario, il ne peut pas avoir de cumul entre l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé et la prestation de compensation du handicap (PCH), sauf si le complément AEEH est fait pour un objet différent. L’AEEH ne peut pas non plus se cumuler avec les allocations chômage (Cass. 2e civ. 19 janvier 2006 n° 04-30.426). Il paraît convenable de préciser que les droits à l’allocation commencent du 1er jour du mois suivant au dépôt de la demande et que le montant de l’AEEH n’est pas imposable.


Les recours, le renouvellement et la fin de l’allocation
 
Si vous n’êtes pas d’accord avec le montant de l’allocation attribuée, ou l’AEEH vous a été refusée, la MDPH peut réétudier votre demande. Si la réponse est à nouveau négative, une procédure de conciliation peut aussi être demandée. Toutefois vous pouvez également faire un recours auprès du tribunal judiciaire dans les deux mois qui suivent la décision. La représentation d’un avocat n’est pas obligatoire, cependant elle est conseillée.
 
Si le blocage se fait au niveau de la CAF ou de la MSA, une révision auprès de la même autorité, une médiation, une procédure devant la commission de recours amiable (CRA) ou devant le tribunal judiciaire sont aussi possibles. Concernant la durée de l’AEHH, des changements ont eu lieu suite à un décret du 24 décembre 2018 (CSS, article R 541-4). Bien qu’avant le 1er janvier 2019, il y avait une durée limitée pour l’AEEH de base établie à cinq ans maximum, depuis cette date la durée peut être illimitée si les certificats médicaux garantissent que le handicap grave (d’au moins un taux de 80%) n’a pas de perspectives d’amélioration. Quant aux compléments, ils ne bénéficient pas de cette disposition, par contre leur durée minimale a été élargie d’un an à trois ans en 2019.
 
Pour les handicaps graves, mais qui ont une perspective d’amélioration, la durée de l’allocation est d’entre trois et cinq ans. Pour les autres handicaps, d’un taux entre 50 et 79%, une durée d’entre deux et cinq ans est prévue, tant pour la base que pour les éventuels compléments.
 
La demande de renouvellement devra être déposée six mois avant la fin de l’allocation. La procédure est la même que pour la première demande. Si la décision de la nouvelle demande est postérieure à la fin de l’allocation antérieure, un règlement rétroactif sera réalisé. Ainsi, les mois non payés seront acquittés en même temps que le premier règlement postérieur au renouvellement des droits.
 
Quant à la fin de l’allocation, une fois que l’enfant a dépassé l’âge de 20 ans, l’AEEH est remplacée par l’allocation d’adulte handicapé (AAH). Ce basculement est effectué automatiquement par la CAF sans avoir aucune démarche à accomplir. Une autre hypothèse de fin de l’allocation est l’absence de suite aux mesures ordonnées, dans ce cas l’AEEH peut être suspendue ou supprimée (CSS article L 541-2, al. 2). En cas de décès de l’enfant, l’aide continue à être versée pendant 3 mois (CSS, article R. 552-3).
 
Le régime de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé est complexe, mais adapté aux circonstances particulières de la famille qui a besoin d’une aide. Si vous souhaitez un accompagnement dans vos démarches liées à l’AEEH, le Cabinet Zenou expert en droit de la sécurité sociale à Paris à 20ème met à votre disposition son expertise pour la rédaction du recours administratif préalable obligatoire (RAPO) et vous assiste tout au long de l’évolution de votre dossier devant le Tribunal Judiciaire Pôle social.